Статті в журналах з теми "Institutions politiques – Gabon – 1970-"

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Duterme, Clara, and Catherine Lacaze. "América Central (siglos XIX-XXI): porosidad de las fronteras y circulaciones internas." Revista Trace, no. 77 (January 31, 2020): 5. http://dx.doi.org/10.22134/trace.77.2020.766.

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Анотація:
Del ideal unionista hasta las fracturas políticas generadas por los conflictos armados desarrollados en las décadas de 1970 y 1980, de las luchas pasadas para establecer fronteras nacionales hasta las luchas actuales para regular o impedir el paso de los migrantes y refugiados, de los centros de poder económico y político hasta los márgenes donde las instituciones estatales siempre estuvieron ausentes, el espacio centroamericano constituye un territorio contrastado y marcado por las movilidades de personas y de ideas.De l’idéal unioniste aux fractures politiques engendrées par les conflits armés des années 1970 et 1980, des affrontements passés visant à établir des frontières nationales aux affrontements actuels pour contrôler ou empêcher le passage des migrants et des réfugiés, des centres de pouvoir économiques et politiques aux zones marginales où les institutions étatiques ont toujours été absentes, l’espace centraméricain constitue un territoire contrasté et marqué par les mobilités des individus et des idées.
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MAGIS, Christophe. "Les mutations algorithmiques des politiques culturelles : critique de la percée de la catégorie de « découvrabilité »." Varia Vol. 17 | N° 1-2 | 1er semestre (2023): 83–110. http://dx.doi.org/10.4000/11r9a.

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Анотація:
Cet article analyse l’émergence récente de la catégorie de « découvrabilité » dans plusieurs rapports émanant d’institutions de la francophonie. Tandis que les services de streaming culturel comme Netflix ou Spotify dominent la distribution numérique des productions audiovisuelles ou musicales, ces institutions mettent en avant à travers cette catégorie les risques que les algorithmes de recommandation font peser sur l’invisibilisation possible des contenus culturels en français. En nous appuyant sur la littérature scientifique ainsi que sur les rapports officiels, nous étudions les enjeux afférents à cette thématique de la « découvrabilité » en les mettant en regard de l’évolution de la catégorie de « diversité » dans les débats sur les politiques publiques des institutions nationales et supranationales depuis les années 1970.
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Marlière, Éric. "Les « embrouilles » de jeunes en discothèques - Fêtes urbaines, violences ritualisées et compétitions masculines." Diversité 167, no. 1 (2011): 15–22. http://dx.doi.org/10.3406/diver.2011.3490.

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Étudier la violence juvénile dans les lieux de fête urbains en France semble paradoxal ; d’une part, cette violence, qui se limite ici à des endroits précis comme la discothèque ou les bars de centre-ville, n’est pas nouvelle en soi – en témoignent, les bagarres dans les bals populaires des villages qui ont toujours existé ou encore les rixes collectives (parfois spectaculaires) dans les concerts de rock durant les décennies 1960 et 1970 ; d’autre part, ce type de violence qui concerne les espaces de fête en ville n’apparaît pas en France comme un sujet de débats ou une priorité pour les élus locaux, nationaux, pour les institutions de répression et de prévention, ni même pour les sociologues. A contrario, les violences urbaines liées aux «cités populaires» ou aux «quartiers sensibles», que l’on attribue à une jeunesse populaire des banlieues dites défavorisées, font l’objet d’un intérêt grandissant parmi les chercheurs, les institutions et les politiques (Marlière, 2009a).
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Leach, Michael, Matthew Clarke, Philippe Tanguy, and James Scambary. "Autour d’un Pacifique postcolonial, pluriel et plurilingue." Articles hors thème 32, no. 2 (January 15, 2014): 121–56. http://dx.doi.org/10.7202/1021357ar.

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La construction de l’État-nation reste un défi majeur pour la Mélanésie. Dès la décolonisation des années 1970 et 1980, les nouvelles nations mélanésiennes ont éprouvé beaucoup de difficulté à se créer une identité nationale solide et une communauté politique unie, tout en maintenant leurs langues vernaculaires et leurs cultures traditionnelles. Le Vanuatu pour sa part a eu pour tâche de se construire une identité nationale en dépit d’un double héritage colonial franco-anglais. Cet article présente un sondage que nous avons organisé dans plusieurs centres d’enseignement supérieur à Port-Vila en 2010, dont l’Université du Pacifique Sud et l’Agence universitaire pour la francophonie, sur les attitudes des étudiants de ces institutions à l’égard de l’identité nationale. Notre enquête révèle, entre autres, qu’il existe des points communs et des similitudes sur le développement du sentiment national entre les étudiants francophones et anglophones de l’enseignement supérieur au Vanuatu. La convergence porte notamment sur des points clés tels les indicateurs de la fierté nationale, le maintien des traditions et de la kastom (coutume), la conception de la citoyenneté et le respect des institutions et de l’État de droit. Nos données indiquent aussi que, malgré un relâchement des liens postcoloniaux associant les deux langues d’enseignement à des affiliations religieuses et politiques divergentes, la langue d’enseignement reste un vecteur important pour les étudiants quant à leur attitude envers l’identité nationale et ses éléments prioritaires. Nos conclusions offrent un nouvel éclairage sur la vision qui pourrait animer les élites politiques et professionnelles futures du Vanuatu dans leur dépassement des fractures régionales, ethniques, intergénérationnelles et linguistiques qui ont jadis touché le pays.
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Atman, Dkhssi. "La Politique Économique en Débat : Une Lecture Critique." European Scientific Journal, ESJ 20, no. 10 (April 30, 2024): 126. http://dx.doi.org/10.19044/esj.2024.v20n10p126.

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Cet article présente une analyse critique des politiques économiques depuis 1945, structurée autour de quatre périodes clés. De 1945 à 1980, le keynésianisme atteint son apogée dans les années 1940 et 1960, mais commence à s'essouffler dès le début des années 1970, ouvrant la voie à une contre-révolution libérale. De 1980 à 2008, une pensée post-consensus de Washington émerge, suscitant les critiques à l'encontre des thérapeutiques préconisées par les institutions de Bretton Woods et remettant en question leur hégémonie doctrinale. À partir de la crise de 2008, malgré le recours à des politiques de relance budgétaires temporaires, un nouveau consensus en faveur de la rigueur s'installe. Finalement, face à la crise pandémique mondiale du COVID 19, le keynésianisme renaît avec le retour des plans de relance, tandis que le remboursement de la dette liée à la COVID reste un défi pour la majorité des pays. Plus récemment, les politiques de normalisation monétaire prennent de l'ampleur. Pour clarifier les concepts dans la littérature et examiner la manière dont la recherche est menée sur le sujet, une ébauche d'un examen de la portée (scoping review) a été réalisée, susceptible de servir de précurseur à une revue systématique. This article presents a critical analysis of economic policies since 1945, structured around four key periods. From 1945 to 1980, Keynesianism reached its peak in the 1940s and 1960s but began to wane as early as the 1970s, paving the way for a neoliberal counter-revolution. From 1980 to 2008, a post-Washington Consensus thinking emerged, fueling criticisms against the therapies advocated by Bretton Woods institutions and questioning their doctrinal hegemony. From the 2008 crisis onwards, despite the temporary adoption of fiscal stimulus policies, a new consensus favoring austerity took hold. Finally, faced with the global COVID-19 pandemic crisis, Keynesianism resurged with the return of stimulus plans, while repayment of COVID-related debt remains a challenge for the majority of countries. More recently, there has been a growing focus on monetary normalization policies. To clarify the concepts in the literature and examine how research is conducted on the subject, a draft of a scoping review has been conducted, which may serve as a precursor to a a systematic review.
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Lafon, Benoit, and Hélène Romeyer. "Le cancer à la télévision." Articles 27, no. 2 (December 16, 2008): 73–104. http://dx.doi.org/10.7202/019457ar.

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Résumé Il s’agit ici de s’intéresser aux médias comme révélateurs des dynamiques sociales précédant et accompagnant la définition et la mise en oeuvre de politiques publiques. En effet, les médias de masse diffusent leurs programmes de manière continue (flux) et l’analyse de ces derniers sur le temps long permet de mieux appréhender l’émergence et les transformations dans l’espace public de questions débattues, puis mises en oeuvre sur le plan politique. La question de la lutte contre le cancer a été traitée de manière récurrente depuis le début des années 1970 dans différents types de programmes télévisuels : nous prendrons ici en considération les fictions et les magazines. Sur la base d’un corpus répertoriant magazines de télévision (1995-2005) et films de fiction (TV, feuilletons et séries, cinéma diffusés de 1975 à 2005), nous montrerons que la télévision s’avère être partie prenante de l’émergence de la question publique du cancer. Nous montrerons aussi que la télévision tisse des collaborations en ce domaine avec de nombreuses autres institutions (associations de lutte, professionnels de la santé, etc.), révélant par là même qu’elle se trouve à la confluence d’enjeux sociaux et politiques complexes. À ce titre, il n’est pas certain que la simplification et la personnalisation habituellement imputées aux médias soient avérées. Au contraire, les acteurs politiques et, notamment, le chef de l’État ont contribué à cette logique simplificatrice par le lancement d’un Plan Cancer présenté comme un grand chantier : si la télévision comme les autres médias a largement relayé dans ses programmes d’information le lancement de ce Plan Cancer, il apparaît que son rôle dans la construction de l’espace public est bien plus complexe qu’une analyse conjoncturelle centrée sur l’actualité ne le laisse entendre.
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McCormick, Peter. "New Questions about an Old Concept: The Supreme Court of Canada's Judicial Independence Decisions." Canadian Journal of Political Science 37, no. 4 (December 2004): 839–62. http://dx.doi.org/10.1017/s0008423904030951.

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Abstract.In the age of the Charter, courts are an important part of the policy process, and judicial independence is the concept that structures the interactions between courts and other institutions. Historically, judicial independence in Canada was modelled on (and little different from) that of England; but politically-led reforms in the 1970s, and a string of more than a dozen Supreme Court decisions centred on the 1997Remuneration Reference, are transforming the concept. At the same time, a parallel string of cases extends more limited but essentially similar guarantees to some other administrative bodies. Together, these developments represent an important and enduring change in the Canadian political landscape.Résumé.À l'ère de la Charte, les tribunaux sont un élément important de l'élaboration des politiques publiques, et l'indépendance judiciaire est le fondement des interactions entre les tribunaux et les autres institutions. Par le passé, l'indépendance judiciaire au Canada épousait le modèle britannique (et s'en éloignait assez peu); cependant, des réformes politiquement inspirées dans les années 1970 et une série de plus d'une douzaine de jugements de la Cour suprême centrés sur le renvoi de 1997 relatif à la rémunération sont en train de transformer ce concept. En même temps, une série de cas parallèles accorde des garanties plus limitées mais très similaires à d'autres corps administratifs. Ces changements se conjuguent pour modifier considérablement et de façon permanente le paysage politique canadien.
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Lamoureux, Eve. "Pratiques des artistes en arts visuels : un terrain fécond pour une réflexion sur les contours actuels de l'engagement." Canadian Journal of Political Science 42, no. 1 (March 2009): 45–63. http://dx.doi.org/10.1017/s000842390909009x.

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Résumé. À partir d'une recherche sur l'art engagé des artistes québécois en arts visuels, nous analysons ce que ce type particulier de contestation sociopolitique nous apprend sur les transformations qu'a subies l'engagement depuis la fin des années 1970. Nous explorons ainsi la représentation sociale de l'engagement dit passé ainsi que les caractéristiques actuelles des pratiques artisticopolitiques. Ce choix d'étudier l'engagement à partir d'une forme située hors du cadre strict de l'action usuelle, dans un espace ouvert (au sens où il ne correspond pas aux lieux, aux institutions et aux façons d'agir reconnus comme politiques), permet d'accéder à la diversité des configurations de l'engagement présent et aux déplacements et transgressions opérés quant à sa représentation plus classique.Abstract. Based on research on the politically committed art of Québécois visual artists, we analyze what this particular form of socio-political contestation teaches us about the changes which political involvement has seen since the end of the 1970s. We explore the social representation of involvement said to be that of the past, as well as the characteristics of present day artistic-political practices. The choice made to study involvement from a perspective outside of the framework of usual political action, in an open space (open in the sense of lacking correspondence with the spaces, institutions and ways of acting usually recognized as political), opens on the diversity of current forms of involvement and on the changes and transgressions which have occurred with regard to the more classical social representation of involvement.
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Lamoureux, Ève. "Évolution de l’art engagé au Québec. Structuration et spécificités." Globe 14, no. 1 (September 27, 2011): 77–97. http://dx.doi.org/10.7202/1005987ar.

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Dans cet article, Ève Lamoureux explore l’évolution de l’art engagé des artistes québécois de gauche des années 1970 à aujourd’hui. Elle décrit les pratiques, s’interroge sur leurs spécificités en comparaison avec celles du milieu international de l’art contemporain et réfléchit sur les conditions spécifiques influençant leur trajectoire. Elle montre ainsi que les caractéristiques générales de l’art engagé sont très similaires dans l’ensemble des pays occidentaux. On passe d’un art avant-gardiste militant à un art micropolitique misant sur l’investissement du spectateur dans le « faire sens » de l’oeuvre ou la participation. Cela dit, la conjoncture culturelle, sociale et politique particulière au Québec influence les pratiques, de même que la structuration du milieu des arts visuels et son évolution. Il en découle quelques spécificités : (1) une créativité foisonnante, (2) une expérimentation constante des artistes sur le plan des pratiques, mais aussi dans l’organisation de la production et de la diffusion, (3) une expertise théorique très riche, (4) une association beaucoup plus étroite des artistes engagés avec les thématiques portées aussi bien par les groupes communautaires, syndicaux et militants que par les partis politiques et, enfin, (5) une relation partenariale conflictuelle entre ces artistes et les institutions étatiques et artistiques qui, en définitive, a plutôt favorisé l’évolution de l’engagement dans et par l’art, malgré ses difficultés.
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Lardeau, Matthieu. "Un « gouvernement des journalistes par le Pouvoir politique » par défaut ?" Sur le journalisme, About journalism, Sobre jornalismo 2, no. 2 (December 15, 2013): 94–107. http://dx.doi.org/10.25200/slj.v2.n2.2013.95.

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Cet submission présente les interactions de deux mouvements concomitants apparusprincipalement dans les décennies 1950 à 1970 dans le champ de la presse française : d’un côté les initiatives – consécutives à la démarche pionnière, en 1951, de création de la première Société des journalistes (SDJ) au sein du Monde – menées par les journalistes de rédactions de quotidiens pour créer des SDJ dont la destination peut aller jusqu’à gouverner les journaux; de l’autre côté, les « réponses » apportées par les Pouvoirs politique et public pour contenir ces initiatives visant à étendre le pouvoir des journalistes dans la gestion et la gouvernance de leurs journaux. Cette étude exploratoire repose principalement sur l’analyse de deux types de littérature, souvent déconsidérés ou négligés par le champ académique, en dépit de leur grande richesse : (1) la littérature professionnelle, ayant pour principaux auteurs les journalistes et managers de presse (Périer Daville, Boegner, Pigasse, etc.), florissante depuis 1944 et singulièrement durant les décennies 1960 et 1970 ; (2) la littérature grise constituée notamment par des rapports publics rédigés par des institutions comme les services du Premier ministre (commissions Lindon de 1970 et Serisé de 1972), le Conseil économique et social, etc. Nos principaux résultats montrent que les propositions ou actions menées par les journalistes (1) restent le plus souvent inexploitées in concreto par les journalistes eux-mêmes; (2) entrent le plus souvent en opposition avec les politiques de nouveaux actionnaires ou directions de journaux et avec les projets des autorités politiques et publiques qui cherchent à encadrer l’autonomie de la profession journalistique pour mieux gouverner celle-ci ; (3) combien in fine les représentants des différents acteurs impliqués s’accordent pour contenir l’émergence d’un « gouvernement des journalistes » par les journalistes au profit d’un gouvernement indirect – ou par défaut – des journalistes par les autorités publiques. This paper aims to discuss the interactions between two concomitant phenomenathat tagged the 1950s to 1970s French press: on the one hand, the movement initiated in 1951 at Le Monde and pursued by dailies’ journalists to develop and implement journalists’ associations (“Société de journalistes” or “Société de rédacteurs”) inside the newsroom to run – on their own or in association with newspaper management – newsrooms and newspapers (editorial content, and business policy to some extent); and, on the other hand, the responses to this growing movement by public authorities (both political and administrative) who aimee to contain the demands for more independence and power by journalists. This exploratory study is based on the analysis of two kinds of literature too often neglected by academics despite their great richness: (1) professional literature mainly authored by journalists involved in management duties, and managers of printing presses (Perier Daville, Boegner, Pigasse, etc.), a flourishing literature since 1944, and more particularly during the 1960s and 1970s; (2) the grey literature that encompasses public reports like those produced by the Prime Minister’s Office (Lindon (1970) and Serisé (1972) commissions), and the Conseil economique et social, etc. Our main results show that propositions and actions advanced by journalists and members of the news media: (1) remain largely unexploited by the profession and political authorities despite their innovation and effectiveness; (2) are regularly contained or blocked by political and public authorities who intend to maintain their ruling power over the press and journalism; (3) and that journalism-representative organizations and dominant journalists invariably uphold containment positions to limit journalists’ empowerment in management and newspaper governance. Consequently, most journalistic representatives agree - politics govern their profession. Este artigo pretende apresentar as interações entre dois movimentos paralelos, que surgiram essencialmente durante os anos de 1950 a 1970, no universo da imprensa francesa. O primeiro foi iniciado pelos jornalistas da imprensa periódica, no sentido de criar associações de profissionais – designadas “Sociétés de Journalistes” (SDJ’s) – no seio das redações, no intuito de governar – sozinhos ou em parceria com a administração do veículo – redações e jornais (o conteúdo editorial e, até certo ponto, a planificação orçamental). A iniciativa pioneira é do diário Le Monde, em 1951. O segundo movimento diz respeito às reações por parte dos poderes políticos com o objetivo de conter essas iniciativas, que visam uma ampliação do poder dos jornalistas na gestão e na governança das suas próprias publicações. O presente estudo baseia-se principalmente na análise de dois tipos de literatura, frequentemente negligenciados pelo mundo acadêmico, apesar de sua grande riqueza: (1) a literatura profissional, que tem como principais autores jornalistas e gestores de imprensa (Périer Daville, Boegner, Pigasse, entre outros), muito popular desde 1944 e especialmente durante as décadas de 1960 e 1970; (2) a literatura cinzenta, constituída principalmente por relatórios públicos redigidos por instituições, como os serviços do primeiro-ministro (comissões Lindon 1970 e Serisé 1972) e do Conselho Econômico e Social. Os nossos principais resultados mostram: (1) que as propostas feitas pelos jornalistas e pelos profissionais da comunicação em geral, apesar da sua inovação e eficácia, permanecem inexploradas pelas autoridades profissionais e políticas; (2) que as propostas dos jornalistas feitas no sentido de aumentar a sua autonomia e poder nas redações e nos jornais são sistematicamente bloqueadas pelas autoridades públicas e políticas, as quais tentam conservar o seu poder regulador sobre a imprensa e o jornalismo; (3) em última análise, que os representantes dos diferentes atores envolvidos interferem para conter a emergência de um “governo dos jornalistas” pelos jornalistas em favor de um governo indireto– ou padrão - pelas autoridades públicas.
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Chaves Teixeira, Ana Claudia. "TRAJETÓRIAS DO IDEÁRIO PARTICIPATIVO NO BRASIL." Caderno CRH 33 (July 27, 2020): 020002. http://dx.doi.org/10.9771/ccrh.v33i0.33834.

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<p class="Corpo">Este artigo tem por objetivo apresentar as mudanças na trajetória dos ideários participativos. Baseado em pesquisa documental e revisão bibliográfica, o texto aponta como, no Brasil, algumas visões sobre a democracia participativa ganharam e outras perderam força. Se nos anos 1970 havia uma forte presença de concepções que afirmavam a importância de utilizar o espaço participativo como forma de organização da sociedade (nos sindicatos, nos movimentos populares e no próprio partido) e de educação para cidadania, o que denominamos aqui como “participação como emancipação”, ao longo do tempo esta visão perdeu força. E passaram a entrar nos argumentos políticos visões da participação como forma de apoiar os governos, de um lado, e de fiscalizar o Estado, de outro, que denominamos aqui como “participação como deliberação”. Já durante o governo petista foi se consolidando uma visão de participação “como escuta”.</p><p class="Corpo"> </p><p class="Corpo">TRAJECTORY OF PARTICIPATORY IDEALS IN BRAZIL</p><p class="Corpo">This article aims to present the changes in the trajectory of participatory ideals. Based on documentary research and bibliographical review, the text points out how, in Brazil, some views on participatory democracy “won” and others “lost force”. If in the 1970s there was a strong presence of conceptions that affirmed the importance of using participatory space as a form of organization of society (in unions, popular movements and in the party itself) and education for citizenship, what we call here as “participation as emancipation”, over time this vision has lost strength. Political views began to enter into the views of participation as a way to support governments on the one hand and to oversee the state, on the other, which we refer to here as “participation as deliberation”. Already during the PT government, a vision of participation “as a listener” was consolidated.</p><p class="Corpo">Keywords: Participatory democracy, Participation, Participatory institutions.</p><p class="Corpo"> </p><p class="Corpo">TRAJECTOIRE DES PARTICIPATIVE IDÉES AU BRÉSIL</p><p class="Corpo">Cet article vise à présenter les changements dans la trajectoire des participative idées. Basé sur des recherches documentaires et sur une revue de la littérature, le texte montre comment, au Brésil, certains points de vue sur la démocratie participative ont gagné et d’autres ont perdu de leur force dans le temps. Si, dans les années 1970, il existait une forte présence de conceptions de la « participation comme émancipation », affirmant l’importance d’utiliser l’espace participatif comme forme d’organisation de la société (dans les syndicats, les mouvements populaires et le parti) et l’éducation à la citoyenneté, cette vision a perdu de sa vigueur avec le temps. Des visions politiques de la participation ont émergé dans le discours comme moyen de soutenir les gouvernements, d’une part, et de surveiller l’État, d’autre part, ce que nous appelons ici “participation en tant que délibération”. Pendant le gouvernement petista, une vision de la participation “en tant qu’écoute” s’est par ailleurs dévelopée et consolidée.</p><p class="Corpo">Mots clés: Démocratie participative, Participation, Institutions participatives.</p>
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Dussault, Gilles. "La réorganisation des services de santé et de bien-être au Québec: à qui la réforme a-t-elle profité?" Notes Critiques 24, no. 2 (April 12, 2005): 235–61. http://dx.doi.org/10.7202/056035ar.

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En 1966, la Commission d'enquête sur la santé et le bien-être social commençait ses travaux. Ses recommandations allaient conduire à la création d'un régime universel d'assurance-maladie en 1970 et, à partir de l'année suivante, à une réorganisation en profondeur du système de distribution de soins et de services sociaux. Bien que le recul ne soit pas encore suffisant pour évaluer tous les effets de ces mesures, il est tout à fait approprié d'en commencer l'analyse. C'est à un tel exercice que s'est livré Frédéric LESEMANN dans Du pain et des services (1981). Le titre est volontairement provocateur et est à l'image de la thèse que l'auteur développe. L'ouvrage veut soulever un débat sur le sens et les enjeux de la réforme sanitaire au Québec. On s'explique mal d'ailleurs qu'on ait si peu écrit sur la question, compte tenu de l'importance des ressources humaines et financières investies dans cette réforme, aussi de ses dimensions politiques et de ses conséquences sur la vie quotidienne des citoyens. Il faut reconnaître que la sociologie de la santé et des institutions et occupations qui lui sont reliées est peu développée chez nous comparativement à la Grande-Bretagne et aux États-Unis, par exemple, où l'intérêt pour les aspects socio-économiques de la santé est considérable. Je doute toutefois que le livre de Lesemann — malgré l'intérêt et le caractère percutant de l'analyse qu'il propose — donne lieu à un débat qui déborde les cercles spécialisés. En effet, son analyse en termes de rapports de classe éloignera plus d'un lecteur par son langage et son approche plutôt hermétique. Le livre vaut quand même qu'on s'y attarde et qu'on examine sérieusement la thèse que son auteur défend. Essentiellement, Lesemann avance qu'au-delà des intentions généreuses des réformateurs, ce sont des enjeux de classe qui ont orienté les choix et décisions qui ont été à la base de la réorganisation des services socio-sanitaires au Québec. Pour lui, « du pain et des services », c'est bien le panem et circenses du pouvoir impérial romain déclinant; c'est l'État qui cherche à endormir la population sous le couvert de « répondre aux besoins de la clientèle », comme le disent les technocrates. Lesemann corrige et précise qu'il s'agit plutôt de «gérer les rapports sociaux » (p. 5)
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Dkhissi, Atman. "La Politique Économique en Débat : Une Approche Critique." European Scientific Journal ESJ 27 (March 7, 2024). http://dx.doi.org/10.19044/esipreprint.3.2024.p243.

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Cet Article est une analyse critique des politiques économiques depuis 1945. Il s’articule autour de quatre moments clefs : De 1945 à 1980 : le keynésianisme, connaissant son apogée aux années 1940 et 1960, commence à s’essouffler depuis le début des années 1970, laissant place à une contre-révolution libérale. De 1980 à 2008 : Une pensée post-consensus de Washington nourrit les critiques contre les thérapeutiques proposées par les institutions de Bretton Woods et remet en question l'hégémonie doctrinale de ces dernières. Le monde après la crise financière de 2008 : malgré des politiques de relance budgétaires temporaires, un nouveau consensus pour la rigueur budgétaire s’installe. L’économie mondiale depuis la COVID : le keynésianisme renaît de ses cendres avec le retour des plans de relance, alors que le monde peine à rembourser sa dette COVID. Récemment, les politiques de normalisation monétaire s’imposent. This article is a critical analysis of economic policies since 1945. It revolves around four key moments: From 1945 to 1980: Keynesianism, reaching its peak in the 1940s and 1960s, started to decline in the early 1970s, giving way to a liberal counterrevolution. From 1980 to 2008: A post-Washington Consensus thinking fueled critiques against the proposed therapies by Bretton Woods institutions and questioned their doctrinal hegemony. The world after the 2008 financial crisis: Despite temporary budgetary stimulus policies, a new consensus for fiscal austerity emerged. The global economy since COVID: Keynesianism rises from the ashes with the return of stimulus plans, while the world struggles to repay its COVID debt. Recently, policies for monetary normalization have come to the fore.
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Paul, Jean-Jacques. "ACOMPANHAMENTO DE EGRESSOS DO ENSINO SUPERIOR: experiência brasileira e internacional." Caderno CRH 28, no. 74 (November 24, 2015). http://dx.doi.org/10.9771/ccrh.v28i74.19899.

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Este artigo traça um panorama das diversas experiências de acompanhamento de egressos do ensino superior, destacando as metodologias utilizadas nos diferentes países ou em projetos internacionais. Os dispositivos de acompanhamento resultam de políticas governamentais ou de instituições autônomas e visam a dar maior visibilidade ao sistema de ensino superior cada vez mais complexo. Fornecendo subsídios essenciais para a avaliação dos resultados dos sistemas educativos, os dispositivos de acompanhamento atingiram os melhores indicadores de funcionamento no caso italiano, Alma Laurea. No Brasil, há experiências díspares, começando nos anos 1970, passando pelos estudos na USP e UFC no início dos 1990, até o estágio atual, com a proliferação de portais de egressos. Constituem exigências metodológicas do acompanhamento, conforme indica a experiência: caráter institucional sistemático e participativo; periodicidade regular e atualização permanente; utilização de tecnologias da informação para coleta de dados; definição clara e adequada da população a ser atingida, segundo os tipos de diplomas; produção de escalas adequadas para a avaliação dos destinos ocupacionais e sua relação com a formação; e disponibilização dos bancos de dados para a comunidade acadêmica. Palavras-chave: Ensino Superior. Dispositivos de acompanhamento. Avaliação. Egressos. Destinos ocupacionais.HIGHER EDUCATION GRADUATES MONITORING: Brazilian and international experiences Jean-Jacques Paul This article provides an overview of the various experiences of monitoring of higher education graduates, highlighting the methodologies used in different countries or international projects. Monitoring devices are the result of government policies or autonomous institutions and are intended to give greater visibility to the higher education system increasingly complex. Providing essential data for the evaluation of the results of educational systems, monitoring systems achieved the best health indicators in the Italian case, AlmaLaurea. In Brazil there are disparate experiences, starting in the 1970s, through the studies at USP and UFC in the early 1990s to the current stage with the proliferation of graduates’ portals. The methodological requirements of monitoring, as shown by experience: systematic and participatory nature, institutionally; regular intervals and continuous updating; use of information technologies for data collection; clear and appropriate definition of the target population according to the types of diplomas; production scales adequate for evaluation of occupational destinations and its relation to training; availability of databases for the academic community. Key words: Higher education. Monitoring systems. evaluation. Graduates. Occupational destinations. SUIVI DES DIPLOMES DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR: expériences brésilienne et internationale Jean-Jacques Paul Cet article donne un aperçu des diverses expériences de suivi des diplômés de l’enseignement supérieur, en soulignant les méthodologies utilisées dans différents pays où des projets internationaux. Les dispositifs d’enquête sont le résultat de politiques gouvernementales ou d’ institutions autonomes et sont destinés à donner une plus grande visibilité à un système d’enseignement supérieur de plus en plus complexe. Fournissant des données essentielles pour l’évaluation des résultats des systèmes éducatifs, les dispositifs d’enquête ont obtenu les meilleurs indicateurs dans le cas italien, AlmaLaurea. Au Brésil, il ya des expériences disparates, qui ont commencé dans les années 1970, à travers des études à l’USP et l’UFC dans le début des années 1990 jusqu’au stade actuel de la prolifération des portails pour les diplômés. Les exigences méthodologiques de suivi selon les observations de l’expérience: caractère institutionnel, systématique et participatif; intervalles réguliers et mise à jour continue; utilisation des technologies de l’information pour la collecte de données; définition claire et appropriée de la population cible selon les types de diplômes; échelles adéquates pour l’évaluation des situations professionnelles et leurs liens avec la formation; disponibilité des bases de données pour la communauté universitaire. Mots Clés: Enseignement supérieur. Systèmes de suivi. Évaluation. Diplômés. Destinations professionnelles. Publicação Online do Caderno CRH no Scielo: http://www.scielo.br/ccrh Publicação Online do Caderno CRH: http://www.cadernocrh.ufba.br
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Piccoli, Emmanuelle. "Justice paysanne." Anthropen, 2016. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.016.

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En anthropologie juridique, le terme « justice paysanne » renvoie à l’une des expressions du pluralisme juridique, entendu comme l’existence d’une pluralité d’ordres normatifs, de conceptions du/des « Droit/s » et de pratiques de résolution des problèmes au sein d’un collectif, dans ce cas-ci un État (Eberhard, Motard, Piccoli 2016 ; Garcia, Truffin 2009). Plus spécifiquement, la justice paysanne constitue une branche de la justice indigène, qui, à côté de la justice ordinaire, est légalement reconnue, dans la plupart des pays d’Amérique latine. Cette reconnaissance dérive de l’application de la Convention n°169 de l’Organisation internationale du travail (OIT) sur les peuples indigènes et tribaux (art.9, I). Dans l’expression « justice paysanne », le terme « paysan » réfère à une identification qui n’est pas strictement socioprofessionnelle, mais renvoie également à une origine culturelle précolombienne. L’utilisation de ce terme dans un sens qui recoupe partiellement celui d’indigène est spécifique à la Bolivie et au Pérou. En Équateur et en Colombie, par exemple, il est question de justice « indigène », mais sans renvoi à la notion de paysannerie (Huber 2009). La justice paysanne réfère donc à une forme de justice « indigène » uniquement dans les pays où le terme « paysan », a, pour des raisons historiques, recouvert une partie de la signification des mots « indien », « autochtone » ou « indigène ». Les problématiques soulevées par la justice paysanne sont donc largement semblables à celles des autres formes justices indigènes. Au Pérou, l’identification des populations andines comme populations paysannes est imposée par la Réforme agraire dans les années 1960 pour remplacer le terme injurieux d’« indio ». La justice paysanne se rapporte alors à la justice administrée par les Rondes paysannes et les Communautés paysannes et reconnue par la Constitution politique de 1993 (art. 149). Les Rondes paysannes sont des institutions endogènes récentes, apparues dans les années 1970 dans les campagnes andines, pour faire face aux vols de bétails par des pratiques de vigilance et de justice (Piccoli 2011 ; Starn 1999). Les Communautés paysannes (Andes) et natives (Amazonie) constituent, pour leur part, des régimes fonciers semi-collectifs. Au sein des Rondes et des Communautés paysannes, l’administration de la justice se base sur des décisions prises en assemblée et mêlant des pratiques issues des traditions andines et de l’État. En Bolivie, la justice paysanne est incluse dans les pratiques « indigènes originaires paysannes » reconnues par la Constitution politique de l’État plurinational de 2009 comme de rang égal aux pratiques de justice ordinaire, même si la loi (Ley de deslinde jurisdiccional) pose des limites assez strictes à leur mise en œuvre (Oliden Zuñiga 2013). L’expression « indigène originaire paysanne » tente de tenir compte de la pluralité des appartenances indigènes de Bolivie. La Constitution spécifie qu’« Est une nation ou un peuple indigène originaire paysan toute collectivité humaine qui partage une identité culturelle, une langue, une tradition historique, des institutions, un territoire et une cosmovision, dont l’existence est antérieure à l’invasion coloniale espagnole » (art. 30, I). Tout comme aux autres populations, l’État leur reconnaît le droit « à l’exercice de leurs systèmes politiques, juridiques et économiques en accord avec leur cosmovision » (art 30, II, 14). En dépit de la reconnaissance légale, en Bolivie, comme au Pérou, la question de la limite entre une pratique de justice et l’exercice de lynchages est sujet à de nombreux débats tant en raison d’amalgames langagiers que de stratégies juridiques (Robin Azevedo 2012). Ce qui est en jeu est à la fois la question de la pluralité de l’État mais aussi des limites de celles-ci : populations métisses, urbanisées etc. questionnent les limites posées par les lois de reconnaissance. L’anthropologie juridique – et l’étude de la justice paysanne – se confronte d’emblée à la question normative, tant son objet est lié à la question de l’État, de l’utilisation de forces coercitives et de constructions de législations. L’anthropologie permet, par le décentrement et sa non normativité, d’approcher des réalités complexes, dans un angle différent de celui du juriste. Elle donne donc une lecture distancée des pratiques de justice paysanne, en ne se souciant pas prioritairement de leur légalité, mais en les décrivant pour ce qu’elles sont et en les reliant à l’ensemble des pratiques sociales d’un groupe et des représentations culturelles, conceptuelles, symboliques dans lesquelles elle sont ancrées. De là émerge un apport professionnel spécifique de l’anthropologie juridique, dans les pays d’Amérique du Sud, à savoir l’utilisation de l’expertise anthropologique pour trancher les débats quant à la valeur « culturelles » des pratiques paysannes mises en question lors de jugements. Dans ces cas, la question de l’authenticité indigène des pratiques paysannes est souvent cruciale, mettant en lumière les liens entre ces deux concepts et replaçant inévitablement l’anthropologie au cœur de processus normatifs et politiques (Sanchez Botero 2010)
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Gagnon, Éric. "Vieillissement." Anthropen, 2017. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.062.

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L’anthropologie de la vieillesse a contribué à remettre en question des idées reçues et plusieurs préjugés tenaces, dont celle voulant que les sociétés modernes déconsidèrent la vieillesse et abandonnent leurs vieux, alors que les sociétés dites traditionnelles valorisent leur ainés et leur font une place honorable. Elle a écarté certaines images d’Épinal, comme l’Ancêtre trônant au milieu de sa famille, ou des clichés, comme le vieillard abandonné à l’hospice. Elle a appelé à se méfier de la mémoire toujours sélective et parfois enjoliveuse («Le bon vieux temps»). Elle a rappelé qu’il faut distinguer les représentations des comportements, que le prestige accordé à la vieillesse ne se traduit pas toujours en un véritable respect ou une réelle affection, et cache parfois des conditions de vie matérielle difficiles. Elle a surtout montré que le vieillissement n’est pas un phénomène purement biologique, partout identique, et qu’il est extrêmement variable d’une société, d’un groupe, d’une classe ou d’un genre à l’autre. Cette fonction critique, l’anthropologie a pu l’exercer au moyen de ce qui demeure son principal outil théorique et méthodologique : la comparaison. En comparant deux communautés au sein d’une même société, un même groupe avant et après des bouleversements historiques, deux culture très éloignées l’une de l’autre, la condition des ainés dans un pays avec celle des ainés originaires du même pays mais ayant migré dans un autre pays, ou encore différentes communautés au sein d’une même diaspora, elle a montré la diversité des conditions et des expériences, le poids des facteurs culturels, politiques ou économiques sur le vieillissement (Solokovski 1990). L’étude de cette diversité a non seulement permis de mieux comprendre le vieillissement, mais également de nourrir la réflexion touchant quatre grandes questions de l’anthropologie, que sont l’articulation du biologique et du social, les échanges familiaux, ce qui fait une communauté et le rôle des sciences et des techniques. Sur la première question, l’anthropologie du vieillissement a montré comment les transformations du corps sont étroitement déterminées par les conditions de vie, comment les changements biologiques, leur compréhension et leur perception, la manière dont les individus en font l’expérience et les réponses que les collectivité y apportent, sont façonnés par la culture, les normes sociales, l’organisation économique et les politiques publiques. L’étude de Margaret Lock (1993) sur la ménopause au Japon et en Amérique du Nord est à cet égard exemplaire. La sénescence, c’est-à-dire la dégradation des capacités générales de l’organisme biologique avec l’avancée en âge, connaît d’importantes variations. Non seulement la définition et les critères du vieillissement varient selon les milieux, les époques, les secteurs d’activité ou le genre (nombre d’années vécues, altérations physiques, incapacités, apparence physique, naissance de petits-enfants…), mais également ce qui est tenu pour un vieillissement normal ou souhaitable, le statut des personnes âgées, leurs obligations et leurs rôles. Si les conditions sociales d’existence ralentissent ou accélèrent le vieillissement biologique, elles donnent aussi à ce dernier une importance et une signification, qui font varier jusqu’aux formes d’expression de la douleur, de son histoire et de son identité (Keith 1985; Fry 2010). L’étude du vieillissement met en lumière la «biologie locale», le façonnement du corps propre à une culture ou un groupe. Sur la seconde question, l’étude anthropologique de la vieillesse s’est beaucoup intéressée aux échanges intergénérationnels, ainsi que le statut et la protection dont les personnes âgées bénéficient. Goody (1976) s’est efforcé de montrer comment les systèmes de parenté et de résidence, les modes transmission et le type d’économie favorisent ou non la dépendance des ainés envers les plus jeunes pour leur subsistance, le contrôle sur les biens, la possibilité de continuer d’habiter la demeure familiale et l’autorité qu’ils continuent d’exercer. La perspective permet non seulement la comparaison entre des sociétés d’aires culturelles très éloignées, mais l’articulation des questions anthropologiques touchant le vieillissement à celles liées à la famille et à l’économie, ainsi qu’à des enjeux politiques contemporains touchant les soins et la «prise en charge» des personnes vieillissantes (Buch 2015). Dans une perspective plus historique, on s’est intéressé aux impacts de l’allongement de la durée de vie, des transformation de l’économie (salariat, travail des femmes), des mutations de la famille, de l’essor des politiques de protection sociale (retraite, pension, allocation) et des migrations, sur les solidarités familiales, la sécurité et l’autonomie des ainés (Fry 2010). Les recherches sur les grands-parents et les transformations de leur rôle et statut (Attias-Donfut et Segalen 2007) ont alimenté l’étude des échanges et de la circulation des biens et des services au sein des familles, mais également de la transmission de la mémoire et du patrimoine familial, matériel et symbolique. Sur la troisième question, les anthropologues se sont intéressés à diverses communautés résidentielles d’ainés, que ce soit les grandes habitations et les foyers, les établissement de soins de longue durée (Hendersen et Vesperi 1995), ou encore les quartiers et villages sécurisés (gated communities), qui regroupent exclusivement ou en forte majorité des ainés. Ils se sont interrogés sur l’homogénéité de ces populations, le fonctionnement et les rites de passage propres à ces regroupements, les hiérarchies, les clivages et l’exclusion par delà le discours égalitariste, les relations avec le monde «extérieur» (les familles des résidents et la société dans son ensemble), en somme: la continuité et la discontinuité de ces communautés. Ces travaux ont nourri la réflexion sur ce qui fait une communauté en général (territoire, sentiment d’appartenance et organisation sociale), et sur la formation de communautés spécifiques de personnes âgées et le contexte dans lequel elles émergent (Keith 1985). Enfin, sur la question la place des savoirs scientifiques et techniques dans les sociétés contemporaines, les anthropologues ont porté une grande attention aux phénomènes de médicalisation et de professionnalisation du vieillissement. Celui-ci est en effet l’objet de savoirs et d’expertises qui en changent la signification et la réalité. Les transitions et transformations liées à l’âge sont devenues des problèmes, qu’il appartient à la médecine et à d’autres disciplines (la gérontologie au premier chef) de guérir, de soigner ou de «gérer» (Corin 1982). Ces interventions visent la préventions des maladies et des incapacités (gestion des risques), l’évaluation des «déficits» (physiques ou cognitifs) au moyen d’instruments diagnostics et de protocoles standardisés, pour déterminer les services ou l’aide dont la personne âgée a besoin, l’aménagement des espaces, la distribution des services spécialisés, les critères d’admission en institutions, etc. (Kaufmann 1994; Lock 1993). Ces interventions et les politiques qui les fondent, changent non seulement la façon dont le vieillissement est conçu et perçu dans une société, mais la manière dont les personnes le vivent (identité, image de soi, conduites, attentes). La vieillesse est redéfinie autour des catégories d’autonomie, de fragilité, d’activité et de dépendance – en Occident du moins – qui changent le statut de la personne âgée, sa place, ses relations aux autres, les critères culturels du vieillissement «normal» ou «réussi». Les personnes âgées sont largement considérées comme des patients et des usagers de services, mais aussi comme un marché pour les biotechnologies qui promettent un ralentissement du vieillissement. L’étude des savoirs et pratiques touchant plus spécifiquement les démences (ex : Alzheimer), du point de vue des savoirs et des pratiques professionnelles (Leibing et Cohen 2006) ou sous un angle plus expérientiel (Taylor 2008), est révélatrice de la manière dont une société conçoit la «personne», ce qui fait son «humanité» ou son identité, et comment, selon le contexte culturel et institutionnel, cette personne et cette humanité se défont ou se maintiennent. Ces travaux rejoignent une riche tradition de recherche sur la construction sociale de la «personne» et du «soi», particulièrement de la personne âgée (Lamb 1997 pour un exemple). Ces quatre grandes questions sont liées entre elles. La médicalisation et la professionnalisation renvoient à l’articulation du biologique et du social, ainsi qu’au soutien et à la prise en charge des personnes âgées; la question des communautés est indissociable des solidarités familiales. Le vieillissement est un phénomène aux multiples facettes, touchant toutes les dimensions de l’existence. Il n’est d’ailleurs compréhensible que mis en relation avec à un ensemble de réalités qui le débordent, et auxquelles, en retour, il apporte un éclairage : la famille, l’économie, la démographie, les soins de santé, les politiques, l’imaginaire social et les valeurs, la personne comme construit culturel. Si, comme le soutient Simone de Beauvoir (1970), on se découvre vieux dans le regard des autres, il reste à comprendre ce regard : les représentations, les normes, les savoirs et les pratiques qui le cadrent et l’orientent, ceux qui posent ce regard et les contextes dans lesquels il est posé, ainsi que les comportements et les expériences que ce regard induit.
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Gagnon, Éric. "Âgisme." Anthropen, 2019. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.089.

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En une formule d’une belle densité, Simone de Beauvoir a résumé cette attitude négative à l’égard du vieillissement qu’est l’âgisme : « Si les vieillards manifestent les mêmes désirs, les mêmes sentiments, les mêmes revendications que les jeunes, ils scandalisent; chez eux, l’amour, la jalousie semblent odieux, la sexualité répugnante, la violence dérisoire. Ils doivent donner l’exemple de toutes les vertus. Avant tout on réclame d’eux la sérénité » (1970, p. 9-10). L’âgisme repose sur une vision stéréotypée et dépréciative des personnes âgées, perçues comme déclinantes et dépendantes, malades et peu attirantes, conservatrices et incapables de s’adapter aux changements (sociaux ou technologiques). Inutiles, ces personnes représentent un fardeau pour les plus jeunes; déclinantes, elles n’ont plus aucune passion ou projet; dépassées et incompétentes, elles doivent se tenir en retrait. Cette vision se traduit par des comportements condescendants ou d’évitement, de la discrimination et de l’exclusion de certains espaces ou sphères d’activités, comme le travail, les discussions politiques ou la sexualité. Elle a des effets délétères sur les personnes âgées (image de soi négative, retrait et isolement), ainsi que des coûts économiques et sociaux (Puijalon et Trincaz, 2000; Nelson, 2002; Billette, Marier et Séguin, 2018). L’âgisme repose sur une homogénéisation (les personnes âgées sont toutes semblables), une dépréciation (le vieillissement est toujours négatif, il est décrépitude et dépendance) et une essentialisation (cette décrépitude et cette dépendance sont naturelles et inévitables). On ne peut expliquer l’âgisme uniquement par la valorisation de la jeunesse, de la nouveauté et de l’indépendance, même si ces valeurs jouent un rôle, non plus que par l’ignorance ou l’anxiété que provoquent le déclin, la confusion et la mort, quoique cela fasse aussi partie de l’expérience du vieillissement (Ballanger, 2006). L’âgisme – du moins les formes les plus étudiées et pour lesquelles le terme a été forgé – émerge en Occident dans un contexte social et politique particulier. Quatre grands phénomènes doivent être pris en considération. Le premier est démographique. Le vieillissement de la population dans les sociétés occidentales et industrialisées a fait des personnes âgées un groupe toujours plus important de consommateurs, d’électeurs et de bénéficiaires de services. Très tôt, cette importance numérique a soulevé un ensemble d’inquiétudes et de controverses touchant la croissance des coûts de santé, le financement des caisses de retraite et l’équité fiscale entre les générations, le soutien des personnes dépendantes. Ces débats contribuent à faire de la vieillesse un problème social, ainsi qu’une menace et un poids pour les plus jeunes générations en l’associant au déclin, à la dépendance et à des coûts (Katz, 1996). Le second phénomène est l’invention de la retraite dans les sociétés salariales. En fixant une limite d'âge pour le travail (65 ans, par exemple), on a créé une nouvelle catégorie sociale, les retraités, et déterminé à quel âge on devient vieux. Le vieillissement s’est trouvé du même coup associé à l’inactivité et à la non-productivité, au retrait du travail et de l’espace public. Le troisième phénomène est la production de savoirs sur le vieillissement. Après la Seconde Guerre mondiale, «une constellation d’experts se déploie avec force et autorité autour des personnes âgées», comme le dit si bien Aline Charles (2004 : 267) : médecins, travailleurs sociaux, ergothérapeutes. Deux nouveaux champs d’expertise se développent, la gériatrie et la gérontologie, qui vont faire du vieillissement un domaine spécifique de savoirs et d’interventions. Ces expertises participent étroitement à la manière dont le vieillissement est pensé, les enjeux et les problèmes formulés (Katz, 1996). Elles contribuent à renforcer l’association faite entre le déclin, la dépendance et l’avancée en âge. Elles le font par le biais des politiques, des programmes et d'interventions visant à évaluer la condition des personnes, à mesurer leur autonomie, leur vulnérabilité et les risques auxquels elles sont exposées (Kaufman, 1994), et par une médicalisation du vieillissement, qui en fait un problème de santé appelant des mesures préventives et curatives. Enfin, le quatrième phénomène est politique. La reconnaissance et la dénonciation de l’âgisme apparaissent dans la foulée du mouvement des droits civiques et des luttes contre les discriminations raciales aux États-Unis (Butler, 1969). Elles s’inscrivent dans le mouvement de défense des droits de la personne. Plus largement, elles prennent naissance dans un contexte où l'égalité des droits devient centrale dans la représentation des rapports sociaux : l'âgisme contrevient à un idéal d'accès aux biens et aux services, il engendre des inégalités dans la participation à la parole et aux décisions ainsi que l'exclusion. (Dumont, 1994). Reprise par différents groupes d’intérêts, ainsi que par des institutions nationales et internationales, la critique et la dénonciation de l'âgisme conduisent à l’énonciation de droits pour les personnes âgées et à la mise sur pied de mécanismes pour garantir le respect de ces droits, à des campagnes d’éducation et de sensibilisation, à l’adoption de plans d’action, de lois et de règlements pour prévenir les discriminations. Elles rendent le phénomène visible, en font un problème social, lui attribuent des causes et des effets, proposent des mesures correctives ou des visions alternatives du vieillissement. Les représentations et les attitudes négatives à l’égard du vieillissement ne sont pas propres à l’Occident, tant s’en faut. Mais l’âgisme ne doit pas non plus être confondu avec toute forme de classification, de segmentation ou de division selon l’âge. Il émerge dans des sociétés individualistes, qui tendent à disqualifier ceux qui répondent moins bien aux valeurs d’indépendance, de productivité et d’épanouissement personnel. Des sociétés où il n’y pas à proprement parler de classes ou de groupes d’âge, avec leurs rites, leurs obligations et leurs occupations spécifiques (Peatrik, 2003), où les catégories d’âge sont relativement ouvertes et ne comportent pas de frontières nettes et de statuts précis, hormis la retraite pour la catégorie des «aînés», favorisent un redéfinition du vieillissement en regard des normes du travail et de la consommation; des sociétés où les rapports et les obligations entre les générations ne sont pas clairement définis, et donnent lieu à des débats politiques et scientifiques. Les anthropologues peuvent s'engager dans ces débats en poursuivant la critique de l’âgisme. Cette critique consiste à relever et à déconstruire les discours et les pratiques qui reposent sur une vision stéréotypée et péjorative du vieillissement et des personnes âgées, mais également à montrer comment les politiques, le marché de l’emploi et l’organisation du travail, la publicité, les savoirs professionnels et scientifiques, la médicalisation et les transformations du corps, comme la chirurgie plastique ou les usages des médicaments, reposent sur de telles visions. Elle porte égalerment sur les pratiques discriminatoires, en examinant leurs répercussions sur la vie et le destin des individus, comme la réduction des possibilités d’emploi ou la perte de dignité, ou encore sur la manière dont l’âgisme se conjugue à des stéréotypes sexistes et racistes, pour déprécier et marginaliser davantage des catégories spécifiques de personnes âgées. Elle permet de mieux comprendre quels intérêts matériels et symboliques servent ces représentations et ces pratiques, et dans quel contexte l'âgisme apparait. Mais la critique peut être élargie à l’ensemble des discours du vieillissement. Très vite, des représentations concurrentes de la vieillesse ont émergé dans les pays occidentaux. La critique de l’âgisme a conduit à l’apparition de nouveaux modèles, comme la vieillesse «verte», le vieillissement «actif» ou le vieillissement «réussi» (successful aging), donnant une image positive de la vieillesse et proposant aux personnes âgées de nouveaux idéaux (demeurer indépendant et actif), de nouvelles aspirations (authenticité, expression de soi et développement personnel) et de nouveaux modes de vie (actifs et socialement utiles). Ces nouveaux modèles font la promotion de conduites qui favorisent la santé et retardent le déclin, comme la participation sociale ou les activités intellectuelles et sportives (Biggs, 2001; Charles, 2004; Raymond et Grenier, 2013; Lamb, 2017). Ces nouveaux modèles ne sont toutefois pas exempt de clichés et de stéréotypes, ils sont tout autant normatifs et réducteurs que les représentations âgistes, et servent aussi des intérêts politiques (réduction du soutien aux ainés dépendants) et économiques (développement d’un marché de biens et services pour les aînés). Surtout, ils reposent sur les mêmes normes que l’âgisme, dont ils inversent simplement la valeur : l’activité plutôt que le retrait, l’autonomie plutôt que la dépendance, la beauté plutôt que la décrépitude. On demeure dans le même univers culturel de référence. Ces modèles traduisent en fin de compte un refus du vieillissement, entretenant ainsi une aversion envers celui-ci. On peut pousser la critique encore plus loin, en comparant ces représentations et ces modèles avec ceux qui prévalent ailleurs qu’en Occident. Cela permet notamment une analyse des formes de subjectivation, c’est-à-dire de la manière dont les individus font l’expérience de l’avancée en âge. L’anthropologie peut ainsi contribuer à mieux comprendre les représentations culturelles et les modèles du vieillissement et les pratiques qui leurs sont associées, les politiques et les formes d’organisation des relations entre les individus, d’aménagement de l’espace et du temps qu’elles favorisent. Elle peut contribuer à mieux comprendre comment ces représentations et ces modèles façonnent l’expérience des individus : leurs rapports à soi, aux autres, au monde, la manière dont ils reconnaissent et réagissent aux signes de la vieillesse (rides, douleurs, lenteur), de la sénescence ou de la démence, la manière dont ils anticipent leur vieillissement et s’y préparent, les responsabilités et obligations qu’ils se reconnaissent, leurs attentes à l’égard des plus jeunes, les activités qu’ils s’interdisent ou s’obligent à faire, le type d’indépendance qu’ils recherchent (Leibing, 2004; Lamb, 1997, 2017). La comparaison permet de dégager la variété des expériences et des formes alternatives de vieillissement. Elle permet de mettre en lumière le caractère très relatif des signes du vieillissement, mais aussi des qualités par lesquelles un individu est reconnu comme une personne, un sujet ou être humain.
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Goodale, Mark. "Droits humains." Anthropen, 2019. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.093.

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En tant que sous-domaine émergeant de l'anthropologie sociale et culturelle, l'anthropologie des droits humains a contribué à la théorie et à la méthodologie de diverses manières. Il a également apporté des contributions en dehors de la discipline puisque les juristes internationaux, les responsables politiques et les représentants du gouvernement se réfèrent à l'anthropologie des droits humains comme source d'informations et d'idées au sujet des droits humains dans les documents politiques, les rapports aux agences gouvernementales et dans les principaux discours publics (voir par ex. Higgins 2012, 2013). Culture En tant que catégorie d'organisation de la différence, la culture était dès le départ problématique pour les droits humains. Dans sa Déclaration sur les droits de l'homme de 1947, Melville Herskovits craignait que la diversité et la richesse culturelles ne soient incompatibles avec les droits humains, en affirmant des modèles transculturels de croyances et de pratiques normatives contredisant les preuves anthropologiques et en menaçant d'ignorer la culture au sein de l'économie politique de l'ordre de l’après-guerre. En dépit de ces préoccupations, la diversité culturelle n'a pas été affectée par la promulgation de la Déclaration universelle des droits de l'homme en 1948. Ceci, en grande partie, est dû à l'influence plus large des droits humains, sans parler de la transformation globale imaginée par Herskovits, qui a immédiatement été bloquée par la Guerre froide. Même Eleanor Roosevelt a reconnu que le projet des droits humains prendrait des années, voire des décennies, et que les modèles culturels ne commenceraient à changer que lorsque ce qu'elle appelait une «vigne curieuse» prendra racine puis se répandra dans des lieux où « les gouvernements ne l’attendent pas » (cité dans Korey 1998). Au moment où ce genre de changement à grande échelle a commencé, les anthropologues des droits humains ont observé que l'impact sur la culture défiait la dichotomie entre particularisme et universalisme et que la culture elle-même facilitait la transnationalisation des normes des droits humains. Dans le volume novateur Culture and Rights (« Culture et Droits ») (2001), les anthropologues qui se sont penchés sur une décennie de recherche ethnographique après la fin de la Guerre froide ont remarqué deux phénomènes clés à l'œuvre. Dans la première, les pratiques culturelles et les modes de compréhension normatifs existants ont servi de mécanismes à ce que Sally Engle Merry (2006a) décrira plus tard comme la «vernacularisation», à savoir l’application de normes internationales des droits humains de plus en plus hégémoniques dans des formes de pratique éthique et politique ancrées dans le particulier. Et dans la seconde, les spécialistes de Culture et Droits ont décrit et théorisé l'émergence d'une culture transnationale des droits humains. Ici, un compte rendu anthropologique de la culture s'est avéré utile pour comprendre la formation de nouvelles catégories d'action collective au sein des agences internationales, des ONG transnationales et des mouvements politiques et sociaux façonnés par les logiques des droits humains. Dans les deux cas, l'utilisation par les anthropologues du concept de culture pour comprendre la pratique des droits humains a évolué à contre-courant de la théorie anthropologique et sociale, sceptique sur l'utilité analytique de la culture face à l'hybridation supposée de la mondialisation. Pouvoir Les droits humains, comme Burke aurait pu le dire, agissant à travers les gens, c'est du pouvoir; et «les gens prévenants, avant qu'ils ne se déclarent, observeront l'usage qui est fait du pouvoir; et surtout d'éprouver quelque chose comme l’exercice d’un nouveau pouvoir sur des personnes nouvelles, dont les principes, les colères et les dispositions ont peu ou pas d'expérience »(Burke 1919 [1790]: 7, souligné par l’auteur). Les anthropologues des droits humains ont été très attentifs à un autre problème initialement identifié par Herskovits: la manière dont un projet global de droits humains crée des tensions accrues au sein des conflits d’intérêts existants en éliminant toutes formes alternatives de changement social et de résolution des conflits. Bien sûr, du point de vue des défenseurs des droits humains, c'est un pouvoir exercé pour le bien; en effet, comme l'expriment avec force les traités internationaux comme la CEDAW, le projet des droits humains d'après-guerre exige le changement, le remplacement, voire la suppression des modes de pratique culturelle qui restent inexplicables et donc illégitimes. Comme le stipule l'article 5 souvent cité par le CEDAW, les États parties à la charte internationale des droits des femmes doivent «modifier les comportements sociaux et culturels des hommes et des femmes en vue d'éliminer les préjugés et autres pratiques coutumières» qui sont basées sur les théories locales de l'inégalité de genre. Mais, comme l'ont montré les anthropologues, les droits humains tendent souvent à mettre entre guillemets et à marginaliser les autres logiques culturelles de justice sociale, de développement, de transformation des conflits et d'éthique publique. Et cette extension du pouvoir peut avoir des conséquences inattendues. L'un des exemples les plus complets de la façon dont les anthropologues ont exploré les implications du pouvoir imprévisible des droits humains est l'ethnographie du développement de Harri Englund (2006) au Malawi. Comme il l'explique, le concept des droits humains a été officiellement traduit dans la langue locale avec une phrase qui signifiait «la liberté avec laquelle on est né» (2006: 51). Au fil du temps, les gens ont mis l'accent sur la liberté de contester les normes culturelles existantes en matière de mode, d'obéissance dans les écoles publiques et de comportement sexuel, plutôt que sur les conditions structurelles économiques et politiques qui renforçaient un héritage d'inégalité et de corruption publique. Le résultat, selon Englund, fut que les Malawiens finissaient par être «privés de la traduction». Le discours sur les droits humains a saturé tous les aspects de la vie publique au Malawi, comme le voulaient les fonctionnaires et les travailleurs humanitaires transnationaux. Mais puisque les droits humains étaient mal traduits dans une langue vernaculaire locale, ils ont été transformés au point d'être méconnaissables, ce qui a empêché leur utilisation comme langage d'un changement social pourtant nécessaire. Épistémologie Quand Herskovits affirmait que l'anthropologie n'était pas capable de faire des affirmations définitives sur les droits humains universels parce qu'elle était une «science de l'humanité» et ne s'intéressait donc qu'aux questions empiriques du comportement humain exprimées par des «modèles de culture», il ne pouvait prévoir les innovations épistémologiques dans la discipline qui élargiraient ses objets de connaissance et transformeraient ses domaines d'investigation. Cela ne veut toutefois pas dire que, dans les décennies qui ont suivi, les anthropologues ont écarté les premiers arguments de Herskovits pour confronter les problèmes ontologiques et philosophiques fondamentaux qui restaient essentiels aux droits humains. Une grande partie du travail intellectuel consacré aux droits humains restait dans des sphères telles que les études juridiques critiques, la théorie politique et la philosophie morale. Au contraire, les anthropologues ont utilisé la recherche ethnographique pour étayer de manière subversive l'élargissement des bases sur lesquelles les questions fondamentales morales et théoriques des droits humains pouvaient être posées et résolues. Ceci, à son tour, a eu des implications importantes pour l'épistémologie des droits humains, en particulier dans l'après-Guerre froide, lorsque le discours sur les droits humains s'est de plus en plus intégré dans les pratiques juridiques, politiques et sociales. Les anthropologues ont très tôt observé que les idées sur les droits humains étaient fondamentales dans leur mise en pratique. Les acteurs sociaux, souvent pris dans des moments de crise ou de dislocation, n'ont jamais été capables d'exploiter simplement les droits humains ou de corrompre leurs imaginaires de justice comme s'il s'agissait d'une boîte à outils normative attendant d'être ouverte. Au lieu de cela, les logiques de défense des droits humains exigeaient autant de considération de soi que de changement social; les gens étaient invités, encouragés, obligés de se repenser en tant que citoyens d'un univers moral différent. La théorisation éthique en termes de cet univers moral souvent radicalement différent est devenue une forme distincte de pratique sociale et l'anthropologue est devenu à la fois témoin et participant de cette transformation dans le cadre de la rencontre ethnographique (voir Goodale 2006). Ce qui en résulta fut un enregistrement ethnographique de modèles de droits humains innovants et potentiellement transformateurs, profondément ancrés dans les circonstances de leur création. Le meilleur exemple que nous ayons d'un compte rendu local des droits humains parfaitement articulé est l'ethnographie de Shannon Speed ??sur les conséquences de la rébellion zapatiste au Chiapas (2007). Pendant et après la violence, des organisations internationales et transnationales de défense des droits humains ont envahi la région du Chiapas. Ceux qui défendent les droits des peuples autochtones en tant que droits humains ont été particulièrement influents dans la façon dont la résistance zapatiste s’est exprimée. Les leaders politiques indigènes ont formé des «conseils de bonne gouvernance» dans lesquels les idées sur les droits humains ont été longuement débattues, remaniées et ensuite utilisées pour représenter les valeurs morales zapatistes en tant qu'action politique zapatiste enracinée. Plaidoyer transnational Les réseaux transnationaux des droits humains qui ont émergé après la fin de la Guerre froide ont fait ce qu'Eleanor Roosevelt attendait d'eux: ils ont défié la souveraineté de l'Etat et ont permis de créer de nouvelles sphères publiques à la fois translocales et ancrées dans les sites de contestation intime. Des chercheurs comme Annelise Riles (2000) ont étudié ces réseaux de l'intérieur et ont contribué à la compréhension plus large des assemblages mondiaux qui modifiaient l'ontologie des relations sociales à une époque de transformation économique géopolitique et mondiale. Mais les anthropologues ont également montré à quel point les réseaux de défense des droits humains sont façonnés par les économies politiques des conflits locaux de manière à changer leur valence normative et à les rendre incapables de remplir leur mandat plus large de changement social et de transformation morale. Par exemple, l'ethnographie de longue durée de Winifred Tate (2007) du conflit historique entre l'État colombien et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) montre comment les défenseurs des droits humains luttent pour traduire la langue et les logiques morales des droits humains universels en une catégorie instrumentale de l'action pouvant répondre aux défis du traumatisme historique, des récits multiples et ambigus de la culpabilité pour les atrocités commises, de l'héritage de la violence structurelle, et des modèles durables d'inégalité économique ayant des racines dans la période coloniale. Et l'étude de Sally Engle Merry (2006b) sur les institutions qui surveillent la conformité nationale à la CEDAW illustre en détail la façon dont les défenseurs des droits humains doivent eux-mêmes naviguer entre des cultures multiples de défense et de résistance. Les représentants des ministères nationaux des droits humains se trouvent souvent obligés de défendre à la fois le respect d'un traité international des droits humains et l'intégrité et la légitimité des pratiques culturelles qui semblent violer ce même traité. Néanmoins, ces dichotomies n'annulent pas la portée du droit international des droits humains dans les conflits nationaux et locaux. Au contraire, comme le souligne Merry, elles reflètent la façon dont la pratique des droits humains crée ses propres catégories d'identités et de pouvoirs contestés avec des implications incertaines pour la défense transnationale des droits humains et la promotion du patrimoine national(-iste). Critique et engagement Enfin, l'anthropologie des droits humains, peut-être plus que d'autres orientations académiques s’intéressant aux droits humains, se heurte avec difficultés au dilemme de développer un compte rendu rigoureux et ethnographique des droits humains qui soit à la fois critique et éthiquement conforme aux conditions de vulnérabilité qui mènent aux abus et à l’exploitation. Cette tension s'est exprimée de différentes manières pour chaque anthropologue. Certains (comme Winifred Tate et Shannon Speed, par exemple) ont commencé leur carrière en tant qu'activistes des droits humains avant de faire de la recherche et de mener une réflexion ethnographique sur les processus sociaux et politiques pour lesquels ils s’étaient engagés. Mais la tension entre la critique et l'engagement, le scepticisme et le plaidoyer, et la résistance et l'engagement, n'est pas seulement un défi pour les anthropologues des droits humains. Comme l'a démontré la recherche ethnographique, c'est un fait social et moral fondamental pour la pratique des droits humains elle-même. Ceci en partie parce que la théorie de la pratique sociale et du changement politique que propose les droits humains exige une forme d'autoréflexion et d'auto-constitution destinée à semer le doute sur les pratiques culturelles existantes, sur les théories populaires de l’individu, et sur les hiérarchies du pouvoir. Pourtant, la transition de l'ancien à l’actuel devenu tout à coup illégitime au nouveau et maintenant soudainement authentique est lourde de dérapage moral et de conséquences imprévues. Un exemple récent d'ethnographie de la pratique des droits humains est l'étude de Lori Allen (2013), portant sur le rôle du discours sur les droits humains dans la politique de résistance palestinienne à l'occupation israélienne de la Cisjordanie. Bien que le langage des droits humains ait été utilisé dès la fin des années 1970 en Palestine comme stratégie rhétorique populaire pour défendre les victimes de l'occupation auprès d'une audience internationale, un cercle professionnel d'activistes et d'ONG finit par restreindre l'utilisation des droits humains dans des espaces sociaux et politiques étroitement contrôlés. Dans le même temps, l'ensemble des griefs palestiniens sont restés sans réponse pendant des décennies, comme la violation des droits humains continuelle, l'incapacité à obtenir l'indépendance politique et à influencer favorablement l'opinion politique en Israël. Le résultat fut que les Palestiniens en vinrent à considérer les droits humains avec cynisme et même suspicion. Mais plutôt que de rejeter entièrement les droits humains, ils ont formulé une critique organique des droits humains dans un discours critique et émancipateur plus large promouvant l'autonomie palestinienne, l'anti-impérialisme et l’activisme associatif (par opposition à l'interventionnisme). Après des décennies d'engagement pour les droits humains dans l'histoire de la lutte palestinienne contre l'occupation, les militants ont pu s'approprier ou rejeter les logiques et les attentes des droits humains avec un haut degré de conscience contextuelle et de réalisme politique. Orientations futures L'anthropologie des droits humains est maintenant bien établie en tant que domaine de recherche distinct et source de théorie anthropologique. Sur le plan institutionnel, les universitaires et les étudiants diplômés qui travaillent dans le domaine de l'anthropologie des droits humains viennent généralement, mais pas exclusivement, des rangs de l'anthropologie juridique et politique. Parce que les droits humains sont devenus un mode de plus en plus omniprésent du monde contemporain, les anthropologues rencontrent des traces de cette influence à travers un large éventail de pratiques culturelles, de mouvements politiques et de projets moraux. Cela ne veut cependant pas dire que le statut des droits humains n'est pas contesté, bien au contraire. Alors que la période liminaire de l'après-Guerre froide cède la place à la redifférenciation culturelle, à l'établissement de nouvelles hiérarchies et au rétrécissement des espaces d'expérimentation politique et sociale, les droits humains continueront à bousculer les formes alternatives de pratiques morales et de constitution personnelle et collective. Alors que le projet des droits humains d'après-guerre mûrit en se transformant en processus presque banal de réforme constitutionnelle, de bonne gouvernance et de restructuration économique néo-libérale, son potentiel de catalyseur de transformation radicale et de bouleversement moral diminuera probablement. L'anthropologie des droits humains deviendra moins l'étude d'un discours politique et moral à une époque de transition souvent vertigineuse et de possibilités apparemment illimitées, que celle d'un universalisme séculaire contemporain établi parmi une foule de perspectives concurrentes.
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Laurent, Jérôme. "Patrimoines autochtones." Anthropen, 2019. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.104.

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De nombreux groupes autochtones au Brésil, au Canada, aux États-Unis, en Australie, en Nouvelle-Zélande et ailleurs dans le monde sont particulièrement préoccupés par la protection, la transmission et la reconnaissance de leurs patrimoines culturels. Trois dimensions sont indissociables de la compréhension des patrimoines autochtones soit 1) les liens entre matérialité et immatérialité du patrimoine 2) l’institutionnalisation des processus de patrimonialisation et 3) les médiateurs du patrimoine. Par patrimonialisation, il faut donc comprendre à la fois ce qui compose le patrimoine (chants, rituels, danses, objets, relation au territoire, arts visuels, jeux traditionnels, plantes médicinales…), les processus par lesquels ce patrimoine est documenté, préservé, transmis et mis en valeur (Kreps 2003), mais également les différents acteurs qui œuvrent au sein de ces processus. Souvent relégués à leurs dimensions matérielles, les patrimoines autochtones ne peuvent se comprendre sans considérer leur immatérialité (Leblic 2013 ; Lemonnier 2013). Par immatérialité, nous faisons référence ici aux débats anthropologiques sur les relations qu’entretiennent les humains avec leur environnement et les entités qui le composent (Descola 2005; Ingold 2000, 2011, 2012 ; Viveiros de Castro 2009). Si ces auteurs se sont surtout intéressés aux relations entre les humains et les animaux, les esprits ou les ancêtres, il est nécessaire de prendre en compte également la place des objets, du patrimoine bâti, des lieux et des sites sacrés, de la musique ou encore de la nourriture dans ces processus relationnels. Les objets, qu’ils soient d’art ou d’ethnographie, renvoient par exemple à des codes et des règles de comportement qui guident les humains, s’inscrivent dans des conceptions particulières de la personne, informent sur la création du monde ou se posent comme des révélateurs des identités autochtones du territoire. Les matériaux, les techniques de fabrication autant que le pouvoir attribué aux objets sont liés aux cosmologies et aux ontologies autochtones; ils sont porteurs de visions du monde et de modes d’être au monde spécifiques qui participent des processus actuels d’affirmations identitaires et politique. Dans ce contexte, il devient crucial de s’intéresser à la vie sociale des objets (Bonnot 2002, 2014 ; Koppytoff, 1986), des arbres (Rival 1998), de la forêt (Kohn 2013) ou encore des récits (Cruikshank 1998 ; Savard 1971, 2004 ; Vincent 2013). L’expérience corporelle (Goulet 1994, 1998 ; Laugrand 2013) et sensorielle (Classen 1993 ; Howes 2003, 2014 ; Mauzé et Rostkowski 2007) fait partie intrinsèque de ces patrimoines et de ces savoirs. Ceux-ci incluent à la fois des savoirs écologiques, des savoirs liés aux activités de chasse, de pêche et de cueillette, des savoirs rituels, des savoirs gastronomiques, des savoirs artisanaux et artistiques, des récits sous toutes leurs formes (création du monde, rêves, anecdotes, événements historiques, etc.), des savoirs liés aux réseaux d’alliance interfamiliale et d’affiliation territoriale, mais aussi des savoirs sur les objets ou sur les jeux traditionnels. Ces différents types de savoirs se transmettent et se transforment de manière créative, en étroite relation les uns aux autres. Les politiques historiques et contemporaines d’assimilation, de dépossession et d’usurpation de ces savoirs et de ces patrimoines conduisent à interroger les modalités institutionnelles de préservation et de mise en valeur de ces patrimoines autochtones. Souvent intégrés aux patrimoines nationaux et mis en valeur dans les musées d’État, les biens culturels autochtones ont longtemps échappé à leurs destinataires légitimes, les peuples autochtones eux-mêmes, les reléguant au statut de spectateurs de leurs propres cultures (Price 2007 ; Philips 2003, 2011). Depuis les années 1960-1970, les peuples autochtones ont largement contribué à la transformation, certes inachevée, des Musées de l’Autre en Musées de Soi et, dans certains cas, en Musées du Nous (De l’Étoisle, 2007). Présentés par le sociologue de l’art wendat (Québec) Guy Sioui Durand comme des musées mouroirs (Sioui Durand 2014), les institutions muséales et patrimoniales occidentales tentent aujourd’hui de (re)considérer leurs politiques et d’intégrer les savoirs autochtones dans leurs pratiques (Dubuc 2002, 2006 ; Kreps 2003). Certains cadres institutionnels ont favorisé ces changements. Pensons par exemple aux deux conventions de l’UNESCO pour la protection du patrimoine et des biens culturels immatériels (1972, 2003), au rapport sur les Musées et les peuples autochtones (Erasmus et al. 1994) au Canada, au Native American Graves Protection and Repatriation Act (NAGPRA, 1990) aux États-Unis ou à la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones (AGNU 2007, article 31). Si les institutions muséales occidentales ont progressivement opéré un changement de paradigme (Fienup-Riordan 1999 ; Simpson 2001), les peuples autochtones se dotent aujourd’hui de moyens qui leurs sont propres afin de favoriser la protection, la mise en valeur, la transmission, et souvent la restitution de ces patrimoines et de ces savoirs, et par extension de leur histoire et de leur identité politique (Ames 1992 ; Peers 2000). Le développement de musées, de centres culturels, d’écoles de transmission des savoirs ou de programmes éducatifs culturellement ancrés s’inscrit dans des projets de sociétés qui visent le renforcement des structures de gouvernance et de la souveraineté des peuples autochtones. Il est dès lors impossible de parler des patrimoines autochtones sans parler de mise en valeur et de protection des savoirs, de restitution des données ethnographiques (Zonabend 1994 ; Glowczewski 2009 ; De Largy Healy 2011), de gestion collaborative des collections muséales, et évidemment de participation des peuples autochtones dans ces processus (Tuhiwai Smith 1999). La littérature, le cinéma, la musique, la bande dessinée, les romans graphiques, l’art contemporain, le design, le tourisme ou les réseaux socionumériques s’affirment aujourd’hui comme des éléments incontournables du patrimoine autochtone, mais également comme des stratégies de reconnaissance politique (Coulthard 2014) et d’autoreprésentation identitaire. Ces processus complexes de patrimonialisation institutionnelle nous amènent à considérer enfin les acteurs du patrimoine. Guides spirituels, artistes, chefs familiaux, conservateurs, muséologues, technolinguistes, chercheurs autodidactes, enseignants, aînés-gardiens du savoir ou jeunes activistes, ces experts culturels sont régulièrement sollicités afin de transmettre, de valoriser ou de protéger des savoirs et des pratiques qui se construisent aussi en dehors de l'institution, dans le cadre d'actions citoyennes, de projets communautaires ou de dynamiques familiales. Le territoire devient alors l'espace privilégié de patrimonialisation des pratiques et des savoirs autochtones dans lequel les femmes jouent un rôle central (Basile 2017). Ces médiateurs du patrimoine doivent également faire face à divers enjeux concernant les formes et les stratégies de patrimonialisation actuelles, comme par exemple l’appropriation culturelle et la propriété intellectuelle (Bell et Napoléon 2008 ; Bell 1992, 2014) et les processus de rapatriement des biens culturels. Les processus de rapatriement sont indissociables des mouvements d’affirmations identitaire et politique autochtones qui se développent et se renforcent depuis les années 1960-70 (Clifford 1997, 2007, 2013 ; Gagné 2012 ; Matthews 2014, 2016 ; Mauzé 2008, 2010). Les biens culturels acquis de manières illicites, les restes humains ou les objets culturels sacrés nécessaires à la transmission d’une tradition sont généralement considérés par les institutions comme admissibles aux processus de rapatriement. Même si le mouvement international d’affirmation politique autochtone a conduit au rapatriement de nombreux objets dans leurs milieux d’origine, les processus restent souvent dans l’impasse, et ce pour au moins trois raisons : les experts locaux doivent réunir une documentation importante sur l’objet ; les groupes autochtones ne possèdent pas les infrastructures nécessaires pour conserver l’objet ; les Musées d’État ne sont pas prêts à se départir de ‘leurs’ collections.
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Chamberland, Line. "Hétérosexisme." Anthropen, 2019. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.107.

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L’hétérosexisme réfère à l’ensemble des croyances qui valorisent et promeuvent l’hétérosexualité tout en infériorisant les sexualités non hétérosexuelles. Ainsi, l’hétérosexualité apparaît comme la sexualité universelle, allant de soi, naturelle, normale, morale, bref elle est dotée d’une valeur supérieure en référence à des systèmes normatifs religieux, scientifiques, juridiques ou autres, alors que l’homosexualité (ou toute sexualité s’écartant de la norme hétérosexuelle) se voit dépréciée en tant que crime, péché, acte sexuel non naturel, pathologie, déviance sexuelle, etc. Le concept d’hétérosexisme apparaît aux États-Unis au début des années 1970, en même temps que celui d’homophobie (Herek, 2004). Tout en contestant les savoirs institutionnels de l’époque, ces deux termes proposent néanmoins des voies distinctes de conceptualisation de l’oppression des personnes homosexuelles. L’homophobie inverse le paradigme psychomédical dominant en pathologisant non plus l’homosexualité, mais la peur irrationnelle qu’en ont certains individus. L’hétérosexisme enracine cette oppression dans le social, par analogie avec d’autres systèmes de croyances qui différencient et hiérarchisent des catégories de personnes, comme le racisme et le sexisme (Herek, 2000). Le premier terme emprunte à la psychanalyse alors que le second provient d’une pensée d’inspiration féministe, antiraciste et anticapitaliste. Les deux concepts se diffuseront largement au sein des mouvements de libération des gays et des lesbiennes, puis dans l’univers académique, d’abord dans le monde anglo-saxon et plus tardivement en France (Tin, 2003). À l’origine, le concept d’hétérosexisme s’inscrivait dans des perspectives lesbiennes-féministes. Il s’articulait avec diverses analyses critiques de la place de l’hétérosexualité institutionnalisée dans les processus de subordination des femmes par les hommes (Dugan, 2000). Dans un tel paradigme, l’hétérosexisme fait partie du système patriarcal qui assujettit les femmes, notamment en justifiant leur infériorisation au nom de la différence soi-disant naturelle entre les sexes/genres et de la complémentarité qui en découlerait nécessairement. Sur le plan politique, la notion appelle à une remise en question des constructions socioculturelles de la masculinité et de la féminité et des institutions qui maintiennent des rôles rigides de genre (Herek, 2004). En somme, la régulation des sexualités y est indissociable du maintien des rapports de domination des hommes sur les femmes. Dans cette optique, l’hétérosexisme est envisagé comme un système d’oppression étroitement relié à d’autres inégalités systémiques, comme le sexisme, le racisme ou le classisme (Wilton, 1995). Cependant, dans les usages récents du concept, les références aux théories issues du lesbianisme-féministe ou à l’intersectionnalité des luttes sociales sont le plus souvent absentes. Au fil des décennies, les définitions de l’hétérosexisme se sont multipliées tout en reprenant l’idée essentielle d’un processus systémique de différenciation et de hiérarchisation des sexualités hétérosexuelle et homosexuelle. Selon une recension de Smith, Oades et McCarthy (2012), certaines mettent l’insistance sur la normalisation de l’hétérosexualité et la promotion d’un style de vie hétérosexuel, d’autres sur la disqualification et l’occultation des autres sexualités. Dans cette dernière lignée, l’une des plus courantes est celle du psychologue Gregory Herek (2004) : « une idéologie culturelle qui perpétue la stigmatisation sexuelle en déniant et en dénigrant toute forme non hétérosexuelle de comportement, d’identité, de relation et de communauté non hétérosexuelle » (p. 16, traduction libre). Dans son opérationnalisation, le concept d’hétérosexisme se déploie tantôt vers le social, tantôt vers l’individuel, ce qui n’est pas sans générer des tensions théoriques. Dans le premier cas, la description des manifestations de l’hétérosexisme illustre son ancrage social et culturel, qu’il s’agisse de la présomption d’une hétérosexualité universelle dans les politiques et les pratiques des diverses institutions (écoles, services publics, entreprises, etc.), de l’idéalisation de l’amour hétérosexuel dans les représentations (films, romans, etc.), de l’injonction au silence ou à la discrétion adressée aux gays et aux lesbiennes sous prétexte que la sexualité relève de la vie privée, ou encore de l’assimilation de leurs expériences diverses au modèle dominant de conjugalité hétérosexuelle (Fish, 2006). Sans qu’il n’y ait de consensus sur une perspective théorique commune, les explications de l’hétérosexisme attirent l’attention sur les mécanismes structurels qui en assurent la reproduction, comme le langage et le droit. Dans cette veine, Neisen (1990) définit l’hétérosexisme en associant les notions de préjugés et de pouvoir, ce dernier s’exerçant notamment dans les sphères étatique (criminalisation des relations homosexuelles) et scientifique (discours pathologisants). Dans le second cas, l’accent sera mis sur les effets individuels de l’hétérosexisme en matière de statut et d’inégalités sociales. Ainsi l’hétérosexisme est souvent vu comme la source ou le fondement des attitudes et des comportements homophobes envers les personnes non hétérosexuelles ou perçues comme telles. Par exemple, Pharr (1997) voit dans l’hétérosexisme le pendant institutionnel de l’homophobie : le déploiement systématique de l’idéologie hétérosexiste sur le plan culturel et les gestes homophobes dans les interactions sociales se renforcent mutuellement pour maintenir le pouvoir et les privilèges associés à l’hétérosexualité. Sous cet angle, et malgré leurs racines distinctes sur les plans épistémologique et politique, les concepts d’hétérosexisme et d’homophobie ont souvent été jumelés et présentés comme des notions complémentaires l’une à l’autre, l’un agissant au niveau social, comme une idéologie inégalitaire des sexualités, et l’autre au niveau individuel ou psychologique. Pour sa part, Borrillo (2000) relève l’impossibilité de déconnecter les deux termes puisque l’homophobie ne peut se comprendre indépendamment de la reproduction de l’ordre social des sexes (sexisme) et des sexualités (hétérosexisme). Phénomène à la fois cognitif et normatif, l’hétérosexisme renvoie à « l’ensemble des discours, des pratiques, des procédures et des institutions qui en problématisant ainsi la “spécificité homosexuelle”, ne cessent de renforcer un dispositif destiné à organiser les individus en tant qu’être sexués. » (p. 24). Cependant, les deux notions sont parfois vues comme plus ou moins interchangeables et positionnées comme des concurrentes parmi lesquelles il faut choisir. Une première dissension surgit alors à propos des manifestations d’ostracisme que les deux termes permettent de capter. Au concept d’homophobie, il est reproché d’être androcentrique (centré sur les agressions subies par les hommes gays) et de se focaliser sur les gestes extrêmes d’un continuum de rejet de l’homosexualité, ce qui ne permet pas de rendre compte de leur vaste éventail, ni de leurs formes institutionnelles (Herek, 2004). L’hétérosexisme est considéré comme une notion plus adéquate pour couvrir l’ensemble des manifestations qui reconduisent les inégalités entre les sexualités, y compris les plus subtiles et celles qui s’insinuent dans la banalité du quotidien et que l’on pourrait assimiler au sexisme ordinaire. De même, comparativement aux mesures d’attitudes homophobes, axées sur le rejet, les mesures d’attitudes hétérosexistes, comme l’échelle d’hétérosexisme moderne (Walls, 2008), seraient plus aptes à saisir la persistance des stéréotypes (négatifs mais aussi positifs) envers les personnes gays, lesbiennes ou bisexuelles, même chez les individus exprimant des dispositions favorables à leur égard. Autrement dit, la référence à l’hétérosexisme permet d’enregistrer les changements sociétaux positifs tout en révélant la persistance de la hiérarchie des orientations sexuelles. Toutefois, ce concept sera critiqué en retour comme opérant une dilution ou une euphémisation de l’hostilité généralisée envers les personnes et les sexualités non hétérosexuelles qui en occulterait les démonstrations les plus brutales. Le second axe de tension renvoie aux explications, tantôt psychologiques, tantôt sociologiques, de la stigmatisation des personnes non hétérosexuelles. Le concept d’homophobie a maintes fois été critiqué pour son réductionnisme psychologique (Chamberland et Lebreton, 2012 ; Herek 2004). De même, lorsque le seul usage de l’hétérosexisme est l’application à une mesure d’attitude individuelle, il lui sera reproché d’escamoter toute analyse structurelle et de réduire ainsi la portée analytique du concept. Les implications du choix de l’un ou l’autre concept sont à la fois théoriques et politiques. Plusieurs auteur·e·s optent pour le concept d’hétérosexisme, car il engage à se pencher sur les rapports sociaux et les structures qui reproduisent les inégalités sexuelles. Il s’agit de s’éloigner des schèmes d’explication psychologique ayant la cote dans les sociétés libérales et des solutions uniquement centrées sur l’intervention auprès des individus (sensibilisation, formation, etc.) pour envisager des transformations sociales globales ou à tout le moins des mesures s’attaquant à la hiérarchie des sexualités dans l’organisation des diverses sphères de vie (famille, école, travail, etc.) (Herek, 2004 ; Wilton, 1995). Dans un récent effort de synthèse, Rumens (2016) propose de distinguer l’hétérosexisme culturel, qui réfère à la dimension institutionnelle, et l’hétérosexisme individuel. Avec la montée du post-structuralisme, le concept d’hétérosexisme connaît un certain désaveu, au même titre que d’autres notions faisant référence à toute structure sociale. Son emploi décline au profit du concept d’hétéronormativité créé par Michael Warner (1993), qui met en lumière la normativité langagière et discursive opérant à travers la construction des catégories binaires (des corps, des sexes, des genres, des désirs, etc.) qui composent la matrice de l’hétérosexualité (Herek, 2004). Dans le champ interdisciplinaire des études sur la sexualité, l’hétérosexisme demeure un concept central pour analyser la stratification sexuelle et les inégalités sociales qui en découlent. Bien que le concept se prête à plusieurs définitions, son potentiel heuristique est maximisé lorsqu’il se conjugue à des cadres théoriques et analytiques susceptibles de rendre compte de l’inscription d’une idéologie qui privilégie systématiquement l’hétérosexualité dans les institutions, dans les pratiques sociales et culturelles et dans les interactions quotidiennes, exerçant ainsi une contrainte à l’hétérosexualité (Fish, 2006).
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Hébert, Martin. "Paix." Anthropen, 2018. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.088.

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Une préoccupation pour la réalisation empirique de la paix traverse le discours disciplinaire anthropologique. Ses racines sont profondes et multiples, mais convergent en un ensemble de questions situées à l’intersection entre la recherche de terrain, la philosophie politique et l’engagement pratique. A-t-il déjà existé des sociétés humaines vivant en paix? Quelles sont les conditions permettant, ou ayant permis, l’existence de cette paix? Est-il possible d’entrevoir un chemin vers la paix pour les sociétés contemporaines? On comprendra rapidement que ces questions sont indissociables de la définition même donnée au concept de paix. Intuitivement, nous pouvons comprendre la paix comme un « souhaitable » individuel et collectif. Bien entendu, une telle formulation est insatisfaisante pour l’analyse ou pour guider l’action. Mais avant de la préciser davantage il faut prendre la mesure de la puissance de la notion de paix en tant que référent vide, en tant que réceptacle dans lequel ont été versées les aspirations les plus diverses. La quête de la « paix » a été invoquée pour justifier tant les actions nobles que les actions exécrables de l’histoire. Ce constat pourrait facilement mener à penser que le terme est peu utile dans le cadre d’une discussion sérieuse portant sur les finalités humaines. Cependant, c’est justement le caractère polysémique du mot « paix », doublé du fort investissement normatif dont il fait l’objet, qui lui donnent sa prégnance politique. Comme n’importe quelle autre notion, celle de paix est l’enjeu de luttes de sens. Mais définir la « paix », c’est définir le domaine du souhaitable, du possible, du raisonnable; c’est intervenir directement sur l’horizon des aspirations humaines. Il n’est donc guère surprenant que les tentatives visant à fixer le sens de ce mot soient abondantes, souvent contradictoires entre elles et généralement convaincues de leur légitimité. L’ethnographie participe de diverses manières au travail de définition de la paix. Par exemple, l’ethnographie a joué – et semble parfois tentée de continuer de jouer – un rôle important dans la reproduction du paradigme édénique. Dans cette conception, la paix est comprise à la fois comme une absence de violence interpersonnelle et une régulation harmonieuse des conflits dans la société. Les représentations idylliques de telles sociétés dites « en paix » (Howell et Willis 1989) témoignent d’une tentation dans certains écrits ethnographiques d’idéaliser des sociétés traditionnelles, précoloniales, ou en résistance. Elles participent d’un travail de critique très ancien qui s’opère par contraste, procédé par lequel l’ « Autre » ethnographique est posé comme l’antithèse d’un monde (moderne, capitaliste, colonial, écocide, patriarcal, etc.) dénoncé comme aliéné et violent. L’anthropologie a souvent été prise à partie pour avoir employé une telle stratégie discursive opposant les « sociétés en paix » aux sociétés mortifères. Il faut noter, cependant, que ces remontrances participent elles aussi à la lutte de sens dont l’enjeu est la définition de la notion de paix. Les apologues du colonialisme, par exemple, utilisaient leur propre stratégie de critique par contraste : les lumineux principes (euro-centriques, libéraux, entrepreneuriaux) supposément aux fondements de la prospérité universelle viendraient supplanter les « ténèbres » locales dans ce que Victor Hugo (1885) a décrit comme la « grande marche tranquille vers l’harmonie, la fraternité et la paix » que serait pour lui l’entreprise coloniale en Afrique. Nous glissons ici dans une autre définition de la « paix » ayant joué un rôle important dans l’histoire de l’anthropologie, soit la pacification. Ici, la paix n’est pas un état observable dans les sociétés ethnographiées, mais plutôt un résultat à produire par une intervention politique, incluant militaire. La naïveté de la « grande marche tranquille » d’une Histoire par laquelle l’humanité cheminerait inéluctablement vers une convergence dans des valeurs euro-centriques communes se dissipe ici. Elle fait place à des positions qui établissent leur autorité énonciative en se présentant comme « réalistes », c’est-à-dire qu’elles rejettent l’image édénique de la paix et se rangent à l’idée que la violence est le fondement du politique. Dans cette perspective, la définition de la paix serait la prérogative de ceux qui peuvent l’imposer. La « paix » se confond alors avec l’ordre, avec la répression des conflits sociaux et, surtout, avec un acte de prestidigitation sémantique par lequel les violences faisant avancer les ambitions hégémoniques cessent d’être vues comme violences. Elles deviennent des opérations, des interventions, des mesures, voire des politiques entreprises au nom de la « paix sociale ». On le sait, l’anthropologie a fait plus que sa part pour faciliter les pacifications coloniales. Par son rôle dans des politiques nationales telles l’indigénisme assimilationniste, elle a également contribué à des « projets de société » visant l’unification de populations hétérogènes sous l’égide du nationalisme, du capitalisme et de la docilité aux institutions dominantes. Après la seconde guerre mondiale, il n’a pas non plus manqué d’anthropologues prêtes et prêts à s’associer aux entreprises de pacification/stabilisation par le développement et par l’intégration de populations marginales à l’économie de marché. Dans la plupart des cas, l’anthropologie a été instrumentalisée pour réduire le recours à la violence physique directe dans les entreprises de pacification, proposant des approches moins onéreuses et plus « culturellement adaptées » pour atteindre les mêmes objectifs d’imposition d’un ordre exogène à des sociétés subalternes. Un point tournant dans la critique de la pacification a été le dévoilement de l’existence du projet Camelot dans la seconde moitié des années 1960 (Horowitz 1967). Cette vaste opération mise sur pied par le gouvernement américain visait à engager des spécialistes des sciences sociales pour trouver des moyens d’influencer les comportements électoraux en Amérique latine. Cette initiative visait à faire passer à l’ère de la technocratie les stratégies « civiles » de pacification coloniales développées en Afrique dans les années 20-30 et en Indochine dans les années 50. Outre la dénonciation par les anthropologues nord-américains et européens de cette collusion entre les sciences sociales et impérialisme qui s’est encore illustrée dans le sud-est asiatique pendant la guerre du Vietnam (Current Anthropology 1968), la réponse critique face au dévoilement du projet Camelot fut, notamment, de déclencher une réflexion profonde en anthropologie sur la frontière entre la paix et la guerre. Même si le recours à la manipulation psychologique, économique, politique, et diplomatique n’impliquait pas nécessairement, en lui-même, de violence physique directe il devenait impératif de théoriser les effets de violence produits par cette stratégie (Les Temps Modernes 1970-1971). Si l’idée que certaines « paix » imposées peuvent être éminemment violentes fut recodifiée et diffusée par des chercheurs du Nord à la fin des années 1960, elle était déjà bien en circulation au Sud. Frantz Fanon (1952) mobilisait le concept d’aliénation pour désigner les effets des violences symboliques, épistémologiques et culturelles des systèmes coloniaux. Gustavo Guttiérez (1971), impliqué dans le développement de la théologie de la libération en Amérique latine, parlait pour sa part de « violence institutionnalisée » dans les systèmes sociaux inéquitables. Sous leur forme la plus pernicieuse ces violences ne dépendaient plus d’une application constante de force physique directe, mais s’appuyaient sur une « naturalisation » de la domination. Dans ce contexte, il devenait clair que la notion de paix demandait une profonde révision et exigeait des outils permettant de faire la distinction entre la pacification aliénante et une paix fondée sur la justice sociale. Travaillant à cette fin, Johan Galtung (1969) proposa de faire la différence entre la paix « négative » et la paix dite « positive ». La première renvoie à l’absence de violence physique directe. Elle est une condition considérée comme nécessaire mais de toute évidence non suffisante à une paix significative. Déjà, des enjeux définitionnels importants peuvent être soulevés ici. Une société en paix doit-elle éliminer les sports violents? Les rituels violents? Les représentations artistiques de la violence? Qu’en est-il de la violence physique directe envers les non-humains? (Hébert 2006) La paix positive est une notion plus large, pouvant être rapprochée de celle de justice sociale. Les anthropologues ont tenté de la définir de manière inductive en proposant des études empiriques de deux types. Dans un premier temps, il s’est agi de définir diverses formes de violences autres que physique et directe (telles les violences structurelles, symboliques, épistémiques, ontologiques, etc.) et poser la paix positive comme le résultat de leur élimination. Par contre, les limites de cette « sombre anthropologie » (Ortner 2016) ont appelé des recherches complémentaires, plutôt centrées sur la capacité humaine à imaginer et instituer de nouvelles formes sociales dépassant les violences perçues dans les formes passées. L’idée d’une paix stable, définitive et hors de l’histoire – en d’autres mots édénique – disparaît ici. Elle est remplacée par des processus instituants, constamment examinés à l’aune de définitions de la violence qui, elles-mêmes, sont en transformation constante. La définition de la paix demeure l’enjeu de luttes de sens. Ces dernières se résolvent nécessairement dans des rapports politiques concrets, situés historiquement et sujets à changement. Les travaux anthropologiques ne font pas exception et sont pleinement engagés dans la production politique de ces définitions. Mais l’anthropologie de la paix participe également de la réflexivité que nous pouvons avoir tant face aux définitions cristallisées dans nos institutions que face à celles qui se proposent des les remplacer.
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Marie-Pier, Girard. "Enfance." Anthropen, 2019. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.109.

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L’origine des études contemporaines de l’enfance remonte à l’ouvrage L’enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime (1960) dans lequel l’auteur, Philippe Ariès, expliqua qu’à l’époque médiévale le sentiment de l’enfance, soit la conscience de la particularité enfantine, n’existait pas (Ariès 1960 : 134; Stephens 1995 : 5). En exposant qu’au Moyen-âge les plus jeunes ne jouissaient pas d’un statut spécial, distinctif, c’est-à-dire qu’ils étaient traités comme de petits adultes, cet ouvrage montra le caractère socialement construit de l’enfance. Si la thèse constructiviste de Philippe Ariès a permis de révéler que la conception de l’enfance qui prévaut aujourd’hui est historiquement spécifique, les travaux d’anthropologues tels que Margaret Mead avaient déjà mis en évidence le rôle déterminant de la culture dans la configuration des enfances à travers le monde (Mead 1932 ; Montgomery 2008b : 22-23). En fait, ces contributions ont montré que la façon d’envisager et d’encadrer l’enfance varie considérablement selon les époques et les contextes socioculturels et qu’incidemment, celle-ci ne peut se voir abordée comme un descripteur non problématique d’une phase biologique et naturelle (James et James 2001 : 27). Ainsi, la définition naturalisée et normative de l’enfance qui se voit actuellement globalisée ne constitue qu’une représentation particulière des premières années de l’existence humaine, une représentation qui fut construite à partir d’expériences spécifiques pouvant être situées localement. La définition dominante de l’enfance qui admet l’âge comme critère primordial de division a émergé au début du XIXe siècle alors que s’est mise en branle dans les sociétés occidentales une exploration systématique de l’enfance, notamment menée par la psychologie, la biologie, les sciences de l’éducation et la sociologie (Ariès 1960; Archard 1993 : 30). Ces savoirs ont décrit une enfance ontologiquement distincte et séparée de l’âge adulte, un stade crucial et formatif dans ce qui fut appelé le développement de l’être humain. La constitution de cette vision de l’enfance qui insiste sur les besoins de protection des plus jeunes, sur leur vulnérabilité et sur leur innocence, est aussi rattachée aux bouleversements complexes et contradictoires survenus en Occident durant le XXe siècle au moment où des attentes élevées quant au bien-être des enfants ont côtoyé la réalité dévastatrice de la guerre (Fass 2011 : 17). En effet, les progrès scientifiques de l’époque (par exemple l’antisepsie, la vaccination, des méthodes contraceptives plus efficaces), la préoccupation des gouvernements au sujet de la santé publique et leur instrumentalisation de l’enfance à des fins nationalistes ont donné lieu aux premiers programmes et législations visant spécifiquement les enfants. La scolarisation, rendue obligatoire dans presque tout le monde occidental, devint alors le moyen de prédilection pour étendre les bénéfices des progrès scientifiques aux enfants défavorisés et pour établir de nouveaux standards d’alphabétisation, de bien-être infantile, d’hygiène et de nutrition. Ainsi, l’école s’institua comme le lieu privilégié de l’enfance, mais aussi comme l’alternative salutaire au travail et aux rues. L’attention sur les jeunes esprits éduqués et les petits corps sains n’occupait pas uniquement l’espace public, elle pénétra aussi la sphère privée où les parents s’intéressaient de plus en plus au potentiel individuel de leur enfant et à son épanouissement (Fass 2011 : 21). Alors que l’enfance était devenue moins risquée, davantage protégée, mieux nourrie et qu’un nouvel attachement sentimental à celle-ci s’était développé, des images terribles d’enfants fusillés puis affamés lors de la Première Guerre Mondiale bouleversèrent l’Occident. Cette confluence d’une émotivité naissante envers les plus jeunes, de leur visibilité croissante et de leur victimisation durant la guerre, a constitué le cadre initial d’un engagement envers un idéal international de protection de l’enfance (Fass 2011 : 22). Quand plus tard, la Seconde Guerre Mondiale exposa un paysage d’une destruction et d’une horreur encore plus grandes dans lequel les enfants, désormais emblèmes de la vulnérabilité, périrent par millions, la nécessité de proclamer une charte consacrant juridiquement la notion de droits de l’enfant devint évidente. Adoptée par les Nations unies en 1959, la Déclaration des droits de l’enfant servit de fondement à la Convention relative aux droits de l’enfant de 1989 (CRDE) (de Dinechin 2006 : 19). Transformant les droits déjà proclamés en 1959 en un instrument légalement contraignant sur le plan international, la CRDE est devenue la traduction dans le monde de l’enfance de la promotion de la philosophie des droits de la personne, et sa cible, l’enfant, un sujet de droits défini par son âge (de Dinechin 2006 : 19-20). La CRDE, aujourd’hui le document historique global le plus acclamé, établit que certains principes fondamentaux doivent universellement et indistinctement s’appliquer à tous les enfants au-delà des différences ethniques, de religion, de culture, de statut économique et de genre. Même si elle accepte certaines particularités locales, la CRDE transmet une vision de ce que devrait être l’enfance à travers le monde en faisant appel à un idéal défini en Occident à partir de ses catégories culturelles et construit à partir de ses propres savoirs. Alors, les paramètres structurants de la conception occidentale des premières années de l’existence humaine, soit l’âge, l’innocence, l’asexualité, la vulnérabilité, l’incompétence, la sacralité de l’enfance, l’école et le jeu, ont été essentialisés et institués comme les propriétés paradigmatiques de toute enfance (Meyer 2007 : 100). Par conséquent, les enfances « autres », qui s’écartent de cette définition, doivent être transformées par des interventions menées par des adultes. C’est dans ce contexte d’universalisation d’un idéal occidental, de développement de l’enfance en domaine de pensée et d’intervention, mais aussi de prolifération d’images et de témoignages d’enfants dont les vies sont plus que jamais marquées par les inégalités sociales, l’abus et les violences, que se situe le regard anthropologique contemporain posé sur les enfants. Ainsi, une des questions essentielles qui habite cette anthropologie est : comment réconcilier un regard fondamentalement critique du discours et des pratiques liés aux droits de l’enfant avec une approche engagée face à ce même régime des droits, qui reconnaît, rend visible et dénonce les violations bien réelles que subissent les enfants au quotidien (Goodale 2006 : 1) ? Un retour sur les travaux anthropologiques révèle que des références à l’enfance et aux enfants y sont souvent présentes, mais pas toujours de manière explicite et généralement, celles-ci visaient à éclairer la recherche sur d’autres thèmes ou à mieux appréhender l’univers des adultes. D’ailleurs, dès les premiers écrits en anthropologie, l’enfant est apparu aux côtés du « primitif » pour expliquer le développement socioculturel et moral, le passage à l’âge adulte représentant l’équivalent de la transition de l’état sauvage à la civilisation (Montgomery 2008b : 18). Néanmoins, certains anthropologues dont Franz Boas (1858-1942), considéré comme le précurseur de la recherche ethnographique sur l’enfance aux États-Unis, puis Margaret Mead (1901-1978), ont contesté le déterminisme biologique en plus de placer réellement les enfants à l’agenda anthropologique (Levine 2007 : 249). Dans le cas de Margaret Mead, elle demeure une des premières anthropologues à avoir pris les enfants au sérieux et à avoir confronté les postulats universels des savoirs sur le développement humain, et à ce titre, elle a largement inspiré l’anthropologie contemporaine de l’enfance (Mead 1932 ; Montgomery 2008b : 22-23). L’idée d’une véritable anthropologie de l’enfance a été soulevée dès 1973 par Charlotte Hardman qui critiquait le regard jusque là porté sur les enfants, un regard qui les envisageait le plus souvent comme les simples spectateurs d’un monde adulte qu’ils assimilaient passivement (Hardman 1973 citée dans Montgomery 2008b : 38). Charlotte Hardman a fait valoir que les univers des enfants constituaient des objets d’étude valables qui permettaient de révéler des aspects de la vie sociale ignorés par les ethnographies conventionnelles, mais surtout, elle souligna l’importance de considérer leurs points de vue : « children [are] people to be studied in their own right » (Hardman 2001 : 516). Devenue axiomatique et reprise par nombre d’anthropologues depuis les années 1970, cette citation posait les jalons d’une nouvelle anthropologie de l’enfance dans laquelle les enfants devenaient les meilleurs informateurs de leur propre vie. Une telle anthropologie centrée sur l’enfant a impliqué un changement de paradigme, soit un déplacement d’une compréhension des vies des enfants exclusivement basée sur les critères des adultes vers une prise en compte des interprétations, des négociations, des réappropriations et des réinventions des enfants eux-mêmes. Au cours des dernières années, de nombreuses recherches anthropologiques se sont inscrites dans cette perspective et ont fait valoir l’importance de reconnaître les enfants en tant que véritables acteurs sociaux activement impliqués dans le façonnement de l’enfance et du monde qui les entoure (voir Hecht 1998 ; Scheper-Hughes et Sargent 1998 ; Bluebond-Langner et Korbin 2007 ; Levine 2007 ; Montgomery 2008a). À l’heure actuelle, l’enfance en tant que champ d’étude en anthropologie se définit dans un premier temps comme un espace générationnel dans lequel les garçons et les filles construisent leurs trajectoires et négocient leurs pratiques face aux processus historiques, économiques, politiques et culturels. Si l’enfance renvoie à l’expérience de celle-ci par les sujets anthropologiques, une expérience entre autres différenciée par le genre, elle constitue aussi un champ de pensée et d’action qui englobe l’ensemble des représentations, pratiques, savoirs, doctrines, institutions, politiques et interventions qui lui sont rattachés dans un contexte donné. D’ailleurs, dans un même pays, plusieurs visions concurrentes des premières années de l’existence humaine peuvent coexister, par exemple en fonction des différentes classes sociales ou de l’appartenance ethnique, donnant lieu à des discours et à des pratiques divergentes; produisant des mondes enfantins différenciés. L’anthropologie contemporaine de l’enfance porte donc sur cette hétérogénéité des expériences et des conceptions socioculturelles de l’enfance et sur la variabilité de ses usages politiques, idéologiques et sociaux (Scheper-Hughes et Sargent 1998). Si elle se consacre à dépeindre cette diversité, l’anthropologie actuelle témoigne aussi de plus en plus des similarités dans les manières par lesquelles les structures économiques et politiques affectent les vies des jeunes personnes dans un monde de plus en plus instable et polarisé. La CRDE constitue à ce titre l’effort le plus notoire de définition des similarités de l’enfance; ce faisant, elle a constitué les enfants en un groupe ciblé par un même agenda global, à qui l’on assigne certaines caractéristiques identitaires communes et pour lesquels on prescrit des interventions analogues. D’ailleurs, la pénétration de constructions culturelles et formations discursives hégémoniques dans différents contextes donne bien souvent lieu à une redéfinition des enfances et des rôles et responsabilités des garçons et des filles. En somme, dans le cadre d’une anthropologie contemporaine, il s’agit d’analyser la complexité des réalités mondialisées des plus jeunes et les reconfigurations constantes du champ de l’enfance qui s’opèrent, de continuer de problématiser les savoirs, postulats et définitions globalisés qui ont acquis le statut de vérités, et ce, tout en confrontant les relativismes culturels qui sont mobilisés pour justifier les abus et les violences qui s’exercent contre les enfants.
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Fougeyrollas, Patrick. "Handicap." Anthropen, 2016. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.013.

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Handicap : nom commun d’origine anglo-saxonne dont l’étymologie proviendrait de Hand in Cap, une pratique populaire pour fixer la valeur d'échange d’un bien. Dans le domaine des courses de chevaux, le handicap vise à ajouter du poids aux concurrents les plus puissants pour égaliser les chances de gagner la course pour tous les participants. Il apparait dans le dictionnaire de l’Académie française dans les années 1920 dans le sens de mettre en état d’infériorité. Son utilisation pour désigner les infirmes et invalides est tardive, après les années 1950 et se généralise au début des années 1970. Par un glissement de sens, le terme devient un substantif qualifiant l’infériorité intrinsèque des corps différentiés par leurs atteintes anatomiques, fonctionnelles, comportementales et leur inaptitude au travail. Les handicapés constituent une catégorisation sociale administrative aux frontières floues créée pour désigner la population-cible de traitements socio-politiques visant l’égalisation des chances non plus en intervenant sur les plus forts mais bien sur les plus faibles, par des mesures de réadaptation, de compensation, de normalisation visant l’intégration sociale des handicapés physiques et mentaux. Ceci rejoint les infirmes moteurs, les amputés, les sourds, les aveugles, les malades mentaux, les déficients mentaux, les invalides de guerre, les accidentés du travail, de la route, domestiques et par extension tous ceux que le destin a doté d’un corps différent de la normalité instituée socio-culturellement dans un contexte donné, ce que les francophones européens nomment les valides. Dans une perspective anthropologique, l’existence de corps différents est une composante de toute société humaine (Stiker 2005; Fougeyrollas 2010; Gardou 2010). Toutefois l’identification de ce qu’est une différence signifiante pour le groupe culturel est extrêmement variée et analogue aux modèles d’interprétation proposés par François Laplantine (1993) dans son anthropologie de la maladie. Ainsi le handicap peut être conçu comme altération, lésion ou comme relationnel, fonctionnel, en déséquilibre. Le plus souvent le corps différent est un corps mauvais, marqueur symbolique culturel du malheur lié à la transgression d’interdits visant à maintenir l’équilibre vital de la collectivité. La responsabilité de la transgression peut être endogène, héréditaire, intrinsèque aux actes de la personne, de ses parents, de ses ancêtres, ou exogène, due aux attaques de microbes, de virus, de puissances malveillantes, génies, sorts, divinités, destin. Plus rarement, le handicap peut être un marqueur symbolique de l’élection, comme porteur d’un pouvoir bénéfique singulier ou d’un truchement avec des entités ambiantes. Toutefois être handicapé, au-delà du corps porteur de différences signifiantes, n’implique pas que l’on soit malade. Avec la médicalisation des sociétés développées, une fragmentation extrême du handicap est liée au pouvoir biomédical d’attribuer des diagnostics attestant du handicap, comme garde-barrière de l’accès aux traitements médicaux, aux technologies, à la réadaptation, aux programmes sociaux, de compensation ou d’indemnisation, à l’éducation et au travail protégé ou spécial. Les avancées thérapeutiques et de santé publique diminuent la mortalité et entrainent une croissance continue de la morbidité depuis la Deuxième Guerre mondiale. Les populations vivant avec des conséquences chroniques de maladies, de traumatismes ou d’atteintes à l’intégrité du développement humain augmentent sans cesse. Ceci amène l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à s’intéresser non plus aux diagnostics du langage international médical, la Classification internationale des maladies, mais au développement d’une nosologie de la chronicité : la Classification internationale des déficiences, des incapacités et des handicaps qui officialise une perspective tridimensionnelle du handicap (WHO 1980). Cette conceptualisation biomédicale positiviste situe le handicap comme une caractéristique intrinsèque, endogène à l’individu, soit une déficience anatomique ou physiologique entrainant des incapacités dans les activités humaines normales et en conséquence des désavantages sociaux par rapport aux individus ne présentant pas de déficiences. Le modèle biomédical ou individuel définit le handicap comme un manque, un dysfonctionnement appelant à intervenir sur la personne pour l’éduquer, la réparer, l’appareiller par des orthèses, des prothèses, la rétablir par des médicaments, lui enseigner des techniques, des savoirs pratiques pour compenser ses limitations et éventuellement lui donner accès à des subsides ou services visant à minimiser les désavantages sociaux, principalement la désaffiliation sociale et économique inhérente au statut de citoyen non performant ( Castel 1991; Foucault 1972). À la fin des années 1970 se produit une transformation radicale de la conception du handicap. Elle est étroitement associée à la prise de parole des personnes concernées elles-mêmes, dénonçant l’oppression et l’exclusion sociale dues aux institutions spéciales caritatives, privées ou publiques, aux administrateurs et professionnels qui gèrent leur vie. C’est l’émergence du modèle social du handicap. Dans sa tendance sociopolitique néomarxiste radicale, il fait rupture avec le modèle individuel en situant la production structurelle du handicap dans l’environnement socio-économique, idéologique et matériel (Oliver 1990). La société est désignée responsable des déficiences de son organisation conçue sur la performance, la norme et la productivité entrainant un traitement social discriminatoire des personnes ayant des déficiences et l’impossibilité d’exercer leurs droits humains. Handicaper signifie opprimer, minoriser, infantiliser, discriminer, dévaloriser, exclure sur la base de la différence corporelle, fonctionnelle ou comportementale au même titre que d’autres différences comme le genre, l’orientation sexuelle, l’appartenance raciale, ethnique ou religieuse. Selon le modèle social, ce sont les acteurs sociaux détenant le pouvoir dans l’environnement social, économique, culturel, technologique qui sont responsables des handicaps vécus par les corps différents. Les années 1990 et 2000 ont été marquées par un mouvement de rééquilibrage dans la construction du sens du handicap. Réintroduisant le corps sur la base de la valorisation de ses différences sur les plans expérientiels, identitaires et de la créativité, revendiquant des modes singuliers d’être humain parmi la diversité des êtres humains (Shakespeare et Watson 2002; French et Swain 2004), les modèles interactionnistes : personne, environnement, agir, invalident les relations de cause à effet unidirectionnelles propres aux modèles individuels et sociaux. Épousant la mouvance de la temporalité, la conception du handicap est une variation historiquement et spatialement située du développement humain comme phénomène de construction culturelle. Une construction bio-socio-culturelle ouverte des possibilités de participation sociale ou d’exercice effectif des droits humains sur la base de la Déclaration des droits de l’Homme, des Conventions internationales de l’Organisation des Nations-Unies (femmes, enfants, torture et maltraitance) et en l’occurrence de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDPH) (ONU 2006; Quinn et Degener 2002; Saillant 2007). Par personnes handicapées, on entend des personnes qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres. (CDPH, Art 1, P.4). Fruit de plusieurs décennies de luttes et de transformations de la conception du handicap, cette définition représente une avancée historique remarquable autant au sein du dernier des mouvements sociaux des droits civiques, le mouvement international de défense des droits des personnes handicapées, que de la part des États qui l’ont ratifiée. Malgré le fait que l’on utilise encore le terme personne handicapée, le handicap ne peut plus être considéré comme une caractéristique de la personne ni comme un statut figé dans le temps ni comme un contexte oppressif. Il est le résultat d’une relation dont il est nécessaire de décrire les trois composantes anthropologiques de l’être incarné : soi, les autres et l’action ou l’habitus pour en comprendre le processus de construction singulier. Le handicap est situationnel et relatif , sujet à changement, puisqu’il s’inscrit dans une dynamique interactive temporelle entre les facteurs organiques, fonctionnels, identitaires d’une part et les facteurs contextuels sociaux, technologiques et physiques d’autre part, déterminant ce que les personnes ont la possibilité de réaliser dans les habitudes de vie de leurs choix ou culturellement attendues dans leurs collectivités. Les situations de handicap ne peuvent être prédites à l’avance sur la base d’une évaluation organique, fonctionnelle, comportementale, identitaire ou de la connaissance de paramètres environnementaux pris séparément sans réintroduire leurs relations complexes avec l’action d’un sujet définissant le sens ou mieux incarnant la conscience vécue de cette situation de vie. Suite au succès de l’expression personne en situation du handicap en francophonie, on remarque une tendance à voir cette nouvelle appellation remplacer celle de personne handicapée. Ceci est généralement interprété comme une pénétration de la compréhension du modèle interactionniste et socio constructiviste. Toutefois il est inquiétant de voir poindre des dénominations comme personnes en situation de handicap physique, mental, visuel, auditif, intellectuel, moteur. Cette dérive démontre un profond enracinement ontologique du modèle individuel. Il est également le signe d’une tendance à recréer un statut de personne en situation de handicap pour remplacer celui de personne handicapée. Ceci nécessite une explication de la notion de situation de handicap en lien avec le concept de participation sociale. Une personne peut vivre à la fois des situations de handicap et des situations de participation sociale selon les activités qu’elle désire réaliser, ses habitudes de vie. Par exemple une personne ayant des limitations intellectuelles peut vivre une situation de handicap en classe régulière et avoir besoin du soutien d’un éducateur spécialisé mais elle ne sera pas en situation de handicap pour prendre l’autobus scolaire pour se rendre à ses cours. L’expression personne vivant des situations de handicap semble moins propice à la dérive essentialiste que personne en situation de handicap. Le phénomène du handicap est un domaine encore largement négligé mais en visibilité croissante en anthropologie. Au-delà des transformations de sens donné au terme de handicap comme catégorie sociale, utile à la définition de cibles d’intervention, de traitements sociaux, de problématiques sociales pour l’élaboration de politiques et de programmes, les définitions et les modèles présentés permettent de décrire le phénomène, de mieux le comprendre mais plus rarement de formuler des explications éclairantes sur le statut du handicap d’un point de vue anthropologique. Henri-Jacques Stiker identifie, en synthèse, cinq théories du handicap co-existantes dans le champ contemporain des sciences sociales (2005). La théorie du stigmate (Goffman 1975). Le fait du marquage sur le corps pour indiquer une défaveur, une disgrâce, un discrédit profond, constitue une manière de voir comment une infirmité donne lieu à l’attribution d’une identité sociale virtuelle, en décalage complet avec l’identité sociale réelle. Le handicap ne peut être pensé en dehors de la sphère psychique, car il renvoie toujours à l’image de soi, chez celui qui en souffre comme celui qui le regarde. Le regard d’autrui construit le regard que l’on porte sur soi mais en résulte également (Stiker 2005 :200). La théorie culturaliste qui met en exergue la spécificité des personnes handicapées, tout en récusant radicalement la notion même de handicap, est enracinée dans le multiculturalisme américain. Les personnes handicapées se constituent en groupes culturels avec leurs traits singuliers, à partir de conditions de vie, d’une histoire (Stiker 2005). Par exemple au sein des Disability Studies ou Études sur le handicap, il est fréquent de penser que seuls les corps différents concernés peuvent véritablement les pratiquer et en comprendre les fondements identitaires et expérientiels. L’exemple le plus probant est celui de la culture sourde qui se définit comme minorité ethno-linguistique autour de la langue des signes et de la figure identitaire du Sourd. On fera référence ici au Deaf Studies (Gaucher 2009). La théorie de l’oppression (Oliver 1990). Elle affirme que le handicap est produit par les barrières sociales en termes de déterminants sociologiques et politiques inhérents au système capitaliste ou productiviste. Les personnes sont handicapées non par leurs déficiences mais par l’oppression de l’idéologie biomédicale, essentialiste, individualiste construite pour empêcher l’intégration et l’égalité. Ce courant des Disability Studies s’inscrit dans une mouvance de luttes émancipatoires des personnes opprimées elles-mêmes (Stiker 2005 : 210; Boucher 2003) La théorie de la liminalité (Murphy 1990). Par cette différence dont ils sont les porteurs, les corps s’écartent de la normalité attendue par la collectivité et sont placés dans une situation liminale, un entre-deux qu’aucun rite de passage ne semble en mesure d’effacer, de métamorphoser pour accéder au monde des corps normaux. Cette théorie attribue un statut anthropologique spécifique au corps handicapé sans faire référence obligatoire à l’oppression, à l’exclusion, à la faute, ou au pouvoir. Marqués de façon indélébile, ils demeurent sur le seuil de la validité, de l’égalité, des droits, de l’humanité. La théorie de l’infirmité comme double, la liminalité récurrente de Stiker (2005). L’infirmité ne déclenche pas seulement la liminalité mais en référant à la psychanalyse, elle est un véritable double. La déficience est là, nous rappelant ce que nous n’aimons pas et ne voulons pas être, mais elle est notre ombre. Nous avons besoin de l’infirmité, comme de ceux qui la portent pour nous consoler d’être vulnérable et mortel tout autant que nous ne devons pas être confondus avec elle et eux pour continuer à nous estimer. Ils sont, devant nous, notre normalité, mais aussi notre espoir d’immortalité (Stiker 2005 : 223)
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Bromberger, Christian. "Méditerranée." Anthropen, 2019. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.106.

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Alors que l’américanisme, l’africanisme, l’européanisme, l’indianisme… sont reconnus, certifiés par des musées ou des sections de musée, des départements universitaires, des chapitres de manuels depuis les origines, l’anthropologie de la Méditerranée est une spécialité récente, prenant corps, sous l’égide des universités britanniques, dans les années 1950. Ce retard est dû, au moins en partie, à l’hétérogénéité du monde méditerranéen partagé entre les façades méridionale et orientale de la mer, qui relèvent, à première vue, de l’étude du monde arabo-musulman, et la façade septentrionale ressortissant de prime abord de l’ethnologie européenne. Le scepticisme, récusant la pertinence d’une anthropologie de la Méditerranée, peut encore trouver des arguments dans l’histoire des civilisations ou dans l’actualité. Contrairement à d’autres régions du monde, l’aire iranienne voisine par exemple, le monde méditerranéen ne forme une unité ni par ses langues ni par ses traditions religieuses. Faut-il rappeler que seul l’Empire romain l’a unifié pendant plusieurs siècles autour du « mare nostrum » en favorisant l’épanouissement d’une culture gréco-latine à vocation universelle et en développant tout autour de la mer des institutions politiques sur le modèle de Rome ? Puis l’histoire de la Méditerranée fut faite de partages, de schismes, de croisades, de guerres entre empires, de conquêtes coloniales qui aboutirent, au terme de péripéties violentes, à la situation contemporaine où coexistent trois ensembles eux-mêmes fractionnés : une Méditerranée latine, catholique, largement laïcisée , partie intégrante de l’Europe occidentale, une Méditerranée balkanique orthodoxe avec ses poches islamiques, une Méditerranée arabo-musulmane. En dépit de ces fractures, des hommes de lettres campèrent, dans les années 1930, une Méditerranée des échanges et de la convivenza, à laquelle donnent crédit des lieux et des épisodes remarquables de l’histoire (l’Andalousie au temps du califat omeyade, la Sicile de Frédéric II, des villes cosmopolites de la fin du XIXème siècle et du début du XXème siècle : Istanbul, Smyrne, Salonique, Beyrouth, Alexandrie, Alger, Tanger, Trieste, Marseille, etc.). Des revues (à Marseille, les Cahiers du sud de Jean Ballard, à Tunis Les Cahiers de la Barbarie d’Armand Guibert et Jean Amrouche , à Alger Rivages d’Edmond Charlot et Albert Camus, à Rabat Aguedal d’Henri Bosco) exaltèrent cette « fraternité méditerranéenne » tout autant imaginaire que réelle. Gabriel Audisio fut le chantre le plus exalté de cette commune « patrie méditerranéenne »: « Non, écrit-il, la Méditerranée n’a jamais séparé ses riverains. Même les grandes divisions de la Foi, et ce conflit spirituel de l’Orient et de l’Occident, la mer ne les a pas exaltés, au contraire adoucis en les réunissant au sommet sensible d’un flot de sagesse, au point suprême de l’équilibre ». Et à l’image d’une Méditerranée romaine (il veut « remettre Rome ‘à sa place’ ») il oppose celle d’une « synthèse méditerranéenne » : « À cette latinité racornie, j’oppose tout ce qui a fait la civilisation méditerranéenne : la Grèce, l’Égypte, Judas, Carthage, le Christ, l’Islam ». Cette Méditerranée qui « vous mélange tout ça sans aucune espèce de pudeur », dit-il encore, « se veut universelle ». Avant qu’un projet collectif d’anthropologie n’émerge, des ancêtres de la discipline, des géographes, des historiens, avaient apporté une contribution importante à la connaissance du monde méditerranéen. Maine, Robertson Smith, Frazer, etc. étaient classicistes ou historiens du droit et se référaient souvent aux sociétés antiques de la Méditerranée pour analyser coutumes et croyances ou encore les différentes formes d’organisation sociale (la tribu, la cité, etc.) et leur évolution. Plus tard, dans les premières décennies du XXème siècle, de remarquables études monographiques ou thématiques furent réalisées sur les différentes rives de la Méditerranée , telles celles de Maunier (1927) sur les échanges rituels en Afrique du nord, de Montagne (1930) sur les Berbères du sud Marocain, de Boucheman (1937) sur une petite cité caravanière de Syrie…Géographes et historiens, plus préoccupés par l’ancrage matériel des sociétés que par leur structure ou leurs valeurs, publièrent aussi des travaux importants, synthétiques ceux-ci, sur le monde méditerranéen ; ainsi Charles Parain, dans La Méditerranée, les hommes et les travaux (1936), campe une Méditerranée des infrastructures, celle qui prévaudra jusques et y compris dans les 320 premières pages de la thèse de Fernand Braudel (1949), celle des « ressources naturelles, des champs et des villages, de la variété des régimes de propriété, de la vie maritime, de la vie pastorale et de la vie agricole, des métiers et des techniques ». L’acte fondateur de l’anthropologie de la Méditerranée fut un colloque organisé en 1959 par Julian Pitt-Rivers, Jean Peristiany et Julio Caro Baroja, qui réunit, entre autres, Ernest Gellner, qui avait mené des travaux sur le Haut-Atlas, Pierre Bourdieu, alors spécialiste de la Kabylie, John K. Campbell, auteur de recherches sur les Saracatsans du nord de la Grèce. Cette rencontre, et celle qui suivit, en 1961, à Athènes donnèrent lieu à la publication de deux recueils fondamentaux (Pitt-Rivers, 1963, Peristiany, 1965), campant les principaux registres thématiques d’une anthropologie comparée des sociétés méditerranéennes (l’honneur, la honte, le clientélisme, le familialisme, la parenté spirituelle, etc.) et véritables coups d’envoi à des recherches monographiques s’inscrivant désormais dans des cadres conceptuels fortement charpentés. Les décennies 1960, 1970 et 1980 furent celles d’une croissance rapide et d’un épanouissement de l’anthropologie de la Méditerranée. Le monde méditerranéen est alors saisi à travers des valeurs communes : outre l’honneur et la honte, attachés au sang et au nom (Pitt-Rivers, 1977, Gilmore, 1987), la virilité qui combine puissance sexuelle, capacité à défendre les siens et une parole politique ferme qui ne transige pas et ne supporte pas les petits arrangements, l’hospitalité ostentatoire. C’est aussi un univers où domine une vision endogamique du monde, où l’on prise le mariage dans un degré rapproché, mieux la « république des cousins », où se marient préférentiellement le fils et la fille de deux frères, une formule surtout ancrée sur la rive sud et dans l’Antiquité pré-chrétienne, ; Jocaste ne dit-elle pas à Polynice : « Un conjoint pris au-dehors porte malheur » ? Ce à quoi Ibn Khaldoun fait écho : « La noblesse, l’honneur ne peuvent résulter que de l’absence de mélange », écrivait-il. Aux « républiques des beaux-frères », caractéristiques des sociétés primitives exogames étudiées par Claude Lévi-Strauss s’opposent ainsi les « républiques méditerranéennes des cousins », prohibant l'échange et ancrées dans l'endogamie patrilinéaire. Alors que dans les premières, « une solidarité usuelle unit le garçon avec les frères et les cousins de sa femme et avec les maris de ses sœurs », dans les secondes « les hommes (...) considèrent leurs devoirs de solidarité avec tous leurs parents en ligne paternelle comme plus importants que leurs autres obligations, - y compris, bien souvent, leurs obligations civiques et patriotiques ». Règne ainsi, dans le monde méditerranéen traditionnel, la prédilection pour le « vivre entre soi » auquel s’ajoute une ségrégation marquée entre les sexes, « un certain idéal de brutalité virile, dont le complément est une dramatisation de la vertu féminine », poursuit Germaine Tillion (1966). La Méditerranée, c’est aussi un monde de structures clientélaires, avec ses patrons et ses obligés, dans de vieilles sociétés étatiques où des relais s’imposent, à tous les sens du terme, entre le peuple et les pouvoirs; parallèlement, dans l’univers sacré, les intermédiaires, les saints, ne manquent pas entre les fidèles et la divinité ; ils sont nombreux, y compris en islam où leur culte est controversé. La violence avec ses pratiques vindicatoires (vendetta corse, disamistade sarde, gjak albanais, rekba kabyle…) fait aussi partie du hit-parade anthropologique des caractéristiques méditerranéennes et les auteurs analysent les moyens mis en œuvre pour sortir de ces conflits (Black-Michaud, 1975). Enfin, comment ne pas évoquer une communauté de comportements religieux, en particulier les lamentations funèbres, les dévotions dolorisantes autour des martyrs ? L’« inflation apologétique du martyre » est ainsi un trait commun au christianisme et à l’islam chiite pratiqué au Liban. La commémoration des martyrs fondateurs, dans le christianisme comme en islam chiite, donne lieu à des rituels d’affliction de part et d’autre de la Méditerranée. C’est en terre chrétienne la semaine sainte, avec ses spectaculaires processions de pénitents en Andalousie, ou, en Calabre, ces cérémonies où les hommes se flagellent les mollets et les cuisses jusqu’au sang. Au Liban les fidèles pratiquent, lors des processions et des prônes qui évoquent les tragiques événements fondateurs, des rituels dolorisants : ils se flagellent avec des chaînes, se frappent la poitrine avec les paumes des mains, voire se lacèrent le cuir chevelu avec un sabre. Dans le monde chrétien comme en islam chiite, des pièces de théâtre (mystères du Moyen Âge, ta’zie) ont été composées pour représenter le martyre du sauveur. Rituels chiites et chrétiens présentent donc un air de famille (Bromberger, 1979). Cette sensibilité au martyre dans les traditions religieuses méditerranéennes est à l’arrière-plan des manifestations laïques qui célèbrent les héros locaux ou nationaux tombés pour la juste cause. C’est le cas en Algérie. Toutes ces remarques peuvent paraître bien réductrices et caricaturales, éloignées des formes de la vie moderne et de la mondialisation qui l’enserre. Ne s’agit-il pas d’une Méditerranée perdue ? Les auteurs cependant nuancent leurs analyses et les insèrent dans le contexte spécifique où elles prennent sens. Dans leur généralité, elles offrent, malgré tout, une base de départ, un cadre comparatif et évolutif. Après une période faste, couronnée par un ouvrage de synthèse récapitulant les acquis (Davis, 1977), vint le temps des remises en cause. Plusieurs anthropologues (dont Michael Herzfeld, 1980, Josep Llobera,1986, Joao de Pina-Cabral,1989…) critiquèrent de façon radicale l'érection de la Méditerranée en « regional category » en fustigeant le caractère artificiel de l'objet, créé, selon eux, pour objectiver la distance nécessaire à l'exercice légitime de la discipline et qui s'abriterait derrière quelques thèmes fédérateurs fortement stéréotypés. À ces critiques virulentes venues des centres européens ou américains de l’anthropologie, se sont jointes celles d'ethnologues originaires des régions méditerranéennes, pour qui la référence à la Méditerranée est imaginaire et suspecte, et dont les travaux sont ignorés ou regardés de haut par les chercheurs formés à l’école britannique. Ce sentiment négatif a été d’autant plus accusé sur les rives méridionale et orientale de la Méditerranée que la mer qui, à différentes périodes, reliait est devenue un fossé aussi bien sur le plan économique que politique. Diverses initiatives et prises de position scientifiques ont donné un nouvel élan, dans les années 1990-2000, à l’anthropologie de la Méditerranée. Colloques et ouvrages (par exemple Albera, Blok, Bromberger, 2001) rendent compte de cette nouvelle conjoncture. On se garde désormais plus qu’avant de considérer le monde méditerranéen comme une aire culturelle qui présenterait, à travers le temps et l’espace, des caractéristiques communes stables. Au plus parlera-t-on d’un « air de famille » entre les sociétés riveraines de la mer en raison de contextes écologiques similaires, d’une histoire partagée, de la reconnaissance d’un seul et même Dieu. Cette perspective mesurée rejoint le point de vue de Horden et Purcell (2000), auteurs d’un ouvrage important tirant un bilan critique de l’histoire du monde méditerranéen. Pour eux, qui combinent points de vue interactionniste et écologique, la Méditerranée se définit par la mise en relation par la mer de territoires extrêmement fragmentés, par une « connectivity » facilitée par les Empires. Le titre énigmatique de leur livre, The Corruptive Sea, « La Mer corruptrice », prend dès lors tout son sens. Parce qu’elle met en relation, cette mer serait une menace pour le bon ordre social et pour la paix dans les familles. Cette proximité entre sociétés différentes qui se connaissent fait que le monde méditerranéen s’offre comme un terrain idéal au comparatisme « à bonne distance ». C’est sous le sceau de ce comparatisme raisonné que s’inscrivent désormais les travaux les plus convaincants, qu’ils se réclament explicitement ou non de l’anthropologie de la Méditerranée (voir sur la nourriture Fabre-Vassas, 1994, sur la parenté Bonte éd., 1994 , sur la sainteté Kerrou éd., 1998 et les traditions religieuses, sur les migrations et les réseaux Cesari, éd., 2002, sur le cosmopolitisme Driessen, 2005) Tantôt les recherches soulignent les proximités (Albera, 2005, 2009, Dakhlia, 2008, Dakhlia et Kaiser, 2011), tantôt elles les relativisent (Fernandez Morera, 2016, Bromberger, 2018), tantôt elles insistent sur les aspects conflictuels (Chaslin, 1997). Une autre voie est de considérer le monde méditerranéen, non pas comme un ensemble fait de similarités et de proximités mais comme un espace fait de différences qui forment système. Et ce sont ces différences complémentaires, s’inscrivant dans un champ réciproque, qui permettent de parler d’un système méditerranéen. Chacun se définit, ici peut-être plus qu’ailleurs, dans un jeu de miroirs (de coutumes, de comportements, d’affiliations) avec son voisin. Les comportements alimentaires, les normes régissant l’apparence vestimentaire et pileuse, le statut des images… opposent ainsi des populations revendiquant un même Dieu (Bromberger, 2018).
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Murunga, Godwin. "0 - Editorial Samir Amin (1931-2018): A Titan has Gone Home to Rest." CODESRIA Bulletin, no. 03-04 (July 12, 2021). http://dx.doi.org/10.57054/cb03-042018211.

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The Council for the Development of Social Science Research in Africa (CODESRIA) learned with immense shock and sadness of the passing on of Professor Samir Amin on Sunday, 12th August 2018. Subsequently, Prof. Samir Amin’s body was interned at Père Lachaise in Paris on 1st September 2018 at a site provided by the French Communist Party. The Council was represented at the burial by Prof. Fatow Sow and Dr. Cherif Sy; two members of the CODESRIA community who have worked with Samir Amin for a while. For CODESRIA, this marks nothing less than the end of an era in the history of African social research given the many pioneering roles the late Professor Amin played as a scholar, teacher, mentor, friend, and revolutionary. Samir was many things to us as a Council; for the younger members of the community, it meant much more to be in his company at the numerous CODESRIA meeting he attended. A model for three generations of African and, indeed, radical scholars globally, Samir was that giant Baobab tree whose grandeur of intellect and spirit made him a worthy role model. While serving as Director of the United Nations African Institute for Economic Development and Planning (IDEP), he hosted the initial scaffolding of the CODESRIA at IDEP, brought together and nurtured new talent that laid the foundations which launched Council on a path of growth and resilience to what it is to-date. As the final note on his reflections contained in this Bulletin illustrates, while serving as CODESRIA’s founding Executive Secretary, Samir worked very closely with Abdalla Bujra and later Thandika Mkandawire, to shape the initial years of CODESRIA’s intellectual identity and trajectory. After CODESRIA relocated from the premises of IDEP to a new home in the Fann Residence part of Dakar, Samir Amin remained engaged with Council and its community of scholars, participating actively and effectively in all its activities. This 15th General Assembly of CODESRIA is perhaps the first Assembly without Samir Amin presence. In all previous General Assemblies, Samir has been a notable presence even giving the Cheikh Anta Diop Lecture at the 10 Assembly in Kampala, Uganda. It is at the General Assembly that many young academics interacted with Samir, often for the first time and indeed experiencing the awe of his presence. Though Samir is absent at the current Assembly, there is no doubt that his intellectual and revolutionary spirit is definitely present just as the thoughts and ideas that he shared so generously and to the very end will continue to inspire reflection and debate. Samir Amin’s intellectual journey was a long and illustrious one. It was a journey marked by commitments that distinguished him as a scholar of unparalleled convictions. He died still an unapologetic socialist academic or, as the title of his memoir reads, ‘an independent Marxist’ whose work was driven by an unshakeable conviction to confront and oppose totalizing economic orthodoxies. He treated this confrontation and opposition as a prelude to social transformation. He was steadfast in his belief that the world must shift away from capitalism and strive to build new ‘post-capitalist’ societies. He described capitalism as a small bracket in the long history of human civilization. His works identify and record the multiple crises of capitalism, a system he described as senile and obsolete. In its place, Samir Amin formulated a political alternative that he envisioned would proceed by i) socializing the ownership of monopolies, ii). definancializing the management of the economy and iii) deglobalising international relations [cited in Campbell, 2015: 286]. For him, these three directions provided the basis of an active politics of dismantling capitalism; a politics he committed his skill and energy mobilizing for. Even as he grew older, he mustered fresh bursts of energy to continue the struggle and to the very last days when he was in Dakar, he was apart of the team of scholar/ activists gathered together by International ENDA Third World Network to draft the Alternative Report on Africa (Dakar, 2018). CODESRIA was apart of this process and the Report will by shared at this General Assembly. Many of Samir Amin’s writings make the point repeatedly on the urgent necessity to dismantle the ‘obsolete system’ known as capitalism. However, none was as emphatic in rethinking the underlying cultural underpinning of the ‘obsolete system’ like Eurocentricism. In that engaging publication, he provided a rggesounding critique of world history as is centered around Eurocentric modernity and invites us to understand modernity as an incomplete process that, to survive its current crises, will need ‘economic, social and political reconstruction of all societies in the world.’ Embedded in this argument is a long held position about the importance of the Bandung moment (1955) as a moment of an alternative globalization based on Afro-Asian solidarity. It is from this perspective that one understands why Samir Amin emphasized the importance of China [see tribute by Sit Tsui and Yan Xiaohui in this bulletin]. Afro-Asian solidarity was the basis upon which Samir Amin located his alternative politics which also defined his towering global outlook and presence. There is no doubt that Samir Amin’s intellectual presence was defined by depth of knowledge, complexity of thought and fidelity to Marxist organising principles. There is no way of summarizing the corpus of work he produced, the revolutionary engagements he undertook and the transformative potential that led him to remain steadfast even when many others were only too happy to find a good reason to backtrack and conform. His work is enormous in volume but also in the depth of its knowledge and relevance to society. He provoked and joined debates across the globe but more importantly with comrades in Latin America and Asia, those of the dependency and underdevelopment school but also later from a South-South perspective. In CODESRIA’s flagship journal Africa Development alone, Samir Amin published twenty articles. A biodata document he shared with the Council has 24 books in English and 41 in French. He is published in English, French, Arabic, Italian, Portuguese, and Spanish to name but these few languages. In all these publications and in the various languages, Samir Amin articulated his belief in alternatives, and as indicated above, this belief remained strong even to the last month of his life on earth. Born to an Egyptian father and French mother on 3rd September 1931 in Cairo, Egypt, Samir Amin’s convictions owe much to the context of his childhood all the way from Port Said in northern Egypt to Cairo where he schooled. He spent his early life in Egypt where he attended his formative schooling before proceeding to France to pursue higher education at Institut d’Etudes Politiques de Paris (“Sciences Po”). Here, he earned a diploma in 1952 and later a PhD in 1957 at the Sorbonne. Samir later earned another diploma in mathematical statistics from L’institut national de la statistique et des etudes economiques. He had always been interested in radical thought and action from early on, noting in an interview that he already considered himself a communist in Secondary School. Even though he and his cohort did not know what communism really meant in their early childhood, they assumed it meant “equality between human beings and between nations, and it meant that this has been done by the Russian revolution.” It is not surprising that with this pedigree, Samir Amin focused in his graduate research on “The origins of underdevelopment – capitalist accumulation on a world scale” and emphasized in his work that underdevelopment in the periphery was, in large measure, due to the working of the capitalist system. He consequently underscored the need to search for socialist alternatives to liberal globalisation. Samir Amin returned to Cairo in 1957, worked briefly in Gamal Abdel Nasser’s Institute for Economic Management (1957–1960) before heading to work as an adviser in the Ministry of Planning in Mali (1960- 1963). Subsequently, Samir Amin’s intellectual life became largely internationalist in orientation, and anchored principally on the question of accumulation as key to understanding underdevelopment. He maintained the sojourn between France where he took up a Professorship in 1966 and Dakar, Senegal his adopted home where he worked for ten years, from 1970 to 1980 at IDEP. Later in 1980, he founded the Third World Forum, originally hosted at the CODESRIA Secretariat, and lent his considerable weight to the institutionalisation of ENDA and the World Forum for Alternatives. His support for revolutionary politics is marked not just in the books and papers he published but also in the lecture circuit where he spoke to audiences about the undeniable relevance of radical politics. Samir Amin’s thinking was in large measure defined by the solidarity built around the Bandung Confer- ence of 1955. This remained a critical touchstone in his work in which non-western civilisations and his- tories played an important role. Bandung, for him, inaugurated a different pattern of globalisation, the one he called ‘negotiated globalisation.’ Though not asufficientbasisforcomplete“de-linking”from‘ob- solescent capitalism’, Samir Amin saw in Afro-Asian solidarity possibilities and pathways to that delinking; the process, as he explained, by which you submit “ex- ternal relations to the needs of internal progressive so- cial changes and targets.” The notion of ‘delinking’ oc- cupied a major place in Samir Amin’s thinking and is positioned in contrast to ‘adjustment’ that was the pre- ferred approach of the Bretton Woods Institutions. As Mamdani shows elsewhere in this Bulletin, there are major problematic elements of this notion that Samir Amin continued to grapple with. But ultimately, Samir Amin noted that delinking is in fact a process that, de- pending on the societies implementing it, can be used to install graduated level of autonomous development instead of countries in the periphery remaining locked into and merely adjusting to the trends set by a funda- mentally unequal capitalist system. In Samir Amin, we found the true meaning of praxis; a thinker who insisted that his work has immediate relevance to society. His departure deprives us of the practical energy he brought to our meetings and debates; and denies radical thinkers a model around whom they found the compass that enabled them to navigate the treacherous, indeed murderous, waters of capitalism. We however are lucky to have lived in his company, to have learned from his fountain of knowledge and to have shared in the passion of his convictions. The Council plans to invigorate the value of his legacy by celebrating him during this 15th General Assembly but also beyond the confines of the Assembly. Thus, this edition of the Bulletin contains two intertwined sets of essays; all organised around Samir Amin. In the one instance, we have a selection of messages in his memory. One the other, we have a selection of essays he authored. Separately, we will re-publish all the essays he published in Africa Development in a special issue of the journal to provide them in one collection for posterity. But whichever way, and as his own reflection in the essay published in this volume and his memoirs show, CODESRIA is an inheritance that Samir Amin bequeathed the African social science community. As such, it is fitting that the Bulletin designed for the 15th CODESRIA General Assembly is also a Bulletin that publishes essays in his honour. The choice of theme for the General Assembly predates the passing on of Samir Amin. But the theme itself is one that was dear to Samir Amin. It is our pleasure therefore to present the essays contained here as essays that shed light on a life lived fully but also that open up a space to explore the unfulfilled promises of globalisation. We hope that at the end of it, this will be a fitting study in honour of our departed icon but also a commentary on the key issues the 15th General Assembly explored.

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