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Waintal, Xavier. "Le problème à N corps qui se cache derrière l’ordinateur quantique". Reflets de la physique, n.º 70 (outubro de 2021): 18–23. http://dx.doi.org/10.1051/refdp/202170018.

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Le concept d’ordinateur quantique recouvre deux réalités très différentes. Il y a d’une part de très belles expériences de physique qui se basent sur des systèmes appartenant à la nanoélectronique quantique (supraconducteurs, semi-conducteurs), l’optique quantique ou la physique atomique. D’autre part, il y a une promesse, celle que ces systèmes puissent être décrits avec grande précision par un modèle mathématique très épuré. Ce modèle est une instance d’un problème plus général, le problème quantique à N corps, que les physiciens étudient depuis des dizaines d’années. Dans cet article, nous verrons qu’envisager l’ordinateur quantique sous l’angle du problème quantique à N corps donne un éclairage utile pour comprendre à quoi il pourrait servir ou les diffi cultés liées à son élaboration.
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Gauthier, Yvon. "Vérité et vérification en logique mathématique et dans les théories physiques". Articles 9, n.º 1 (9 de janeiro de 2007): 135–45. http://dx.doi.org/10.7202/203186ar.

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Résumé Cet article propose une nouvelle approche dans l'analyse et l'interprétation des théories physiques. La théorie des modèles ou sémantique ensembliste est rejetée au profit d'une syntaxe ou théorie des démonstrations qui s'attache d'abord à la structure formelle (logique et mathématique) d'une théorie physique. On donne plusieurs exemples d'une théorie de la preuve (preuve, épreuve, appreuve), exemples qui relèvent surtout de la mécanique quantique et qui vont dans le sens de la thèse principale de l'auteur : la surdétermination de la théorie physique par sa structure mathématique.
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Yefsah, Tarik, e Clément Sayrin. "Simulation quantique avec des atomes froids. Comment manipuler et sonder des systèmes quantiques à l’échelle de l’atome individuel". Reflets de la physique, n.º 71 (janeiro de 2022): 8–15. http://dx.doi.org/10.1051/refdp/202271008.

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Les systèmes physiques à grand nombre de particules, d’une importance capitale en physique, sont incroyablement complexes. Leur comportement, en effet, « ne doit pas être compris à travers une simple extrapolation des propriétés de quelques particules. Au contraire, à chaque niveau de complexité, des propriétés entièrement nouvelles émergent (…) » (P.W. Anderson [1]). L’avènement des technologies quantiques, et tout particulièrement de la simulation quantique, permet aujourd’hui d’aborder d’une façon nouvelle et prometteuse la physique de ces systèmes à N corps en interaction. Nous présentons ici l’apport des dispositifs à atomes froids, à travers deux exemples d’expériences aujourd’hui en construction au Laboratoire Kastler Brossel.
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Marchildon, Louis. "À propos du lien entre la théorie quantique et les probabilités". Revue des questions scientifiques 192, n.º 1-2 (1 de janeiro de 2021): 93–115. http://dx.doi.org/10.14428/qs.v192i1-2.70013.

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La théorie des probabilités et la théorie quantique, l’une mathématique et l’autre physique, s’apparentent dans la mesure où chacune admet plusieurs interprétations fort différentes. Certains ont proposé que les problèmes conceptuels de la théorie quantique puissent être, sinon résolus, du moins atténués par une interprétation adéquate des probabilités. Nous montrerons plutôt, à travers un survol historique et analytique des probabilités et de la théorie quantique, que si certaines interprétations de l’une et de l’autre s’agencent particulièrement bien, aucune ne s’impose de façon unique. * * * The theory of probability and the quantum theory, the one mathematical and the other physical, are related in that each admits a number of very different interpretations. It has been proposed that the conceptual problems of the quantum theory could be, if not resolved, at least mitigated by a proper interpretation of probabilities. We rather show, through a historical and analytical overview of probabilities and quantum theory, that if some interpretations of the one and the other go along particularly well, none follows in a unique way.
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Houzet, Manuel, Julia Meyer e Pascal Simon. "Le spectre de Majorana". Reflets de la physique, n.º 61 (março de 2019): 4–10. http://dx.doi.org/10.1051/refdp/201961004.

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Pour paraphraser Karl Marx, « un spectre hante la physique : le spectre d’Ettore Majorana ». Près de 80 ans après sa disparition, les travaux du physicien italien continuent d’inspirer les chercheurs. Ainsi, dans son dernier article, Majorana prédit qu’une particule élémentaire dépourvue de charge électrique pourrait être sa propre antiparticule [1], en opposition avec la théorie de Dirac, pour laquelle une particule et son antiparticule sont distinctes. Plusieurs groupes ont récemment annoncé la découverte de quasiparticules de Majorana dans des nanostructures supraconductrices. En plus d’être leur propre antiparticule, ces quasi-particules possèdent des propriétés exotiques qui sont d’un grand intérêt pour le développement d’un ordinateur quantique topologiquement protégé.
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Caillé, Arthur. "Peut-on seulement savoir ce qu’ est le corps ?" Archives de Philosophie Tome 87, n.º 3 (21 de junho de 2023): 113–30. http://dx.doi.org/10.3917/aphi.863.0113.

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Malgré l’intérêt de Leibniz pour la physique de Huygens, leur correspondance entre 1692 et 1695 renferme plusieurs divergences révélatrices de deux ontologies différentes des corps. Selon Leibniz, les lois de Kepler peuvent être expliquées par une circulation harmonique, alors que Huygens substitue à celle-ci une pesanteur intrinsèque des corps. De plus, pour Huygens, il y a une extension dépourvue de tout corps et pourtant matérielle, ce qui n’est pas compatible avec la métaphysique de Leibniz. Enfin, Huygens explique la cohésion des corps par des atomes extrêmement durs ; Leibniz rejette de telles entités, mais complète les lois du mouvement relatif par un niveau substantiel au-delà de l’étendue.
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Sacuto, Alain, Yann Galais, Maximilien Cazayous e Sarah Houver. "La supraconductivité à haute température dans les oxydes de cuivre : où en est-on ?" Reflets de la physique, n.º 70 (outubro de 2021): 4–17. http://dx.doi.org/10.1051/refdp/202170004.

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La supraconductivité est un phénomène quantique fascinant, car les effets qu’elle produit sont visibles à l’œil nu. Bien comprise dans les métaux standard (plomb, aluminium, étain...), elle reste largement incomprise dans certains oxydes de cuivre, appelés cuprates. Cette énigme en cache une autre, celle de la phase « métallique » des cuprates, de laquelle surgit la supraconductivité. Cette phase « métallique » est étonnamment complexe. Elle héberge plusieurs ordres électroniques qui sont interconnectés. À quel type de connections sommes-nous confrontés ? Quels rôles peuvent jouer ces ordres dans l’émergence de la supraconductivité à haute température critique ? Ces questions interpellent les physiciens, car elles annoncent une nouvelle ère de la physique des matériaux, où les ordres de la matière s’entremêlent. Cet article est divisé en deux parties. La première est une introduction générale à la physique des cuprates, et la seconde est une étude avancée sur les ordres électroniques qui s’y développent en fonction de l’évolution de la topologie de la surface de Fermi.
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Driant, Anouk. "Rencontrer le corps de malades en fin de vie". Revue de psychothérapie psychanalytique de groupe 25, n.º 1 (1995): 95–104. http://dx.doi.org/10.3406/rppg.1995.1302.

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A partir d’un travail régulier en groupe, des bénévoles de plusieurs unités parisiennes de soins palliatifs sont amenés à s’interroger sur ce qu’ils ressentent au contact du corps de malades enfin de vie. Parfois saisis par l’horreur que produit le spectacle de la dégénérescence physique, parfois surpris par la violence de la vitalité sexuelle qui demeure par-delà les dégâts causés par la maladie, les bénévoles retiennent surtout de leur accompagnement la qualité des rapports de tendresse qui s’échangent avec les malades, et qui dépassent la portée des gestes thérapeutiques techniques.
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Vitrac, Richard. "La démonstration systémique des formules de Lorentz". Acta Europeana Systemica 8 (10 de julho de 2020): 225–30. http://dx.doi.org/10.14428/aes.v8i1.56383.

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Cet article est un développement de l'article "La place de l'Homme dans la crise de l'humanité". Il met en évidence que la systémique cognitive permet de justifier la démonstration faite par H. Poincaré des formules de Lorentz. Ces formules sont essentielles car ce sont elles qui sont à l'origine de la relativité. La démonstration par Poincaré s'appuie sur le postulat de la possibilité de synchroniser les horloges d'un référentiel. Au contraire, la systémique cognitive met en évidence que cette synchronicité vient du fait que les gérants de systèmes qui sont conscients d'appartenir à une structure physique, comme un train ou un avion, sont toujours synchronisés avec cette structure. Cette synchronicité, ou cette intrication, vient donc de leurs consciences et non de leurs corps physiques. Ce résultat permet de justifier la démonstration des formules de Lorenz. Surtout, il montre que la mécanique quantique et la relativité ne sont pas des sciences de la matière mais des sciences de l'information comme John Archibald Wheeler en avait eu l'intuition à la fin de sa vie. Il devient possible alors d'unifier la relativité et la mécanique quantique dans une théorie unique qui est la relativité cognitive et systémique (RCS).
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Fauché, Serge. "Hygiène de l’enfance et éducation physique. Rôles de la médecine scolaire après la première guerre mondiale (1918-1924)". STAPS 17, n.º 40 (1996): 39–54. http://dx.doi.org/10.3406/staps.1996.1059.

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Dans les années qui suivent la première guerre mondiale, la médecine scolaire mène une ardente campagne en faveur de l’hygiène des écoliers. Cette opération prend plusieurs tournures : l’assainissement des locaux et la création d’espaces réservés aux exercices du corps, l’aération de l’élève qui s’exprime dans les plaidoyers en faveur des écoles de plein air et des classes aérées, la lutte contre la scoliose déclarée «maladie scolaire», les mesures systématiques du corps de l’enfant dont il faut suivre les moindres aléas de développement. Les appels à l’organisation systématique d’une éducation physique scolaire se font pressants, avec des lignes de partage entre ce qui convient aux garçons et ce que réclame une gymnastique féminine préparant l’épouse à ses devoirs de mère au foyer. Cette croisade hygiénique constitue l’un des socles sur lesquels repose la collaboration médico-pédagogique qui marquera l’histoire de l’éducation physique pendant un demi-siècle. La force des convictions médicales doit être mise en rapport avec les contextes du temps : la campagne hygiénique s’intègre dans une lutte économique et idéologique dont dépend l’avenir de la race et de la nation françaises.
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Béa Gallimore, Rangira. "La représentation picturale pour dire l’indicible dans Génocidé de Révérien Rurangwa". Protée 37, n.º 2 (30 de outubro de 2009): 45–56. http://dx.doi.org/10.7202/038454ar.

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Cette étude est une analyse du témoignage Génocidé de Révérien Rurangwa. Rurangwa est témoin survivant du génocide des Tutsi de 1994 au Rwanda. Son corps, marqué par la main criminelle, est complètement défiguré. Après plusieurs années, son corps porte encore les cicatrices visibles et invisibles du génocide. Génocidé est un portrait physique et psychologique du survivant Rurangwa. Cet article examine d’abord le rôle joué par la photographie dans la construction d’un récit dialogué qui crée l’écoute nécessaire pour libérer sa voix suffoquée. Ce mécanisme narratif lui permet de tenter de dire l’indicible. L’article analyse également la confiscation du corps du survivant : comment il a été ethnicisé, ciblé et ensuite marqué par le regard et le discours de l’autre qui en a fait un objet. Enfin, il montre comment l’image de la photographie de famille, plus précisément celle de la mère, joue un rôle important dans la récupération du corps par son propriétaire légitime et dans sa reconstruction identitaire.
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Cailleux, Fanny. "Des chefs vulnérables ? Blessures des généraux et vertus des chefs dans l’ Histoire romaine de Tite-Live". Dialogues d'histoire ancienne S 28, Supplément28 (24 de maio de 2024): 213–24. http://dx.doi.org/10.3917/dha.hs28.0213.

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Résumé Résumé : Dans le récit de l’ Histoire romaine de Tite-Live, œuvre marquée par l’idéologie de la victoire, les exemples de généraux blessés au combat sont peu nombreux. Dès lors, les anecdotes qui montrent des chefs s’exposer au danger et recevoir une blessure sont porteuses d’un contenu idéologique précis. Le plus souvent, la blessure constitue un élément de l’héroïsation des chefs et une preuve de leur valeur militaire. Cet article montre toutefois qu’à partir du récit des guerres puniques, la blessure est présentée dans plusieurs cas comme le résultat d’une grave erreur de stratégie et d’un défaut de prudentia , susceptibles de mettre en danger la res publica tout entière. Tite-Live insiste alors sur l’analogie entre le corps physique du général et le corps de l’État et souligne les importantes conséquences politiques et militaires de la vulnérabilité des généraux romains.
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Lapaire, Jean-Rémi. "Un corps et la collaboration des arts pour interpréter les textes littéraires : la leçon de Quintilien". Cahiers du Centre de Linguistique et des Sciences du Langage, n.º 62 (10 de dezembro de 2020): 41–66. http://dx.doi.org/10.26034/la.cdclsl.2020.945.

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Dans l’Institution Oratoire (env. 93) le rhéteur et pédagogue Quintilien (env. 30-env. 100) préconise la paraphrase, l’oralisation de textes d’auteurs, ainsi que le « concours de plusieurs arts » pour éduquer les jeunes élèves au maniement habile de la langue. Si la rhétorique classique a depuis longtemps déserté les programmes de formation scolaire, le retour de la « rhétoricité » devrait inciter les pédagogues actuels à réexaminer et à adapter certains préceptes anciens à l’enseignement des langues. Notre hypothèse est que l’orchestration d’actes vivants d’interprétation de textes écrits, engageant l’entier du corps apprenant, permet de créer de réels événements d’apprentissage. Nous présentons un dispositif de compression et d’interprétation par-corps de textes complexes qui débouche sur une appropriation performative du sens. À cette occasion, les métaphores corporelles du « geste », de la « posture » ou de la « démarche » pédagogiques se voient réinvesties de la part physique qui leur revient.
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Sigward, J. M., B. Desbois, M. Jan, L. Jehel e S. Lamy. "Évaluation des séances d’acupuncture dans la prise en charge des patients toxicomanes au CHU de Martinique à l’aide des échelles visuelles analogiques". European Psychiatry 29, S3 (novembro de 2014): 531. http://dx.doi.org/10.1016/j.eurpsy.2014.09.388.

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ObjectifsL’acupuncture est une technique de plus en plus utilisée dans la prise en charge des patients consommateurs de substances. Notre étude permet d’évaluer les bienfaits subjectifs de l’acupuncture chez ces patients en utilisant les échelles visuelles analogiques (EVA) avant et après les séances.MéthodesCes évaluations ont été proposées à l’ensemble des patients venus faire une séance d’acupuncture (auriculothérapie ou corps entier) durant les mois de juillet 2012 et mai 2013. Ils ont côté sur une échelle entre 0 et 10 leur fatigue, bien-être, stress/anxiété, détente, douleur physique avant et après les séances.RésultatsCent quatre vingt-quatre fiches anonymes avant/après ont été analysées. Cinquante sujets ont participé. Au niveau déclaratif : 24,5 % d’abstinents, 22,2 % en sevrage, 40,2 % consomment régulièrement une ou plusieurs substances (42 % alcool, 58 % de tabac, 20 % de crack, 38 % de cannabis). Les bienfaits ressentis sont multiples dans les jours qui suivent une séance : 64 % ont un meilleur sommeil, 48 % moins anxieux, 54 % disent avoir moins envie de consommer, 16 % remarquent une meilleure gestion de leurs émotions. L’ensemble des patients ont rapporté une diminution de leurs anxiété/stress (p = 0,0001), sensation de fatigue (p = 0,001) et douleur physique (p = 0,0001). Ils signalent également une amélioration de leur détente (p = 0,001) et de leur bien-être (p = 0,001). Nous avons également observé que les effets de l’acupuncture semblent être supérieurs chez les patients consommateurs par rapport aux patients qui déclarent être abstinents et que les bienfaits étaient supérieurs avec l’acupuncture corps entier versus auriculothérapie.ConclusionDans notre population, les séances d’acupunctures semblent améliorer les ressentis des patients dans plusieurs domaines. L’étude se poursuit afin de mieux étudier non seulement les biais liés à la relaxation et aux croyances magico-religieuses mais aussi en étudiant différents paramètres objectifs comme la diminution de la consommation.
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Rénier, Alain. "Le rôle du parcours". Protée 33, n.º 2 (31 de agosto de 2006): 19–30. http://dx.doi.org/10.7202/012289ar.

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Résumé L’étude de l’espace architectural par le mode d’exploration du parcours permet de comprendre les interactions existantes entre des corps appartenant à trois ordres distincts : l’espace bâti et son milieu physique interne, les acteurs présents et agissant en lui, les multiples objets et dispositifs d’usage qu’il contient. Il est toutefois trop simple de considérer seulement ces trois types de corps dans leur plénitude actorielle. La recherche poursuivie depuis plusieurs décennies a permis de montrer que l’interactivité manifestée par ces corps est à considérer non pas sur le plan de leur interactorialité, mais sur celui de leur interactantialité. La mise en évidence de celle-ci provient de la déconstruction de ces corps par l’analyse des programmes actantiels dans lesquels ils sont imbriqués. Le mode d’exploration de cette interactivité par l’analyse des parcours relatifs à ces programmes actantiels permet de comprendre comment cette interactantialité produit réellement les configurations abstraites des lieux de vie qui interfèrent dans l’espace habité. Certains éléments concrets de ces configurations abstraites de lieux forment ensemble les constellations de points remarquables prégnants. Ces constellations accompagnent les habitants et citadins tout au long de leurs parcours. Elles se transforment au rythme des séquences de leur déplacement, constituant leur véritable environnement significatif, sans cesse renouvelé.
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Werren, May, e Cherine Fahim Fahmy. "Une revue narrative sur l’insula : Gardienne de la relation corps-cerveau ?" Cortica 3, n.º 1 (20 de março de 2024): 413–60. http://dx.doi.org/10.26034/cortica.2024.4852.

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Cet article propose une revue narrative exhaustive sur l'insula, une région cérébrale complexe et stratégiquement située, et son rôle central dans les interactions corps-cerveau-comportement. Il souligne l'importance de l'insula dans la perception interne (intéroception), le traitement émotionnel et cognitif, ainsi que dans diverses fonctions neuropsychologiques. L'article évoque l'histoire de la découverte de l'insula, sa structure unique, ses connexions tentaculaires avec d'autres régions cérébrales, et son implication dans des fonctions sensorimotrices, émotionnelles, sociales, et cognitives. Il aborde également le rôle de l'insula dans la régulation émotionnelle, mettant en lumière son interaction avec le cortex préfrontal ventromédian et le cortex temporo-pariétal. La revue se concentre sur l'impact de l'insula dans divers troubles psychiques tels que la dépression, les troubles alimentaires, le syndrome de stress post-traumatique, et les troubles du spectre autistique, suggérant que les dysfonctionnements de l'insula peuvent être un dénominateur commun à plusieurs pathologies mentales. Des approches thérapeutiques innovantes, telles que la méditation de pleine conscience et le neurofeedback par IRMf, sont discutées comme moyens potentiels d'améliorer la fonctionnalité de l'insula et de traiter les troubles associés. L'article souligne l'importance cruciale de poursuivre la recherche sur l'insula pour mieux comprendre son rôle dans la santé mentale et physique, ainsi que pour développer des stratégies thérapeutiques ciblées. En résumé, cette revue narrative offre une perspective complète sur l'insula, mettant en évidence son rôle pivot dans l'intégration des processus corporels, émotionnels et cognitifs, et son potentiel en tant que cible thérapeutique dans le traitement des troubles psychiques.
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Levin, Laura. "Environment Affinities: Naturalism and the Porous Body". Theatre Research in Canada 24, n.º 1 (janeiro de 2003): 171–86. http://dx.doi.org/10.3138/tric.24.1.171.

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Cet article examine l’expérimentation avec la forme naturaliste que l’on retrouve dans les pièces de Judith Thompson. L’auteur suggère plusieurs moyens par lesquels Thompson radicalise l’esthétique naturaliste et expose les aspects du genre qui sont habilitants sur le plan politique. L’oeuvre de Thompson fait ressortir les affinités refoulées entre le naturalisme et le surréalisme, deux mouvements qui mettent à l’épreuve les limites poreuses de l’égo et de l’environnement. Raymond Williams y voyait une caractéristique clé du naturalisme de haute intensité dans lequel l’environnement «sature» la vie des personnages. Les pièces de Thompson donnent une forme littéraire à ce naturalisme «imprégné» à l’excès en présentant des personnages qui deviennent sursaturés sur le plan linguistique et physique par leur environnement. Explorant les possibilités de la «représentation du terrain» en faisant du corps une co-extension de son entourage matériel, Thompson imagine une autre éthique de la rencontre entre le soi et le monde. En même temps, elle complique l’acte de la représentation du terrain en montrant comment la figure féminine est devenue synonyme de l’espace lui-même.
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Baldi, Rossella. "Appréhender un nouvel instrument scientifique : l’exemple du chronomètre de poche à la fin du 18 e siècle". Dix-huitième siècle 56, n.º 1 (25 de abril de 2024): 97–110. http://dx.doi.org/10.3917/dhs.056.0097.

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L’émergence de la chronométrie à l’âge des Lumières fait l’objet de révisions historiographiques depuis plusieurs années. Elles ont mis en évidence l’importance de considérer l’histoire des garde-temps et de leur diffusion en mer et sur terre en dehors du déterminisme technologique et des lectures hagiographiques qui, aujourd’hui encore, caractérisent l’histoire horlogère. Notre contribution montre la complexité des processus de compréhension du fonctionnement de ces instruments par les communautés scientifiques auxquelles ils sont destinés. Dans une perspective user-oriented , il se penche donc sur le cas des chronomètres de poche manufacturés à la fin du 18 e siècle par l’atelier londonien de Josiah Emery. L’étude des sources relatives à ces artefacts, ainsi que la reconstitution de leurs biographies permet de mettre en évidence les paramètres divers en jeu lors de la manipulation physique d’une montre de précision. De la langue aux gestes de la culture artisanale, du corps de l’usager à ses émotions, le chronomètre se situe en effet à la croisée de dynamiques sociales, économiques, politiques, intellectuelles et matérielles qui participent chacune à la fabrication de la science.
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Tkachuk, Michelle, e Shelly Russell-Mayhew. "Health and Weight Beliefs and Behaviours of Pre-Service Teachers: Considerations and Implications for a Health Promotion Perspective in Teacher Education". Alberta Journal of Educational Research 63, n.º 3 (11 de dezembro de 2017): 286–303. http://dx.doi.org/10.55016/ojs/ajer.v63i3.56301.

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This project explored primary and secondary pre-service teachers’ (i.e., bachelor of education [B.Ed.] students) beliefs about health behaviours as well as health and weight during their university education at a large research-intensive university in Alberta. Although many studies claim that there is a need for teacher education in the areas of health and weight, recommendations for what such curricula might include are lacking. The present study was conducted with 226 pre-service teachers. Data included participants’ self-reported height, weight, body satisfaction, health promoting behaviours, implicit weight bias, and current weight loss and muscle gain attempts. Results suggest many pre-service teachers have concerns about their weight and shape, and exhibit weight bias. Teacher education focusing on body satisfaction, weight bias, exercise behaviour, and stress management may be beneficial for pre-service teachers to better prepare them to instruct about as well as model health attitudes and behaviors to their future students. Ce projet a exploré les croyances de stagiaires au primaire et au secondaire (c.-à-d. des étudiants au Baccalauréat en Éducation) sur les comportements liés à la santé, la santé et le poids pendant leur parcours dans une grande université albertaine centrée sur la recherche. Si plusieurs études affirment que les enseignants doivent être formés dans le domaine de la santé et du poids, les recommandations quant à ce que pourrait inclure une telle formation sont inexistantes. L’étude, réalisée auprès de 226 stagiaires, a demandé aux participants de fournir des données relatives aux éléments suivants : taille, poids, satisfaction à l’égard de leur corps, comportements favorables à la santé, partialité implicite envers les gens présentant un excès de poids, perte de poids actuelle et tentatives d’augmenter la masse musculaire. Les résultats indiquent que plusieurs stagiaires sont préoccupés par leur poids et la forme de leur corps, et qu’ils montrent un préjugé face aux personnes avec de l’embonpoint. Une formation qui porterait sur la satisfaction à l’égard de son corps, la partialité envers les gens présentant un excès de poids, les comportements liés à l’exercice physique et la gestion du stress pourrait s’avérer bénéfique pour les stagiaires, qui seraient ainsi mieux préparer pour enseigner à leurs élèves des attitudes et des comportements liés à la santé, et pour en être de bons modèles.
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Wagener, Albin, e Mariane Gazaille. "Art des langues et art du rythme : Pour un enseignement physique et musical des langues vivantes". Voix Plurielles 10, n.º 2 (28 de novembro de 2013): 31–42. http://dx.doi.org/10.26522/vp.v10i2.839.

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Parfois, l’enseignement des langues semble oublier que les langues sont vivantes et qu’elles obéissent à des rythmes précis. Avant que d’être écrites, les langues sont parlées et impliquent plusieurs éléments physiques : cordes vocales, appareil phonatoire, muscles, mais également le corps entier pour les dimensions paraverbales et non verbales (Cosnier & Brossard, 1984). La question qui se pose dès lors est « comment favoriser l’articulation des dimensions verbale, paraverbale et non-verbale chez l’apprenant d’une langue seconde ou étrangère ? » Pour ce, il convient d’apporter une attention particulière au contexte systémique d’émergence des langues et de leurs rapports écologique et social au monde (Mühlhäusler, 2003). Nous inspirant des pratiques théâtrales (Tabensky, 1997), nous proposons ici une vision intégrative de l’enseignement des langues vivantes basée sur la musicalité de la parole, les gestes, la posture et les actions langagières afin de porter l’accent sur la dimension communicative (Meunier, 2003) et émotionnelle (Frijda, 2003) inhérente aux langues vivantes. Language, Rhythm and Art: Towards a Physical and Musical Approach to Language Teaching Language teaching sometimes sets aside the fact that languages are living entities, submitted to precise rhythms. Since languages are alive, they are spoken before being written and rely on physical elements: vocal cords, sound production apparatus, muscles and also the entire body, in the case of paraverbal and nonverbal dimensions (Cosnier & Brossard, 1984). The question that now arises is that of the articulation of the verbal, paraverbal and non-verbal dimensions for the second or foreign language learner. In order to do so, it is necessary to take the systemic context of emergence of languages and their ecological and social relations to the world (Mühlhäusler, 2003) into consideration. Drawing on theatre practices (Tabensky, 1997), we thus wish to submit a comprehensive perspective of language teaching based on the musicality of speech, gestures, postures and speech acts in order to underline the communicative (Meunier, 2003) and emotional (Frijda, 2003) dimensions of languages.
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Gamba Kresh, Tilia. "Le geste comme vecteur d'apprentissage en classe de langue étrangère : vers un apprentissage incarné et multimodal de la langue". Verbum et Lingua, n.º 18 (30 de junho de 2021): 109–28. http://dx.doi.org/10.32870/vel.vi18.163.

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Le mouvement est notre premier enseignant, l’humain apprend par le geste et ce, dès sa naissance. Pourtant, on remarque encore aujourd’hui que la majorité des apprenants en classe de langues que l’on appelle « vivantes », « apprennent » une langue étrangère, assis à leur bureau durant plusieurs heures. La langue qui est censée être utilisée pour communiquer, échanger, s’exprimer… est extraite de son contexte et de sa dimension corporelle, complètement théorisée pour être retransmise à des êtres statiques. Dans la présente contribution, nous nous intéressons au lien qu’entretiennent gestes et parole ainsi qu’au processus cognitif impliquant la corporéité nous menant vers de potentielles propositions didactiques en langues étrangères incarnées où la gestuelle aurait toute sa place et où l’apprenant deviendrait maitre de son apprentissage par l’intégration physique de la langue par un processus cognitif situé. Notre réflexion se nourrit entre autres de théories telles que les neurones miroirs (Rizzolati et Sinagaglia, 2008), la cognition incarnée (Varela, Thompson, Rosch et Alva,1993, Lakoff, 1999, 2000), la multimodalité (Coletta, 2004, 2005, Azaoui, 2014) ou l’éducation kinesthésique (Dennison,2010) issues des domaines des sciences cognitives, de la didactique des langues et de la psychologie cognitive. Nous tentons de répondre aux questions suivantes : Quelle relation entretiennent le geste et la cognition ? La prise en compte du corps et plus particulièrement de la gestualité peut-elle être utilisée à des fins pédagogiques ? Quels bénéfices d’ordre cognitif peut apporter l’intégration de la gestualité dans l’apprentissage d’une langue étrangère ?
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Traversi, Bruno, e Bernard Andrieu. "Le mandala comme espace originel, du dessin à la danse, selon C. G. Jung". Déméter, n.º 7 | Hiver (1 de dezembro de 2021). http://dx.doi.org/10.54563/demeter.460.

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Jung découvre les mandalas à travers une pratique personnelle lors de laquelle il explore l’autonomie de l’inconscient : le mandala qu’il dessine spontanément lui permet à la fois de se connaître et de se transformer. Il forme alors l’hypothèse que la spontanéité du mouvement de la main rend visible « l’archétype d’ordre », qui est au fondement de l’inconscient. Autrement dit, l’archétype d’ordre remonte (de l’inconscient au conscient) à travers le corps pour se rendre visible, sous la forme d’images archétypiques dynamiques. Sa pratique gestuelle du mandala le conduit à découvrir l’existence d’un autre centre que le moi (centre du conscient), un centre de la totalité (du conscient et de l’inconscient), le Soi. Dans Psychologie et alchimie, il présente le lien entre le processus d’individuation, l’Imagination active et la formation spontanée et progressive des mandalas, à partir d’une série de 400 rêves de Wolfgang Pauli, l’un des pères de la physique quantique. Par ailleurs, Jung observe que certains de ses patients ne dessinent pas les mandalas, mais les dansent : le mandala est alors extériorisé à travers le corps tout entier et reconfigure ainsi l’espace dans lequel s’inscrit le sujet. L’espace vécu n’est plus alors isotrope, il est différencié, orienté et structuré. Une pratique du type danse de mandala se trouve chez le Japonais Morihei Ueshiba, pratique que nous avons pu étudier et réitérer en atelier afin de décrire comment se produit l’émergence du mandala à travers le corps, du corps vivant au corps vécu, et comment elle modifie le rapport que le danseur entretient avec lui-même, avec l’espace et avec autrui. Le mandala constitue un objet « neutre », un tiers médiateur qui dépasse les dualités monde intérieur/monde extérieur, physique/psychique, moi/autrui. L’espace structuré du mandala qui s’impose aux sujets apparaît comme un espace originel où sont encore indifférenciés le monde intérieur et le monde extérieur.
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"Représentation de l’Enfermement dans la Littérature Marocaine d’Expressions Françaises Approche de Cette Aveuglante Absence de Lumière de Tahar Ben Jelloun". Jordan Journal of Modern Languages and Literatures 15, n.º 2 (junho de 2023): 729–39. http://dx.doi.org/10.47012/jjmll.15.2.19.

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Le concept d’enfermement est d’autant plus important à étudier, dans ce sens, beaucoup des œuvres étudiées présentent sans doute le héros comme symbole de la lutte contre l’infranchissable de son vécu. L’enfermement se manifeste dans plusieurs circonstances à savoir le (mental, physique, psychologique, collectif et individuel). L’enfermement physique se voit dès les premières lignes de ces œuvres ou l’individu est cerné par un espace physique et psychologique. Le type d’incarcération le plus fréquent est celui de la séquestration physique. Cette œuvre traite presque vingt ans d’emprisonnement dans un moule de témoignage romantique, ou il présente les souffrances des détenus dans des conditions inhumaines. Cet espace d’isolement n’est pas une place géographique que l’auteur introduit au sein de son histoire, mais c’est une représentation révélatrice à travers laquelle nous pouvons révéler la conscience psychologie et le moral des personnages, ainsi de nous renseigner sur une époque historique particulière. Mots-clés : Littérature Carcérale, Prison, Espace, Corps, Froid.
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Massin, Marianne. "Suspens et suspensions. Variations sur la grâce et la pesanteur dans la photographie et la performance contemporaine". Déméter, n.º 9 (4 de maio de 2023). http://dx.doi.org/10.54563/demeter.1024.

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La grâce peut être opposée à la pesanteur, comme à la causalité des règles naturelles. Si l’on suit Simone Weil (La Pesanteur et la grâce) cette pesanteur n’est pas seulement physique et physiologique, elle peut être aussi intellectuelle et psychique. En infléchissant cette idée dans une autre perspective, puisqu’on passera de la sphère religieuse à la sphère esthétique et artistique, l’article s’intéressera à cette relation centrale entre grâce et pesanteur, en prenant appui sur des propositions artistiques et en la pensant de plusieurs manières. Il fera droit à ces moments particuliers où un corps paraît s’affranchir de ces pesanteurs (physiques, et aussi peut être symboliques). Certes dans la fluidité de leur mouvement, le saut ou l’envol peuvent avoir quelque chose de gracieux, mais on retiendra plus encore, le moment saisi « en vol », où s’abolissent direction et vectorisation. Instant de grâce, instant de suspens. Poursuivant l’enquête, on invitera alors à dialectiser cette opposition entre grâce et pesanteur pour suggérer que la grâce peut naître, non de l’arrachement à la pesanteur, mais du jeu avec elle dans l’art de la suspension.
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Fournier-Charrière, É., e P. Dusser. "Douleurs musculosquelettiques diffuses chez l’enfant et l’adolescent : faut-il parler de fibromyalgie ?" Douleur et Analgésie, 2020. http://dx.doi.org/10.3166/dea-2020-0135.

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Les douleurs musculosquelettiques diffuses chroniques touchant plusieurs régions du corps sont fréquentes chez l’enfant et l’adolescent et peuvent parfois devenir chroniques. Dans ce cas faut-il évoquer le diagnostic de syndrome fibromyalgique juvénile (SFMJ) ? Quelques rares équipes ont décrit depuis 1985 de petites cohortes de SFMJ, où les douleurs diffuses entraînant un retentissement sur la qualité de vie sont associées comme chez l’adulte à la fatigue, la dépression, les céphalées, le syndrome de côlon irritable et à l’examen, la présence de points douloureux (symptôme qui ne figure plus dans les critères diagnostiques). Sa prévalence se situe entre 1,2 et 6,2 %. Le contexte de cette douleur fonctionnelle dite nociplastique (par abaissement du seuil de perception de la douleur) comporte des facteurs de susceptibilité intrinsèques (sexe, hyperlaxité, seuil de sensibilité à la douleur, etc.) et extrinsèques (contexte sociofamilial, traumatisme physique et/ou psychique, etc.). Le SFMJ a un impact important sur la scolarité et nécessite une prise en charge multimodale combinant des thérapies physiques, comportementales et psychothérapeutiques. L’évolution dans le temps semble variable. Parallèlement, de nombreuses équipes décrivent des enfants et adolescents souffrant de douleurs musculosquelettiques chroniques diffuses et inexpliquées comportant les mêmes caractéristiques. Pourtant, l’analyse de la littérature sur le SFMJ, réalisée lors d’une expertise coordonnée par l’Inserm, ne permet pas d’identifier, à ce jour, des critères objectifs le distinguant d’autres formes de douleurs chroniques diffuses chez les enfants/adolescents. Il est donc recommandé en France comme en Allemagne de ne pas utiliser ce diagnostic chez l’enfant/adolescent souffrant de douleurs musculosquelettiques chroniques.
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Ghoul Samson, Jacques, e Philippe Bonfils. "L’expérience communicationnelle immersive dans WoW, entre présence et engagement". Formes et dynamiques d'attention, de présence et d'engagements 7, n.º 1 (11 de julho de 2018). http://dx.doi.org/10.25965/interfaces-numeriques.3304.

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Cet article a pour objectif de discuter d’un point de vue communicationnel la notion d’équilibre dans les environnements immersifs. Il s’agit de tenter de cerner un des aspects complexes des expériences vécues par les utilisateurs de ce type d’environnements dans des situations plutôt ludiques typiques des jeux vidéo. Les auteurs questionnent cette notion en articulant leur réflexion autour des couples théoriques engagement-distanciation et présence-attention (voire hyper-attention). Ils s’appuient pour cela sur des travaux antérieurs qui ont tenté de saisir et de conceptualiser la complexité de ces expériences communicationnelles particulières (Bonfils, 2014 ; 2015), et dans le même temps de relire ces questionnements à l’épreuve d’un terrain (World of Warcraft) investigué actuellement par l’un des deux auteurs. Le constat de départ porte sur le fait que les expériences vécues par les utilisateurs en immersion nécessitent de leur part de produire des efforts cognitifs importants pour vivre pleinement ces situations. En effet, les environnements immersifs conçus aujourd’hui par les designers et les développeurs sont de plus en plus riches visuellement et proposent de plus en plus d’interactions sophistiquées qui permettent aux utilisateurs d’utiliser de manière croissante leur corps ou sa projection (en l’occurrence son avatar) entre espaces physique et numérique. L’idée avancée alors par les auteurs consiste à faire l’hypothèse que ces utilisateurs en quête de flow (Csikszentmihalyi, 2008) et de plaisirs sensibles sont en proie à des conflits récurrents entre les activités de perception et les modes d’actions possibles liés aux activités de production. Il en résulte de fait une quête constante et souvent inconsciente pour les utilisateurs d’équilibre, d’engagement, de distanciation et d’auto-régulation au sein de plusieurs sphères, à l’articulation de différents espaces.
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Williams, Nyanda Mkamwa. "Les vaccinations obligatoires et les droits de l’homme en Afrique: l’urgence d’un encadrement juridique efficace au sein de l’Union africain". African Human Rights Yearbook / Annuaire Africain des Droits de l’Homme 6, n.º 1 (4 de outubro de 2023). http://dx.doi.org/10.29053/2523-1367/2022/v6a5.

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Depuis plusieurs décennies, la vaccination est le mécanisme de prévention le plus répandu des maladies infectieuses. Les vaccins sont des médicaments destinés à prévenir de nombreux risques, afin de permettre à la personne humaine de jouir d’un meilleur état de santé. Dans cette logique de promotion de la santé individuelle et surtout collective, des vaccins sontimposés aux nourrissons, ou aux personnes de tout âge. Dans la quasitotalité des pays de l’Union africaine, on retrouve des vaccins obligatoires. Pourtant, en vue de la protection du droit à la vie, du droit à l’intégrité physique consacrés par l’article 4 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, le corps humain est inviolable. Toute personne, tout patient, devrait avoir le droit de consentir de manière éclairée, personnellement ou par son représentant, à un médicament, à une thérapie, qu’elle soit préventive ou curative. Dès lors, ces vaccinations obligatoires sont-elles conformes au système de protection des droits humains de l’Union africaine? Avec la persistance de la COVID-19 devenue pandémie mondiale et les nombreux débats controversés au sujet des vaccins proposés contre cette maladie, la question des vaccins obligatoires mérite d’être profondément prise en compte par l’Union africaine, pour une protection optimale des droits humains en Afrique. Si les vaccinations obligatoires constituent des atteinteslégitimes mais implicites dans le système de protection des droits humains de l’Union africaine, il est urgent de procéder à un meilleur encadrement juridique de cette pratique, pour une protection plus efficace des droits humains en Afrique. Cette étude s’est appuyée sur la dogmatique juridique, c’est-à-dire l’analyse minutieuse des normes juridiques de l’Union africaine et la casuistique qui permet d’appréhender la mise en œuvre de ces normes pour aboutir à cette conclusion.
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Keidy Alejandra, Alvarado Puentes. "“Enseñanza y aprendizaje de aspectos fundamentales de Física Cuántica en la escuela secundaria colombiana a partir del enfoque de Feynman"". RIDAA Tesis Unicen, 29 de outubro de 2021. http://dx.doi.org/10.52278/2899.

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Esta Tesis doctoral, forma parte de una línea de investigación que propone la Enseñanza de la Mecánica Cuántica a partir del estudio del comportamiento cuántico de los electrones y de la luz. Así, se retoma y reformula la Estructura Conceptual Propuesta para Enseñar el comportamiento de los electrones a partir del enfoque Path Integrals propuesto originalmente por el Físico Richard Feynman y desarrollado por el equipo de investigación (Fanaro, 2009). A partir de ésta se rediseñan y adaptan un conjunto de situaciones, considerando los obstáculos detectados en implementaciones previas. Se propone una reformulación didáctica a la secuencia, incorporando un conjunto de simulaciones informáticas desarrolladas con plantilla de cálculo que permite a los estudiantes una forma de interacción con las situaciones, en la que se visualizan los cálculos, así como la presentación gráfica de las variables de la técnica. También se proponen nuevas situaciones para abordar el obstáculo que se presentó en el cálculo de la probabilidad en forma cualitativa en las implementaciones previas, con nuevas situaciones como lo son el cálculo de la probabilidad para distintos eventos, una situación con un electrón libre y en otra con un electrón como si estuviera en un “billar cuántico”. Por otra parte, se incluyen dos nuevos eventos acerca del cálculo de la probabilidad para canicas: una para canica libre y otra para una canica en un billar, con el objetivo de ayudar a la conceptualización de la transición cuántico -clásica (conocido como principio de correspondencia de la Física cuántica). Esta reformulación de la secuencia se realizó en forma paralela a su análisis didáctico en el que se preveían y explicitaban las conceptualizaciones que se esperaba que los estudiantes realizaran, es decir, su acercamiento al conocimiento científicamente aceptado. La secuencia didáctica fue implementada en cuatro cursos de física de un colegio público perteneciente a la Secretaría de Educación del Distrito -Bogotá, durante los años 2016 y 2017, con 118 estudiantes del último nivel de bachillerato. Los registros se originaron a partir de las respuestas a las situaciones, junto con una bitácora que la investigadora realizó clase a clase. El proceso de categorización de los datos se llevó a cabo a posteriori de la implementación, con base en el marco didáctico adoptado a partir del análisis de las resoluciones realizadas por los estudiantes, utilizando la teoría de Vergnaud (1990). El análisis de la conceptualización se desarrolló por medio de varios estudios así: un análisis univariado descriptivo de las diecisiete categorías, un análisis correlacional (análisis bivariado), un análisis multivariado de correspondencias múltiples, y finalmente un análisis textual de las síntesis realizadas por los estudiantes. Los resultados de este trabajo permiten concluir que la secuencia resultó viable en la escuela secundaria colombiana con resultados favorables en la conceptualización de nociones cuánticas, siendo detectados como principales obstáculos en la conceptualización, la manipulación de la técnica de cálculo de probabilidad propuesta y la interpretación del modelo de la función de probabilidad para canicas. Otro factor que incidió en la conceptualización fue la familiaridad del profesor con la secuencia didáctica, evidenciado en resultados más favorables en la conceptualización en la segunda implementación. A partir de los resultados encontrados, se reformula la secuencia a manera de sugerencia para el desarrollo de futuras implementaciones y se destaca el papel del docente y su experticia como uno de los principales factores que inciden en el desarrollo de la secuencia. This doctoral thesis is part of a line of research that proposes the Teaching of Quantum Mechanics from the study of the quantum behavior of electrons and light. Thus, the Proposed Conceptual Structure to Teach the behavior of electrons is retaken and reformulated from the Path Integrals approach originally proposed by Physicist Richard Feynman and developed by the research team (Fanaro, 2009). Based on this, a set of situations are redesigned and adapted, considering the obstacles detected in previous implementations. A didactic reformulation of the sequence is proposed, incorporating a set of computer simulations developed with a calculation template that allows students a form of interaction with the situations, in which the calculations are visualized, as well as the graphic presentation of the variables of The technique. New situations are also proposed to address the obstacle that was presented in the qualitative probability calculation in the previous implementations, with new situations such as the probability calculation for different events, a situation with a free electronic and in another with an electronic as if it were in a "quantum billiard". On the other hand, two new events about the probability calculation for marbles are included: one for a free marble and another for marble in a pool table, with the aim of helping to conceptualize the quantum-classical transition (known as the principle of correspondence of quantum physics). This reformulation of the sequence was carried out in parallel to its didactic analysis in which the conceptualizations that students were expected to carry out were anticipated and made explicit, that is, their approach to scientifically accepted knowledge. The didactic sequence was implemented in four physics courses of a public school belonging to the Secretary of Education of the District - Bogotá, through the years 2016 and 2017, with 118 students of the last level of high school. The records originated from the responses to the situations, together with a log that the researcher made class by class. The process of categorizing the data was carried out after the implementation, based on the didactic framework adopted from the analysis of the resolutions made by the students, using the theory of Vergnaud (1990). The analysis of the conceptualization was developed through several studies like this: a descriptive univariate analysis of the seventeen categories, a correlational analysis (bivariate analysis), a multivariate analysis of multiple correspondences, and finally a textual analysis of the syntheses made by the students. The results of this work allow us to conclude that the sequence was viable in the Colombian secondary school with favorable results in the conceptualization of quantum notions, being detected as main obstacles in the conceptualization, the manipulation of the proposed probability calculation technique and the interpretation of the model of the probability function for marbles. Another factor that influenced the conceptualization was the teacher's familiarity with the didactic sequence, evidenced by more approbative results in the conceptualization in the second implementation. Based on the found results, as a recommendation, the sequence is reformulated for future implementation's developments, and the teacher's role and expertise are highlighted as one main factor that influences the development of the sequence. Cette thèse de doctorat s'inscrit dans une ligne de recherche proposée par l'Enseignement de la Mécanique Quantique basée sur l'étude du comportement quantique des électrons et de la lumière. Ainsi, la structure conceptuelle proposée pour l'enseignement du comportement des électrons est reprise et reformulée à partir de l'approche Path Integrals initialement proposée par le physicien Richard Feynman et développée par l'équipe de recherche (Fanaro, 2009). Sur cette base, un ensemble de situations est repensé et adapté, compte tenu des obstacles détectés dans les implémentations précédentes. Une reformulation didactique de la séquence est proposée, intégrant un ensemble de simulations informatiques développées avec un modèle de calcul qui permet aux élèves d'interagir avec des situations, dans lesquelles les calculs sont visualisés, ainsi que la présentation graphique des variables de la technique. De nouvelles situations sont également proposées pour surmonter l'obstacle survenu qualitativement dans le calcul de la probabilité dans les implémentations précédentes, telles que le calcul de la probabilité pour différents événements, une situation avec un électron libre et un autre avec un électron comme s'il était dans un "pool quantique". D'autre part, deux nouveaux événements sont inclus sur le calcul de probabilité pour les billes: l'un pour une bille libre et l'autre pour un bille dans un pool, avec le but d'aider la conceptualisation de la transition quantique-classique (connue sous le nom de príncipe de correspondance de physique quantique). Cette reformulation de la séquence a été réalisée parallèlement à son analyse didactique dans laquelle les conceptualisations que les étudiants devaient effectuer, c'est-à-dire leur approche des connaissances scientifiquement acceptées, étaient prévues et expliquées. La séquence didactique a été mise en œuvre dans quatre cours de physique dans une école publique appartenant au ministère de l'Éducation du district - Bogotá, au cours des années 2016 et 2017, avec 118 élèves du dernier niveau secondaire. Les enregistrements provenaient des réponses aux situations, ainsi que d'un journal que le chercheur a fait cours par cours. Le processus de catégorisation des données a été effectué après la mise en œuvre, sur la base du cadre didactique adopté à partir de l'analyse des résolutions prises par les étudiants, en utilisant la théorie de Vergnaud (1990). L'analyse de conceptualisation a été développée à travers plusieurs études de cette façon: une analyse descriptive univariée des dix-sept catégories, une analyse corrélationnelle (analyse bivariée), une analyse multivariée de correspondances multiples et finalement une analyse textuelle des synthèses réalisées par les étudiants. Les résultats de ce travail nous permettent de conclure que la séquence était viable au niveau secondaire dans l’école en Colombie avec des résultats favorables dans la conceptualisation des notions quantiques, étant détectés comme des principaux obstacles pour la conceptualisation la manipulation de la technique de calcul de probabilité proposée et l'interprétation du modèle de fonction de probabilité pour les billes. Un autre facteur qui a influencé la conceptualisation a été la familiarité de l'enseignant avec la séquence didactique, comme en témoignent des résultats plus favorables dans la conceptualisation de la deuxième mise en œuvre. Sur la base des résultats trouvés, la séquence est reformulée comme une suggestion pour le développement de futures implémentations et le rôle de l'enseignant et de son expertise comme l'un des principaux facteurs qui influencent le développement de la séquence est mis en évidence.
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Le Breton, David. "Visage". Anthropen, 2017. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.065.

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Dans la hiérarchie morale de la géographie du corps, le visage (avec les organes sexuels) incarne la valeur la plus élevée. Toute blessure à son propos est vécue dramatiquement à la différence d’atteintes ailleurs dans le corps. On parle de défiguration pour une altération sérieuse du visage, il n’existe aucun équivalent pour les mains, les jambes, la poitrine, etc. La défiguration des traits altère la figuration sociale de l’individu (Le Breton 2014). Dans nos sociétés contemporaines en effet, le visage est le lieu de la reconnaissance mutuelle, le visage est nu et offre au jugement des autres des traits qui identifient. À travers eux nous sommes reconnus, nommés, jugés, assignés à un sexe, à un âge, une couleur de peau, nous sommes aimés, méprisés, ou anonymes, noyés dans l’indifférence de la foule. Entrer dans la connaissance d'autrui implique de lui donner à voir et à comprendre un visage nourri de sens et de valeur, et faire en écho de son propre visage un lieu égal de signification et d'intérêt. La réciprocité des échanges au sein du lien social implique l’identification et la reconnaissance mutuelle des visages, support essentiel de la communication. Dans nos sociétés individualistes, la valeur du visage s’impose là où la reconnaissance de soi ou de l'autre se fait à partir de l'individualité et non sur l'appartenance à un groupe ou à la position au sein d'une lignée. La singularité du visage répond à celle de l'individu, artisan du sens et des valeurs de son existence, autonome et responsable de ses choix. Il n’est plus l’homme ou la femme du « nous autres » comme souvent dans les sociétés traditionnelles, mais du « personnellement moi, je ». Pour que l'individu prenne socialement et culturellement sens, il faut un lieu du corps pour le distinguer avec une force suffisante, un lieu suffisamment variable dans ses déclinaisons pour signifier sans ambiguïté la différence d'un individu à un autre. Il faut le corps comme marque de la limite de soi avec le monde extérieur et les autres, le corps comme frontière de l'identité. Et il faut le visage comme territoire du corps où s'inscrit la distinction individuelle (Le Breton 2016 ; 2014). Nul espace du corps n'est plus approprié pour marquer la singularité de l'individu et la signaler socialement. « Peut-être, dit Simmel, des corps se distinguent-ils à l'œil exercé aussi bien que les visages, mais ils n'expliquent pas la différence comme le fait un visage » (Simmel 1988 : 140). De l’enfant au vieillard, d’un bout à l’autre de l’existence, demeure dans le visage un air de ressemblance, un mystère qui souligne la fidélité à soi. Le visage est signification, traduisant sous une forme vivante et énigmatique l'absolu d'une différence individuelle pourtant infime. Écart infinitésimal, il invite à comprendre le mystère qui se tient là, à la fois si proche et si insaisissable. Il demeure unique parmi l'infini des déclinaisons possibles sur un même canevas simple. L'étroitesse de la scène du visage n'est en rien une entrave à la multitude des combinaisons. Une infinité de formes et d'expressions naissent d'un alphabet d'une simplicité déconcertante : des mimiques construites par l’éclat et la direction du regard, un front, des lèvres, etc. Certes, le visage relie à une communauté sociale et culturelle par le façonnement des traits et de l'expressivité, ses mimiques et ses mouvements renvoient à une symbolique sociale, mais il trace une voie royale pour démarquer l'individu et traduire son unicité. Plus une société accorde de l'importance à l'individualité, plus grandit la valeur du visage. Sans visage pour l’identifier n’importe qui ferait n’importe quoi, tout serait égal, la confiance serait impossible, l’éthique n’aurait plus aucun sens. Un individu masqué devient un invisible, n’ayant plus de compte à rendre à personne puisque nul ne saurait le reconnaitre. Comme le dit ironiquement un personnage de Kôbô Abé, dans La face d’un autre, il « n’y aurait plus ni voleur, ni agent de police, ni agresseur, ni victime. Ni ma femme, ni celle de mon voisin ! ». Poursuivant sa rêverie, il imagine la commercialisation d’une multitude de masques, et il en déduit la subversion qui saisirait le lien social. Doté de ces masques, nul ne saurait plus qui est qui, avec même la possibilité de changer de masques plusieurs fois par jour. La notion d’individu se dissout au profit de celle de personne (persona : masque, en latin). Impossible de concevoir un monde sans visage sans l’appréhender comme un univers de chaos. Pour fonder le lien social il faut la singularité des traits pour que chacun puisse répondre de ses traits et être reconnu de son entourage. Un monde sans visage, dilué dans la multiplicité des masques, serait un monde sans coupable, mais aussi sans individus. La valeur à la fois sociale et individuelle qui distingue le visage du reste du corps se traduit dans les jeux de l'amour par l'attention dont il est l'objet de la part des amants. Il y a dans le visage de la personne aimée un appel, un mystère, et le mouvement d’un désir toujours renouvelé. Les amants peuvent ainsi se perdre dans une longue contemplation. Mais les significations qui les traversent sont inépuisables. Les yeux demeurent toujours au seuil de la révélation et se nourrissent de cette attente. Le visage parait toujours le lieu où la vérité est en imminence de dévoilement. Et sans doute, la fin d'une relation amoureuse pour un couple témoigne-t-elle aussi de la banalité mutuelle qui a saisi les visages, l'impossibilité dès lors de quêter le mystère sur les traits de l'autre. Le sacré s’est peu à peu profané au fil de la vie quotidienne, il a perdu son aura. Mais tant que l'intensité du sentiment demeure, le visage se livre à la manière d'une clé pour entrer dans la jouissance de ce qu'il est. Là où l'amour élève symboliquement le visage, la haine de l'autre s'attache à le rabaisser, à le piétiner. Parce qu’il est le lieu par excellence du sacré dans le rapport de l'homme à soi et à l'autre, il est aussi l'objet de tentatives pour le profaner, le souiller, le détruire quand il s'agit d'éliminer l'individu, de lui refuser sa singularité. La négation de l'homme passe de manière exemplaire par le refus de lui accorder la dignité d'un visage. Des expressions courantes le révèlent : perdre la face, faire mauvaise figure, ne plus avoir figure humaine, se faire casser la figure ou la gueule, etc. L'insulte animalise le visage ou le traîne dans la boue : face de rat, gueule, trogne, tronche, etc. De même le propos du raciste mondain évoquant avec complaisance le « faciès » de l'étranger, et ne pensant pas un seul instant que d’autres pourraient parler de lui dans les mêmes termes. Seul l’autre a un faciès. Ce sont là autant de procédures de destitution de l'homme qui exigent symboliquement qu'on le prive de son visage pour mieux le rabaisser. La volonté de suppression de toute humanité en l'homme appelle la nécessité de briser en lui le signe singulier de son appartenance à l'espèce, en l'occurrence son visage. L’exercice de la cruauté est favorisé par le fait d’animaliser l’autre, de le bestialiser, de le destituer de son humanité, à commencer par le fait de lui dénier un visage afin de mieux le voir comme un « pou », un « insecte », une « vermine », un « rat »... L’autre est d’une espèce radicalement étrangère et ne relève plus de la condition humaine, il n’y a plus aucun obstacle au fait de le torturer ou de le tuer. Le racisme pourrait se définir par cette négation et l'imposition d'une catégorie dépréciative qui définit par défaut tout individu à la manière d'un « type » et indique déjà la conduite à tenir à son égard (« le Juif », « l'Arabe », etc.). La différence infinitésimale qui distingue l’individu singulier et le nomme, est anéantie. Privé de visage pour dire sa différence, il se mue en élément interchangeable d'une catégorie vouée au mépris. On lui prête seulement ce masque déjà funéraire qu'est le portrait-robot, ou la caricature comme ces physiognomonies raciales qui eurent leur période de gloire lors du nazisme, mais continuent insidieusement à répandre leur prêt-à-penser. L’autre n’a plus visage humain. Il a le physique de l’emploi, comme dit l’adage populaire. Son sort en est jeté : ses dehors physiques révèlent son intérieur moral et disent dans le vocabulaire de la chair son tempérament, ses vices cachés, ses perfidies. Toute l’entreprise physiognomonique ou morphopsychologique vise à détruire l’énigme du visage pour en faire une figure, une géométrie, et finalement un aveu (Le Breton 2014). La sagacité prétendue du physiognomoniste lève le masque. Son ambition est de dégager en une formule la vérité psychologique de l'homme ou de la femme assis devant lui. Après l'avilissement du visage, il ne reste qu'à passer aux actes. Le racisme n'est jamais pure opinion, mais anticipation du meurtre qui commence déjà dans le fait de la liquidation symbolique du visage de l’autre.
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Fougeyrollas, Patrick. "Handicap". Anthropen, 2016. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.013.

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Handicap : nom commun d’origine anglo-saxonne dont l’étymologie proviendrait de Hand in Cap, une pratique populaire pour fixer la valeur d'échange d’un bien. Dans le domaine des courses de chevaux, le handicap vise à ajouter du poids aux concurrents les plus puissants pour égaliser les chances de gagner la course pour tous les participants. Il apparait dans le dictionnaire de l’Académie française dans les années 1920 dans le sens de mettre en état d’infériorité. Son utilisation pour désigner les infirmes et invalides est tardive, après les années 1950 et se généralise au début des années 1970. Par un glissement de sens, le terme devient un substantif qualifiant l’infériorité intrinsèque des corps différentiés par leurs atteintes anatomiques, fonctionnelles, comportementales et leur inaptitude au travail. Les handicapés constituent une catégorisation sociale administrative aux frontières floues créée pour désigner la population-cible de traitements socio-politiques visant l’égalisation des chances non plus en intervenant sur les plus forts mais bien sur les plus faibles, par des mesures de réadaptation, de compensation, de normalisation visant l’intégration sociale des handicapés physiques et mentaux. Ceci rejoint les infirmes moteurs, les amputés, les sourds, les aveugles, les malades mentaux, les déficients mentaux, les invalides de guerre, les accidentés du travail, de la route, domestiques et par extension tous ceux que le destin a doté d’un corps différent de la normalité instituée socio-culturellement dans un contexte donné, ce que les francophones européens nomment les valides. Dans une perspective anthropologique, l’existence de corps différents est une composante de toute société humaine (Stiker 2005; Fougeyrollas 2010; Gardou 2010). Toutefois l’identification de ce qu’est une différence signifiante pour le groupe culturel est extrêmement variée et analogue aux modèles d’interprétation proposés par François Laplantine (1993) dans son anthropologie de la maladie. Ainsi le handicap peut être conçu comme altération, lésion ou comme relationnel, fonctionnel, en déséquilibre. Le plus souvent le corps différent est un corps mauvais, marqueur symbolique culturel du malheur lié à la transgression d’interdits visant à maintenir l’équilibre vital de la collectivité. La responsabilité de la transgression peut être endogène, héréditaire, intrinsèque aux actes de la personne, de ses parents, de ses ancêtres, ou exogène, due aux attaques de microbes, de virus, de puissances malveillantes, génies, sorts, divinités, destin. Plus rarement, le handicap peut être un marqueur symbolique de l’élection, comme porteur d’un pouvoir bénéfique singulier ou d’un truchement avec des entités ambiantes. Toutefois être handicapé, au-delà du corps porteur de différences signifiantes, n’implique pas que l’on soit malade. Avec la médicalisation des sociétés développées, une fragmentation extrême du handicap est liée au pouvoir biomédical d’attribuer des diagnostics attestant du handicap, comme garde-barrière de l’accès aux traitements médicaux, aux technologies, à la réadaptation, aux programmes sociaux, de compensation ou d’indemnisation, à l’éducation et au travail protégé ou spécial. Les avancées thérapeutiques et de santé publique diminuent la mortalité et entrainent une croissance continue de la morbidité depuis la Deuxième Guerre mondiale. Les populations vivant avec des conséquences chroniques de maladies, de traumatismes ou d’atteintes à l’intégrité du développement humain augmentent sans cesse. Ceci amène l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à s’intéresser non plus aux diagnostics du langage international médical, la Classification internationale des maladies, mais au développement d’une nosologie de la chronicité : la Classification internationale des déficiences, des incapacités et des handicaps qui officialise une perspective tridimensionnelle du handicap (WHO 1980). Cette conceptualisation biomédicale positiviste situe le handicap comme une caractéristique intrinsèque, endogène à l’individu, soit une déficience anatomique ou physiologique entrainant des incapacités dans les activités humaines normales et en conséquence des désavantages sociaux par rapport aux individus ne présentant pas de déficiences. Le modèle biomédical ou individuel définit le handicap comme un manque, un dysfonctionnement appelant à intervenir sur la personne pour l’éduquer, la réparer, l’appareiller par des orthèses, des prothèses, la rétablir par des médicaments, lui enseigner des techniques, des savoirs pratiques pour compenser ses limitations et éventuellement lui donner accès à des subsides ou services visant à minimiser les désavantages sociaux, principalement la désaffiliation sociale et économique inhérente au statut de citoyen non performant ( Castel 1991; Foucault 1972). À la fin des années 1970 se produit une transformation radicale de la conception du handicap. Elle est étroitement associée à la prise de parole des personnes concernées elles-mêmes, dénonçant l’oppression et l’exclusion sociale dues aux institutions spéciales caritatives, privées ou publiques, aux administrateurs et professionnels qui gèrent leur vie. C’est l’émergence du modèle social du handicap. Dans sa tendance sociopolitique néomarxiste radicale, il fait rupture avec le modèle individuel en situant la production structurelle du handicap dans l’environnement socio-économique, idéologique et matériel (Oliver 1990). La société est désignée responsable des déficiences de son organisation conçue sur la performance, la norme et la productivité entrainant un traitement social discriminatoire des personnes ayant des déficiences et l’impossibilité d’exercer leurs droits humains. Handicaper signifie opprimer, minoriser, infantiliser, discriminer, dévaloriser, exclure sur la base de la différence corporelle, fonctionnelle ou comportementale au même titre que d’autres différences comme le genre, l’orientation sexuelle, l’appartenance raciale, ethnique ou religieuse. Selon le modèle social, ce sont les acteurs sociaux détenant le pouvoir dans l’environnement social, économique, culturel, technologique qui sont responsables des handicaps vécus par les corps différents. Les années 1990 et 2000 ont été marquées par un mouvement de rééquilibrage dans la construction du sens du handicap. Réintroduisant le corps sur la base de la valorisation de ses différences sur les plans expérientiels, identitaires et de la créativité, revendiquant des modes singuliers d’être humain parmi la diversité des êtres humains (Shakespeare et Watson 2002; French et Swain 2004), les modèles interactionnistes : personne, environnement, agir, invalident les relations de cause à effet unidirectionnelles propres aux modèles individuels et sociaux. Épousant la mouvance de la temporalité, la conception du handicap est une variation historiquement et spatialement située du développement humain comme phénomène de construction culturelle. Une construction bio-socio-culturelle ouverte des possibilités de participation sociale ou d’exercice effectif des droits humains sur la base de la Déclaration des droits de l’Homme, des Conventions internationales de l’Organisation des Nations-Unies (femmes, enfants, torture et maltraitance) et en l’occurrence de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDPH) (ONU 2006; Quinn et Degener 2002; Saillant 2007). Par personnes handicapées, on entend des personnes qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres. (CDPH, Art 1, P.4). Fruit de plusieurs décennies de luttes et de transformations de la conception du handicap, cette définition représente une avancée historique remarquable autant au sein du dernier des mouvements sociaux des droits civiques, le mouvement international de défense des droits des personnes handicapées, que de la part des États qui l’ont ratifiée. Malgré le fait que l’on utilise encore le terme personne handicapée, le handicap ne peut plus être considéré comme une caractéristique de la personne ni comme un statut figé dans le temps ni comme un contexte oppressif. Il est le résultat d’une relation dont il est nécessaire de décrire les trois composantes anthropologiques de l’être incarné : soi, les autres et l’action ou l’habitus pour en comprendre le processus de construction singulier. Le handicap est situationnel et relatif , sujet à changement, puisqu’il s’inscrit dans une dynamique interactive temporelle entre les facteurs organiques, fonctionnels, identitaires d’une part et les facteurs contextuels sociaux, technologiques et physiques d’autre part, déterminant ce que les personnes ont la possibilité de réaliser dans les habitudes de vie de leurs choix ou culturellement attendues dans leurs collectivités. Les situations de handicap ne peuvent être prédites à l’avance sur la base d’une évaluation organique, fonctionnelle, comportementale, identitaire ou de la connaissance de paramètres environnementaux pris séparément sans réintroduire leurs relations complexes avec l’action d’un sujet définissant le sens ou mieux incarnant la conscience vécue de cette situation de vie. Suite au succès de l’expression personne en situation du handicap en francophonie, on remarque une tendance à voir cette nouvelle appellation remplacer celle de personne handicapée. Ceci est généralement interprété comme une pénétration de la compréhension du modèle interactionniste et socio constructiviste. Toutefois il est inquiétant de voir poindre des dénominations comme personnes en situation de handicap physique, mental, visuel, auditif, intellectuel, moteur. Cette dérive démontre un profond enracinement ontologique du modèle individuel. Il est également le signe d’une tendance à recréer un statut de personne en situation de handicap pour remplacer celui de personne handicapée. Ceci nécessite une explication de la notion de situation de handicap en lien avec le concept de participation sociale. Une personne peut vivre à la fois des situations de handicap et des situations de participation sociale selon les activités qu’elle désire réaliser, ses habitudes de vie. Par exemple une personne ayant des limitations intellectuelles peut vivre une situation de handicap en classe régulière et avoir besoin du soutien d’un éducateur spécialisé mais elle ne sera pas en situation de handicap pour prendre l’autobus scolaire pour se rendre à ses cours. L’expression personne vivant des situations de handicap semble moins propice à la dérive essentialiste que personne en situation de handicap. Le phénomène du handicap est un domaine encore largement négligé mais en visibilité croissante en anthropologie. Au-delà des transformations de sens donné au terme de handicap comme catégorie sociale, utile à la définition de cibles d’intervention, de traitements sociaux, de problématiques sociales pour l’élaboration de politiques et de programmes, les définitions et les modèles présentés permettent de décrire le phénomène, de mieux le comprendre mais plus rarement de formuler des explications éclairantes sur le statut du handicap d’un point de vue anthropologique. Henri-Jacques Stiker identifie, en synthèse, cinq théories du handicap co-existantes dans le champ contemporain des sciences sociales (2005). La théorie du stigmate (Goffman 1975). Le fait du marquage sur le corps pour indiquer une défaveur, une disgrâce, un discrédit profond, constitue une manière de voir comment une infirmité donne lieu à l’attribution d’une identité sociale virtuelle, en décalage complet avec l’identité sociale réelle. Le handicap ne peut être pensé en dehors de la sphère psychique, car il renvoie toujours à l’image de soi, chez celui qui en souffre comme celui qui le regarde. Le regard d’autrui construit le regard que l’on porte sur soi mais en résulte également (Stiker 2005 :200). La théorie culturaliste qui met en exergue la spécificité des personnes handicapées, tout en récusant radicalement la notion même de handicap, est enracinée dans le multiculturalisme américain. Les personnes handicapées se constituent en groupes culturels avec leurs traits singuliers, à partir de conditions de vie, d’une histoire (Stiker 2005). Par exemple au sein des Disability Studies ou Études sur le handicap, il est fréquent de penser que seuls les corps différents concernés peuvent véritablement les pratiquer et en comprendre les fondements identitaires et expérientiels. L’exemple le plus probant est celui de la culture sourde qui se définit comme minorité ethno-linguistique autour de la langue des signes et de la figure identitaire du Sourd. On fera référence ici au Deaf Studies (Gaucher 2009). La théorie de l’oppression (Oliver 1990). Elle affirme que le handicap est produit par les barrières sociales en termes de déterminants sociologiques et politiques inhérents au système capitaliste ou productiviste. Les personnes sont handicapées non par leurs déficiences mais par l’oppression de l’idéologie biomédicale, essentialiste, individualiste construite pour empêcher l’intégration et l’égalité. Ce courant des Disability Studies s’inscrit dans une mouvance de luttes émancipatoires des personnes opprimées elles-mêmes (Stiker 2005 : 210; Boucher 2003) La théorie de la liminalité (Murphy 1990). Par cette différence dont ils sont les porteurs, les corps s’écartent de la normalité attendue par la collectivité et sont placés dans une situation liminale, un entre-deux qu’aucun rite de passage ne semble en mesure d’effacer, de métamorphoser pour accéder au monde des corps normaux. Cette théorie attribue un statut anthropologique spécifique au corps handicapé sans faire référence obligatoire à l’oppression, à l’exclusion, à la faute, ou au pouvoir. Marqués de façon indélébile, ils demeurent sur le seuil de la validité, de l’égalité, des droits, de l’humanité. La théorie de l’infirmité comme double, la liminalité récurrente de Stiker (2005). L’infirmité ne déclenche pas seulement la liminalité mais en référant à la psychanalyse, elle est un véritable double. La déficience est là, nous rappelant ce que nous n’aimons pas et ne voulons pas être, mais elle est notre ombre. Nous avons besoin de l’infirmité, comme de ceux qui la portent pour nous consoler d’être vulnérable et mortel tout autant que nous ne devons pas être confondus avec elle et eux pour continuer à nous estimer. Ils sont, devant nous, notre normalité, mais aussi notre espoir d’immortalité (Stiker 2005 : 223)
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Gélard, Marie-Luce. "Sens". Anthropen, 2017. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.061.

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L’anthropologie sensorielle, autrement nommée anthropologie des sens, anthropologie du sensible ou anthropologie des sensations est un domaine de recherche récent (Gélard: 2016). Car, si l’étude des sens figure déjà dans les ethnographies les plus classiques, elle apparaît rarement comme un objet d’étude en soi. L’histoire de la discipline illustre des thématiques afférentes telle l’anthropologie du corps, des émotions ou des sentiments ainsi que la philosophie des odeurs. Mais l’anthropologie sensorielle, celle des usages et des langages des sens reste le parent pauvre des études. Or, depuis quelques années, les sens font leur apparition dans des recherches en sciences humaines mais de manière encore secondaire ou marginale, les sens sont toujours associés à un autre thème (l’art, les techniques audiovisuelles, etc.). Ce sont surtout les historiens qui ont développé ces orientations de recherches nouvelles sur les expressions et manifestations sensorielles. L’anthropologie historique des sens s’est déployée depuis les écrits fondateurs de Lucien Febvre (1941 et 1942) avec plus tard l’histoire des sensibilités (Corbin, 1990) et la restitution des univers sensoriels sonores et odorants (Corbin 1982). Des univers qui comptent parmi les grands principes de mise en ordre du monde comme le rappelle l’historien Christophe Granger (2014). Notons la création en 2016 de la très belle revue Sensibilités. Histoire, critique et sciences sociales. Outre-Atlantique les études anthropologiques se sont développées autour des sens, dès le début des années 1990 (Classen: 1993, 1994 et Howes: 1991). Les recherches s’y institutionnalisent avec le groupe Sensory Studies(Condordia University), la revue The Senses and Society et le Sensory Ethnography Lab (Havard University). Notons à propos de ce dernier, les liens entre sens et arts, notamment visuels qui y sont très développés au détriment d'études plus orientées vers une anthropologie sociale des sens et de leurs usages. En 1990, la revue canadienne, Anthropologie et Sociétés y consacre un numéro pionnier (Howes, ed. 1990) intitulé « Les 'cinq sens' ». Ailleurs, en France notamment, les études sur les sens sont davantage dispersées et se limitent souvent au domaine du biologique et des sciences naturelles. Les sciences cognitives et les neurosciences s’en emparent mais elles cantonnent l’analyse au réalisme cognitif occidental et à ses a priori sur la perception sensorielle. L’écologie de la perception se déploie ensuite avec les travaux de T. Ingold (2000). Mais le brouillage disciplinaire est fort et l’anthropologie sensorielle basée sur des études de terrain et des ethnographies détaillées reste fragmentée - à quelques exceptions près : David Le Breton (2006a) et François Laplantine (2005) - par exemple. Les études sensorielles menées par des anthropologues vont s’attacher à l’analyse d’un seul sens, par exemple l’odorat (depuis les travaux de Detienne, 1972) et ceux de la philosophie des odeurs, le goût (Dupire, 1987), le sonore (Feld, 1982) et plus rarement le toucher (revue Terrain). Or, la « poly-sensorialité » (Corbin, 1995), « l’esprit multisensoriel » (Howes, 2010)), « l’intersensorialité » (Candau, 2010) ou la « conjugaison des sens » (Le Breton, 2006b) permettent une autre voie d’accès à la compréhension des systèmes sensoriels, le primat d’un sens sur un autre ou l’association entre sens et valeurs individuelles et sociales diffèrent selon les cultures. C’est cette diversité qu’il convient de mettre à jour. Ainsi, la mobilisation des sens apparaît comme une forme de communication non verbale, corporelle et sensorielle. Accéder à la compréhension des ces manifestations sensorielles suppose une connaissance approfondie et intime des sociétés. L’ethnographie illustre cette nécessaire et indispensable connaissance, en voici un exemple. Dans la société saharienne de Merzouga (Sud-Est marocain), la présence d’homme et de femme dans un espace donné détermine des comportements d’évitements qui sont sous-tendus par la capacité de chacun à émettre des signes, plus ou moins directs, de sa propre présence. Hommes et femmes communiquent souvent sans avoir recours au langage oral jugé mal adapté aux règles de la pudeur. Ainsi, les rencontres donnent lieu à des manifestations sensorielles discrètes (odorantes et sonores). Ces messages non verbaux permettent de comprendre des univers trop souvent observés de l’extérieur, donnant lieu à des analyses réductrices qui ignorent ces attentions mutuelles. Ainsi la manifestation sonore de soi, à l’intérieur des maisons est un élément quotidien important. Les femmes portent un voile de tête agrémenté de pastilles d’aluminium - qui produisent un tintement lorsque le corps est en mouvement - ces pastilles peuvent êtres rendues plus ou moins sonores selon les circonstances. Ces sons sont identifiés par tous comme des manifestations sonores féminines. Il est ainsi possible de révéler sa présence, d’une pièce à l’autre par exemple évitant ainsi une confrontation physique qui mettrait chacun mal à l’aise. La discrétion et le calme sont des qualités personnelles reconnues et indispensables, il est inconvenant d’élever la voix - crier est compris comme la perte du contrôle de soi - il faut dans les circonstances hasardeuses d’une rencontre, surtout à l’intérieur des habitations, avoir l’élégance de « faire du bruit sans en faire ». À l’opposé un homme qui pénètre dans une maison s’arrange pour faire du bruit, secouer brutalement ses clés, frapper avec vigueur sur la porte d’entrée en fer, ou même crier pour interpeller les occupants. Ces entrées bruyantes des hommes sont attendues comme des signaux de présence et d’identification. Dans d’autres cas, ce sont les activités plus ou moins sonores qui vont informer de la présence de femmes dans les cours intérieures. Un bon exemple est l’une des tâches quotidiennes qui consiste à briser un à un les noyaux des dattes destinés aux animaux au moyen d’un broyeur de pierre qui produit un son sourd spécifique, reconnaissable par tous, son qui informe de la présence d’une ou de plusieurs femmes à l’intérieur de l’habitation. Cette tâche répétitive et ennuyeuse étant le plus souvent réalisée collectivement. Tout homme est ainsi informé de la présence de femmes assemblées en collectif ; il peut remettre sa visite à plus tard, et continuer son chemin. Ces manifestations sensorielles par le biais de micro-activités présentent une ethnographie des sens où les sons (d’autres sens également) informent sur les univers culturels. Ainsi, l’étude des sens et des univers sensoriels sont des outils majeures d’appréciation des sociétés et des cultures. Penser les sens et se dégager de nos propres préjugés sensoriels reste une démarche délicate et complexe, indispensable à la connaissance et à l’appréhension de l’autre. Il convient naturellement de s’intéresser aux pratiques des individus et non de projeter des modèles sensoriels exogènes. La culture occidentale évoque l’existence de « cinq » sens et éventuellement d’un sixième (celui du cœur moral et spirituel) mais ceci n’est nullement partagé par toutes les sociétés. Les hiérarchies sensorielles renseignent aussi sur la manière dont les individus perçoivent le monde environnant. C’est ce décryptage des sens, du senti et du ressenti qui apporte des clés d’analyses. Au final, les sens ne sont plus seulement un objet de recherche mais une démarche épistémologique principale où le sensible se convertit en intelligibilité du monde. Le champ d’étude et de comparaison qui s’ouvre à l’anthropologie sensorielle est de ce fait considérable. Cette notice se limite à l’évocation d’un courant de recherche nouveau, aussi les références citées ne prétendent nullement faire un tour d’horizon exhaustif de l’anthropologie sensorielle mais donne au lecteur quelques orientations majeures.
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Moussaoui, Abderrahmane. "Violence extrême". Anthropen, 2020. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.134.

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Même si la guerre, comme destruction de masse, a été très tôt au centre des intérêts de la discipline, l’anthropologie ne l’a jamais caractérisée comme une « violence extrême ». Ce qui pose d’emblée la question en termes autres que quantitatifs. L’extrême dans la violence n’est pas forcément dans l’importance du nombre de ses victimes. Il faut y ajouter d’autres dimensions comme l’inanité de l’acte, sa gratuité, son degré de cruauté et le non-respect des règles et normes partagées. Celles de la guerre, par exemple, imposent de ne s’attaquer qu’à l’ennemi armé et d’épargner les civils, de soigner le blessé etc. La violence extrême passe outre toutes ces normes et règles ; et s’exerce avec une cruauté démesurée. La première guerre mondiale constitue aux yeux des défenseurs de cette thèse, le moment inaugural dans le franchissement d’un tel seuil. Car, c’est dans cette guerre que fut utilisé pour la première fois le bombardement aérien, lié à l’ère industrielle, exterminant de nombreuses populations civiles non armées. Associée aux affrontements et insurrections débordant les cadres étatiques, l’expression peut désormais inclure également des faits commis dans le cadre des guerres conduites par des États. La violence extrême est une agression physique et une transgression outrancière d’une éthique partagée. Qu’elle s’exerce lors d’une guerre ou dans le cadre d’une institution (violence institutionnelle) elle est une violence extrême dès lors qu’elle use de moyens estimés inappropriés selon les codes communs et les sensibilités partagées. Les manières et les moyens d’agir doivent être proportionnels à l’objectif visé ; et toute outrance délégitime l’acte de violence, quand bien même celui-ci relèverait de « la violence légitime » monopole de l’Etat. Le qualificatif extrême vient donc spécifier un type de violence qui atteint ce point invisible ou imprévisible, en bafouant l’ordre éthique et conventionnel. Aller à l’extrême c’est aller au-delà du connu et de l’imaginable. La violence extrême est celle donc qui dépasse une limite se situant elle même au-delà des limites connues ou considérées comme impossibles à franchir. Elle renvoie à ce qui dépasse l’entendement par son ampleur ou par sa « gratuité » ; car, ce sont ses finalités qui rationalisent la guerre et toute autre forme de violence. Dépourvue de toute fonctionnalité, la violence extrême n’a d’autres buts qu’elle-même (Wolfgang Sofsky (1993). En d’autres termes, la violence extrême est ce qui oblitère le sens en rendant vaines (ou du moins imperceptibles) les logiques d’un acte jusque-là appréhendé en termes d’utilité, de fonctionnalité et d’efficacité. La violence est extrême quand elle parait démesurée par le nombre de ses victimes (génocide, nettoyage ethnique, meurtres et assassinat de masse) ; mais elle l’est d’autant plus, et le plus souvent, quand elle est accompagnée d’un traitement cruel, froid et gratuit : dépeçage, brûlure, énucléation, viols et mutilations sexuelles. Outrepassant l’habituel et l’admissible, par la démesure du nombre de ses victimes et le degré de cruauté dans l’exécution de l’acte, la violence extrême se situe dans un « au-delà », dont le seuil est une ligne mouvante et difficilement repérable. Son « objectivation » dépend à la fois du bourreau, de la victime et du témoin ; tous façonnés par des constructions culturelles informées par les contextes historiques et produisant des sensibilités et des « esthétiques de réception » subjectives et changeantes. La violence extrême est, nécessairement, d’abord une question de sensibilité. Or, celle-ci est non seulement une subjectivation mais aussi une construction historiquement déterminée. Pendant longtemps et jusqu’au siècle des lumières, le châtiment corporel fut, pour la justice, la norme dans toute l’Europe. Les organes fautifs des coupables sont maltraités publiquement. On exhibait les femmes adultères nues et on leur coupait les seins ; on coupait les langues des blasphémateurs et les mains des voleurs. Le bûcher était réservé aux sodomites, aux hérétiques et aux sorcières. On crevait les yeux (avec un tisonnier incandescent) du traître. Les voleurs de grands chemins subissaient le châtiment d’être rompus vifs. On écartelait et on démembrait le régicide. La foule se dépêchait pour assister à ces spectacles et à ceux des supplices de la roue, des pendaisons, de la décollation par le sabre etc. Placidement et consciencieusement, les bourreaux ont appliqué la « terreur du supplice » jusqu’au milieu du XVIIIe siècle (Meyran, 2006). Il a fallu attendre les lumières pour remplacer le corps violenté par le corps incarcéré. Aujourd’hui insupportables, aux yeux du citoyen occidental, certains de ces châtiments corporels administrés avec une violence extrême sont encore en usage dans d’autres sociétés. Après les massacres collectifs qui ont marqué la fin du XXe siècle, les travaux de Véronique Nahoum-Grappe portant sur le conflit de l’ex-Yougoslavie vont contribuer à relancer le débat sur la notion de « violence extrême » comme elle le rappellera plus tard : « Nous avions utilisé la notion de « violence extrême » à propos de la guerre en ex-Yougoslavie pour désigner « toutes les pratiques de cruauté « exagérée » exercées à l’encontre de civils et non de l’armée « ennemie », qui semblaient dépasser le simple but de vouloir s’emparer d’un territoire et d’un pouvoir. » (Nahoum-Grappe. 2002). Elle expliquera plus loin qu’après dix années de ces premières observations, ce qu’elle tentait de désigner, relève, en fait, d’une catégorie de crimes, graves, usant de cruauté dans l’application d’un programme de « purification ethnique ». Pourtant, quel que soit le critère invoqué, le phénomène n’est pas nouveau et loin d’être historiquement inédit. Si l’on reprend l’argument du nombre et de la gratuité de l’acte, le massacre n’est pas une invention du XXe s ; et ne dépend pas de la technologie contemporaine. On peut remonter assez loin et constater que dans ce domaine, l’homme a fait feu de tout bois, comme le montre El Kenz David dans ses travaux sur les guerres de religion (El Kenz 2010 & 2011). Parce que les sensibilités de l’époque admettaient ou toléraient certaines exactions, aux yeux des contemporains celles-ci ne relevaient pas de la violence extrême. Quant aux cruautés et autres exactions perpétrés à l’encontre des populations civiles, bien avant Auschwitz et l’ex-Yougoslavie, l’humanité en a souffert d’autres. Grâce aux travaux des historiens, certaines sont désormais relativement bien connues comme les atrocités commises lors des colonnes infernales dans la guerre de Vendée ou le massacre de May Lai dans la guerre du Vietnam. D’autres demeurent encore méconnues et insuffisamment étudiées. Les exactions menées lors des guerres coloniales et de conquêtes sont loin d’être toutes recensées. La mise à mort, en juin 1845, par « enfumade » de la tribu des Ouled Riah, dans le massif du Dahra en Algérie par le futur général Pélissier sont un exemple qui commence à peine à être porté à la connaissance en France comme en Algérie (Le Cour Grandmaison, 2005.). Qu’elle soit ethnique ou sociale, qu’elle soit qualifiée de purification ethnique ou d’entreprise génocidaire, cette extermination qui passe par des massacres de masse ne peut être qualifiée autrement que par violence extrême. Qu’elle s’exerce sur un individu ou contre un groupe, la violence extrême se caractérise presque toujours par un traitement cruel, le plus souvent pensé et administré avec une égale froideur ; une sorte d’« esthétisation de la cruauté ». Pour le dire avec les mots de Pierre Mannoni, la violence extrême use d’un certain « maniérisme de l'horreur », ou de ce qu’il appelle « une tératologie symbolique » (Mannoni ,2004, p. 82-83), c‘est à dire l’art de mettre en scène les monstruosités. Motivée par un danger ou une menace extrême justifiant, aux yeux du bourreau, une réponse extrême, cette violence extrême a pu s’exécuter par la machette (Rwanda) ou dans des chambres à gaz, comme par d’autres moyens et armes de destruction massive. C'est l'intégrité du corps social et sa pureté que le bourreau « croit » défendre en recourant à une exérèse… salvatrice. La cruauté fait partie de l’arsenal du combattant qui s’ingénie à inventer le scénario le plus cruel en profanant l’intime et le tabou. Françoise Sironi le montre à propos d’une des expressions de la violence extrême. L’efficacité destructrice de la torture est obtenue entre autres par la transgression de tabous culturels ; et par l’inversion qui rend perméable toutes les limites entre les dedans et les dehors. Réinjecter dans le corps ce qui est censé être expulsé (excréments, urine, vomissures) ; féminiser et exposer les parties intimes ou les pénétrer en dehors de la sphère intime, associer des parties démembrées d’un corps humain à celles d’un animal, sont autant de manières de faire violence extrême. Cette inversion transgressive use du corps de la victime pour terroriser le témoin et le survivant. Outrepassant l’habituel et l’attendu par la manière (égorgement, démembrement, énucléation, émasculation etc.,), les moyens (usage d’armes de destruction massive, d’armes nucléaires bactériologiques ou chimiques) et une certaine rationalité, la « violence extrême » est un dépassement d’horizon. L’acte par sa singularité suggère une sortie de l’humanité de son auteur désensibilisé, déshumanisé ; qui, par son forfait et dans le même mouvement, exclue sa victime de l’humanité. Pour Jacques Semelin, la violence extrême « est l’expression prototypique de la négation de toute humanité ; dans la mesure où ses victimes sont le plus souvent d’abord « animalisées » ou « chosifiées » avant d’être anéanties (Sémelin, 2002). Ajoutons qu’elle n’est pas qu’anéantissement, elle est aussi une affirmation démonstrative d’une surpuissance. Que ce soit par le nombre, la manière ou l’arbitraire, la violence extrême a ponctué l’histoire de l’humanité et continue à la hanter Parmi ses formes contemporaines, le terrorisme est une de ses manifestations les plus spectaculaires ; permettant de comprendre qu’elle est d’abord une théâtralisation. L’image de chaos que renvoient les attentats et autres exactions spectaculaires, est le résultat dument recherché à l’aide d’une organisation minutieuse et de stratégies affinées que cette image chaotique occulte souvent. Il s’agit d’une démarche rationnelle tendant à produire un acte apparemment irrationnel. Les massacres collectifs qui font partie de ce que Stéphane Leman-Langlois qualifie de « mégacrimes » (Leman-Langlois, 2006) constituent une autre forme contemporaine de cette violence extrême ; dont la Bosnie-Herzégovine et le Rwanda demeurent les exemples les plus dramatiques depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. En raison de leur ampleur et l’organisation méthodique de leur exécution, ces massacres ont été, à juste titre, souvent qualifié de génocide. C’est le professeur de droit américain d’origine polonaise, Raphael Lemkin qui donnera le nom de génocide à ce que, Winston Churchill, parlant du nazisme, qualifiait de « crime sans nom ». Au terme génocide devenu polémique et idéologique, sera préféré la notion de massacre que Semelin définit comme « forme d’action le plus souvent collective de destruction des non combattants » (Sémelin 2012, p. 21). Dans les faits, il s’agit de la même réalité ; sans être des entreprises génocidaires, ces massacres de masse ont visé l’« extermination » de groupes humains en vue de s’emparer de leur territoire au sens le plus large. La violence extrême agit à la fois sur l'émotionnel et sur l'imaginaire ; en franchissant le seuil du tolérable et de la sensibilité ordinairement admise dans le cadre de représentations sociales. Le caractère extrême de la violence se définit en fonction d’un imaginaire partagé ; qu’elle heurte en allant au-delà de ce qu'il peut concevoir ; et des limites de ce qu'il peut « souffrir ». Il s’agit d’une violence qui franchit le seuil du concevable et ouvre vers un horizon encore difficilement imaginable et donc insupportable parce que non maîtrisable. Qu’est-ce qui motive ce recours à l’extrême ? Nombre d’historiens se sont demandé si les logiques politiques suffisaient à les expliquer. Ne faudrait-il pas les inférer aux dimensions psychologiques ? Plusieurs approches mettent, quelquefois, en rapport violence extrême et ressorts émotionnels (peur, colère et haine et jouissance..). D’autres fois, ce sont les pulsions psychiques qui sont invoquées. Incapables d’expliquer de telles conduites par les logiques sociales ou politiques, ce sont les dimensions psychologiques qui finissent par être mises en avant. L’acte, par son caractère extrême serait à la recherche du plaisir et de la jouissance dans l’excès, devenant ainsi une fin en soi. Il peut également être une manière de tenter de compenser des manques en recherchant du sens dans le non-sens. Cela a pu être expliqué aussi comme une manière de demeurer du côté des hommes en animalisant ou en chosifiant la victime, en la faisant autre. L’auteur de la violence extrême procède à une négation de sa victime pour se (re) construire lui-même. Pure jouissance (Wolfgang Sofsky) délire (Yvon Le Bot, J Semelin) ou conduite fonctionnelle de reconstruction de soi (Primo Levi), sont les trois approches avancées pour expliquer la cruauté comme acte inadmissible et inconcevable (Wierworka, 2004 : p 268). Or, la violence extrême prend la forme d’une cruauté quand ses protagonistes redoublent d’ingéniosité pour inventer le scénario inédit le plus cruel. Car la violence extrême est d’abord un indéchiffrable insupportable qui se trouve par commodité rangé du côté de l’exceptionnalité. Parce qu’inintelligible, elle est inacceptable, elle est extra… ordinaire. Ses auteurs sont des barbares, des bêtes, des monstres ; autrement dit ; des inhumains parce qu’ils accomplissent ce que l’humain est incapable de concevoir. Dans quelle mesure, de telles approches ne sont-elles pas une manière de rassurer la société des humains qui exclue ces « monstres » exceptionnels seuls capables d’actes … inhumains ? Parce qu’inexplicables, ces violences sont quelquefois rangées dans le registre de la folie ; et qualifiées de « barbares » ou de « monstrueuses » ; des qualificatifs qui déshumanisent leurs auteurs et signalent l’impuissance du témoin à comprendre et à agir. En d’autres termes, tant que la violence relève de l’explicable (réciprocité, échange, mimétisme etc.), elle demeure humaine ; et devient extrême quand elle échappe à l‘entendement. Indicible parce qu’injustifiable, la violence extrême est inhumaine. Cependant, aussi inhumaine soit-elle d’un point de vue éthique, la violence extrême demeure du point de vue anthropologique, un acte terriblement humain ; et que l’homme accomplit toujours à partir de déterminants et selon un raisonnement humains. Comme le dit Semelin : « Les deux faces de la violence extrême, sa rationalité et sa démence, ne peuvent se penser l’une sans l’autre. Et rien ne sert de dénoncer la sauvagerie des tueurs en omettant de s’interroger sur leurs buts » (Semelin, 2000). L’auteur de l’acte de violence extrême s’érige en homme-dieu pour dénier toute humanité à la victime qu’il décide d’exclure de la vie, de la déshumaniser en l’expulsant vers l’infra humain.
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Gagnon, Éric. "Vieillissement". Anthropen, 2017. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.062.

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L’anthropologie de la vieillesse a contribué à remettre en question des idées reçues et plusieurs préjugés tenaces, dont celle voulant que les sociétés modernes déconsidèrent la vieillesse et abandonnent leurs vieux, alors que les sociétés dites traditionnelles valorisent leur ainés et leur font une place honorable. Elle a écarté certaines images d’Épinal, comme l’Ancêtre trônant au milieu de sa famille, ou des clichés, comme le vieillard abandonné à l’hospice. Elle a appelé à se méfier de la mémoire toujours sélective et parfois enjoliveuse («Le bon vieux temps»). Elle a rappelé qu’il faut distinguer les représentations des comportements, que le prestige accordé à la vieillesse ne se traduit pas toujours en un véritable respect ou une réelle affection, et cache parfois des conditions de vie matérielle difficiles. Elle a surtout montré que le vieillissement n’est pas un phénomène purement biologique, partout identique, et qu’il est extrêmement variable d’une société, d’un groupe, d’une classe ou d’un genre à l’autre. Cette fonction critique, l’anthropologie a pu l’exercer au moyen de ce qui demeure son principal outil théorique et méthodologique : la comparaison. En comparant deux communautés au sein d’une même société, un même groupe avant et après des bouleversements historiques, deux culture très éloignées l’une de l’autre, la condition des ainés dans un pays avec celle des ainés originaires du même pays mais ayant migré dans un autre pays, ou encore différentes communautés au sein d’une même diaspora, elle a montré la diversité des conditions et des expériences, le poids des facteurs culturels, politiques ou économiques sur le vieillissement (Solokovski 1990). L’étude de cette diversité a non seulement permis de mieux comprendre le vieillissement, mais également de nourrir la réflexion touchant quatre grandes questions de l’anthropologie, que sont l’articulation du biologique et du social, les échanges familiaux, ce qui fait une communauté et le rôle des sciences et des techniques. Sur la première question, l’anthropologie du vieillissement a montré comment les transformations du corps sont étroitement déterminées par les conditions de vie, comment les changements biologiques, leur compréhension et leur perception, la manière dont les individus en font l’expérience et les réponses que les collectivité y apportent, sont façonnés par la culture, les normes sociales, l’organisation économique et les politiques publiques. L’étude de Margaret Lock (1993) sur la ménopause au Japon et en Amérique du Nord est à cet égard exemplaire. La sénescence, c’est-à-dire la dégradation des capacités générales de l’organisme biologique avec l’avancée en âge, connaît d’importantes variations. Non seulement la définition et les critères du vieillissement varient selon les milieux, les époques, les secteurs d’activité ou le genre (nombre d’années vécues, altérations physiques, incapacités, apparence physique, naissance de petits-enfants…), mais également ce qui est tenu pour un vieillissement normal ou souhaitable, le statut des personnes âgées, leurs obligations et leurs rôles. Si les conditions sociales d’existence ralentissent ou accélèrent le vieillissement biologique, elles donnent aussi à ce dernier une importance et une signification, qui font varier jusqu’aux formes d’expression de la douleur, de son histoire et de son identité (Keith 1985; Fry 2010). L’étude du vieillissement met en lumière la «biologie locale», le façonnement du corps propre à une culture ou un groupe. Sur la seconde question, l’étude anthropologique de la vieillesse s’est beaucoup intéressée aux échanges intergénérationnels, ainsi que le statut et la protection dont les personnes âgées bénéficient. Goody (1976) s’est efforcé de montrer comment les systèmes de parenté et de résidence, les modes transmission et le type d’économie favorisent ou non la dépendance des ainés envers les plus jeunes pour leur subsistance, le contrôle sur les biens, la possibilité de continuer d’habiter la demeure familiale et l’autorité qu’ils continuent d’exercer. La perspective permet non seulement la comparaison entre des sociétés d’aires culturelles très éloignées, mais l’articulation des questions anthropologiques touchant le vieillissement à celles liées à la famille et à l’économie, ainsi qu’à des enjeux politiques contemporains touchant les soins et la «prise en charge» des personnes vieillissantes (Buch 2015). Dans une perspective plus historique, on s’est intéressé aux impacts de l’allongement de la durée de vie, des transformation de l’économie (salariat, travail des femmes), des mutations de la famille, de l’essor des politiques de protection sociale (retraite, pension, allocation) et des migrations, sur les solidarités familiales, la sécurité et l’autonomie des ainés (Fry 2010). Les recherches sur les grands-parents et les transformations de leur rôle et statut (Attias-Donfut et Segalen 2007) ont alimenté l’étude des échanges et de la circulation des biens et des services au sein des familles, mais également de la transmission de la mémoire et du patrimoine familial, matériel et symbolique. Sur la troisième question, les anthropologues se sont intéressés à diverses communautés résidentielles d’ainés, que ce soit les grandes habitations et les foyers, les établissement de soins de longue durée (Hendersen et Vesperi 1995), ou encore les quartiers et villages sécurisés (gated communities), qui regroupent exclusivement ou en forte majorité des ainés. Ils se sont interrogés sur l’homogénéité de ces populations, le fonctionnement et les rites de passage propres à ces regroupements, les hiérarchies, les clivages et l’exclusion par delà le discours égalitariste, les relations avec le monde «extérieur» (les familles des résidents et la société dans son ensemble), en somme: la continuité et la discontinuité de ces communautés. Ces travaux ont nourri la réflexion sur ce qui fait une communauté en général (territoire, sentiment d’appartenance et organisation sociale), et sur la formation de communautés spécifiques de personnes âgées et le contexte dans lequel elles émergent (Keith 1985). Enfin, sur la question la place des savoirs scientifiques et techniques dans les sociétés contemporaines, les anthropologues ont porté une grande attention aux phénomènes de médicalisation et de professionnalisation du vieillissement. Celui-ci est en effet l’objet de savoirs et d’expertises qui en changent la signification et la réalité. Les transitions et transformations liées à l’âge sont devenues des problèmes, qu’il appartient à la médecine et à d’autres disciplines (la gérontologie au premier chef) de guérir, de soigner ou de «gérer» (Corin 1982). Ces interventions visent la préventions des maladies et des incapacités (gestion des risques), l’évaluation des «déficits» (physiques ou cognitifs) au moyen d’instruments diagnostics et de protocoles standardisés, pour déterminer les services ou l’aide dont la personne âgée a besoin, l’aménagement des espaces, la distribution des services spécialisés, les critères d’admission en institutions, etc. (Kaufmann 1994; Lock 1993). Ces interventions et les politiques qui les fondent, changent non seulement la façon dont le vieillissement est conçu et perçu dans une société, mais la manière dont les personnes le vivent (identité, image de soi, conduites, attentes). La vieillesse est redéfinie autour des catégories d’autonomie, de fragilité, d’activité et de dépendance – en Occident du moins – qui changent le statut de la personne âgée, sa place, ses relations aux autres, les critères culturels du vieillissement «normal» ou «réussi». Les personnes âgées sont largement considérées comme des patients et des usagers de services, mais aussi comme un marché pour les biotechnologies qui promettent un ralentissement du vieillissement. L’étude des savoirs et pratiques touchant plus spécifiquement les démences (ex : Alzheimer), du point de vue des savoirs et des pratiques professionnelles (Leibing et Cohen 2006) ou sous un angle plus expérientiel (Taylor 2008), est révélatrice de la manière dont une société conçoit la «personne», ce qui fait son «humanité» ou son identité, et comment, selon le contexte culturel et institutionnel, cette personne et cette humanité se défont ou se maintiennent. Ces travaux rejoignent une riche tradition de recherche sur la construction sociale de la «personne» et du «soi», particulièrement de la personne âgée (Lamb 1997 pour un exemple). Ces quatre grandes questions sont liées entre elles. La médicalisation et la professionnalisation renvoient à l’articulation du biologique et du social, ainsi qu’au soutien et à la prise en charge des personnes âgées; la question des communautés est indissociable des solidarités familiales. Le vieillissement est un phénomène aux multiples facettes, touchant toutes les dimensions de l’existence. Il n’est d’ailleurs compréhensible que mis en relation avec à un ensemble de réalités qui le débordent, et auxquelles, en retour, il apporte un éclairage : la famille, l’économie, la démographie, les soins de santé, les politiques, l’imaginaire social et les valeurs, la personne comme construit culturel. Si, comme le soutient Simone de Beauvoir (1970), on se découvre vieux dans le regard des autres, il reste à comprendre ce regard : les représentations, les normes, les savoirs et les pratiques qui le cadrent et l’orientent, ceux qui posent ce regard et les contextes dans lesquels il est posé, ainsi que les comportements et les expériences que ce regard induit.
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Stoczkowski, Wiktor. "Race". Anthropen, 2017. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.042.

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La notion de race est ancienne, et ses significations n’ont jamais cessé de se transformer. Dès le XVIe siècle, le mot race désignait les membres d’un lignage. Par conséquent, l’espèce humaine devenait une race puisque la Bible lui donnait pour ancêtres communs Adam et Ève. Un peuple se réclamant d’un ancêtre mythique pouvait également être qualifié de race : on disait par exemple que les Juifs étaient de la race d’Abraham. Le terme a parfois été synonyme de dynastie royale, elle aussi dotée d’un ancêtre commun. L’Encyclopédie utilise le terme principalement dans ces trois acceptions, parlant aussi bien de race humaine que de race d’Abraham ou de race des Capétiens (L’Encyclopédie 1777 et 1778). Parallèlement, le XVIIIe siècle voit se répandre l’usage zoologique de la notion de race, employée pour désigner les variétés infra-spécifiques d’animaux, surtout des animaux domestiques, tels les chiens, les chevaux ou les bovins (Buffon 1749a et 1755). En même temps, les naturalistes étendent son application aux variétés de l’espèce humaine. On considère alors que les différences biologiques entre groupes humains géographiquement séparés sont solidaires de leurs différences culturelles, les unes et les autres engendrées par l’influence conjointe du sol, du climat et de la nourriture (Buffon 1749b). En accord avec la théorie humorale alors en vogue, on pense que le sol, le climat et la nourriture influencent les quatre humeurs physiologiques (bile jaune, sang, bile noire, pituite), dont l’interaction détermine le degré d’un tempérament (mélancolique, flegmatique, bileux, sanguin), lequel décide à son tour à la fois de l’anatomie des hommes et de leur caractère, mentalité, mœurs et organisation sociale (Greenwood 1984). Aucun consensus n’existait en revanche quant au nombre de races d’hommes, tantôt porté à plusieurs dizaines, tantôt réduit à trois et dont chacune était assimilée à la descendance d’un des trois fils de Noé. Les races humaines étaient disposées sur les échelons supérieurs de la Grande Échelle des Êtres, qui menait des formes animales les plus simples jusqu’à l’homme le plus perfectionné, identifié invariablement au Blanc. Le Noir, et plus particulièrement le Hottentot, occupait la limite inférieure de l’humanité, où il côtoyait l’Orang-outang placé au sommet du monde animal (Dictionnaire des sciences médicales, 1819, Sebastani 2013). Si la plupart des Européens du XVIIIe siècle croyaient à la supériorité des Blancs, tous n’en déduisaient pas les mêmes conclusions. Certains estimaient que les autres races pouvaient éventuellement acquérir la civilisation et devenir, avec le temps, à la fois égales aux Blancs et blanches de peau, blanchies sous l’effet de la civilisation. D’autres restaient convaincus que la supériorité des Blancs était un immuable fait de nature, ce qui condamnait les autres races, surtout les Noirs, à une éternelle soumission, faisant d’eux ce que Aristote avait appelé les esclaves par nature. Les débats raciologiques du XIXe siècle consacrèrent l’opposition plus ancienne entre le monogénisme et le polygénisme (Blanckaert 1981). Les monogénistes clamaient qu’il n’y a qu’une seule espèce humaine, différenciée à partir d’un type originel ; les polygénistes soutenaient qu’il existe depuis toujours plusieurs espèces humaines invariables, pourvues de propriétés spécifiques, aussi bien biologiques que mentales. La théorie darwinienne (1859) n’a modifié que modestement les grandes lignes de ce débat : les degrés de l’Échelle des Êtres seront désormais considérés comme les étapes consécutives de l’évolution, tandis que les races inférieures se verront identifiées aux races moins évoluées. Les polygénistes darwiniens pouvaient renoncer à l’axiome de l’invariabilité des races dans la très longue durée préhistorique, mais ils s’accordaient avec les monogénistes darwiniens à établir une hiérarchie linéaire des races selon leurs formes anatomiques, auxquelles on croyait pouvoir associer une gradation de facultés morales, intellectuelles et civilisatrices, tenues pour héréditaires et difficilement modifiables dans la courte durée historique. Dès la fin du XVIIIe siècle, des mesures anthropométriques variées ont commencé à être proposées, dans l’espoir de quantifier le degré d’avancement moral et mental des races à partir d’indices anatomiques : ce fut l’un des fondements de l’anthropologie physique du XIXe siècle. La théorie darwinienne de la sélection naturelle a contribué à légitimer la vieille idée de la lutte des races pour la survie. On s’est mis à redouter que les races inférieures, réputées plus fertiles, n’en viennent à bout des races supérieures. Le XIXe siècle fut particulièrement marqué par la hantise du mélange racial, censé conduire à la contamination de la « substance germinative » des races supérieures et à leur dégénérescence consécutive. Dans la première moitié du XXe siècle, l’idéologie nazie offrit l’un des aboutissements extrêmes de cette conception. On y trouve une combinaison de nombreuses composantes des théories raciologiques antérieures : une classification raciale rigide, la hiérarchisation des races en supérieures et inférieures, la conviction que les différences anatomiques correspondent aux différences culturelles, l’idée d’une inégalité morale, intellectuelle et civilisatrice des races, la crainte d’une dégénérescence raciale par le métissage qui altère le « sang » de la race supérieure, la croyance qu’une menace pèse sur la race supérieure du fait de la fertilité plus grande des races inférieures, la doctrine de la lutte entre les races comme force motrice du progrès. L’idéologie nazie fut une sinistre synthèse d’au moins deux siècles de développement de la pensée raciale. Lorsque la Deuxième Guerre prit fin, l’Occident tenta de faire le procès à son héritage intellectuel. L’UNESCO exprima une conviction alors inédite en inscrivant dans sa constitution l’idée selon laquelle les atrocités de la récente guerre avaient été rendues possibles par la croyance à l’inégalité des races. Pour rendre impossibles de nouveaux Auschwitz, on décida alors de faire disparaître la notion de races humaines, source présumée de l’horreur suprême. Dans leur déclaration de 1950, les experts de l’UNESCO affirmèrent l’unité fondamentale de l’espèce humaine et reléguèrent la diversité biologique des hommes à un second plan, en tant qu’épiphénomène de divers mécanismes évolutifs de différentiation. La Déclaration de l’UNESCO portait les marques de la toute récente théorie synthétique de l’évolution, dont les principes ramenaient la « race » à un résultat éphémère de la circulation des gènes entre les populations, seules entités réellement observables (UNESCO 1950, Stoczkowski 2008). La conjonction du contexte politique et de l’émergence de la génétique des populations conduisit, à partir des années 1950, à l’abandon progressif de la notion de race, surtout en sciences sociales. Les humanités multiples des théories raciologiques se muèrent en l’Homme universel de l’UNESCO. Pourtant, la génétique des populations n’a pas tenu les promesses dont on l’avait initialement investie en espérant que la recherche allait démontrer l’inexistence des races humaines, ce qui devait invalider toute possibilité de rabattre les différences de culture sur les différences de nature, selon le subterfuge séculaire qui avait maintes fois servi à justifier les inégalités, les discriminations et les oppressions. N’étaient pas moindres les attentes suscitées ensuite par l’exploration du génome humain : elle devait porter le coup de grâce au concept de race et aux préjugés que ce concept implique. En juin 2000, lors des célébrations qui marquèrent la publication de la première esquisse de la carte du génome humain, J. Craig Venter, directeur de l’entreprise de recherche génétique Celera, répéta que « la notion de race n’a aucun fondement génétique ni scientifique » (Marantz Henig 2004). Aujourd’hui, les résultats de la recherche sur le génome humain semblent moins univoques (Stoczkowski 2006). Il est certes réconfortant de savoir qu’aucun doute ne subsiste sur l’unité génétique de l’espèce humaine. Pourtant, après une première période consacrée à la description des similitudes génétiques, les travaux actuels s’orientent de plus en plus vers l’exploration de la diversité de notre espèce. Plusieurs études publiées récemment tendent à démontrer que des données génétiques permettent bel et bien de faire la distinction entre les individus originaires d’Europe, d’Afrique et d’Extrême-Orient, c’est-à-dire entre les populations traditionnellement réparties par la pensée ordinaire entre les trois grandes « races » : blanche, noire et jaune (Bamshad et al. 2003, Rosenberg et al.,2002, Watkins et al. 2003). Ces travaux dérangent et inquiètent. Ils dérangent car on s’attendait à ce que la génétique rende définitivement illégitime toute classification biologique des humains. C’est le contraire qui semble advenir sous nos yeux. Au lieu de prouver que l’ordre du phénotype, privilégié par la pensée ordinaire, s’écarte de l’ordre du génotype étudié par la science, les travaux récents suggèrent que certaines classifications « raciales » – pour autant qu’elles soient fondées non sur la seule morphologie, mais plutôt sur l’origine géographique – peuvent refléter approximativement une partie de la diversité humaine établie par la génétique moderne (Bamshad et al. 2003; Rosenberg et al. 2002; Watkins et al. 2003). Ces travaux inquiètent aussi, car nul n’ignore que l’étude des différences entre les hommes peut fournir des arguments à ceux qui veulent diviser l’humanité, porter les distinctions à l’absolu, les juger scandaleuses et insupportables. Les généticiens ne manquent pas de souligner que les groupements formés à partir de leurs modèles diffèrent des anciennes catégories raciales, puisque les écarts entre les classes génétiques sont statistiques, relatifs, mouvants, soumis aux vicissitudes de l’histoire faite non seulement de séparations, mais aussi de migrations et de croisements. Il n’en demeure pas moins que le risque existe que les résultats de ces travaux nourrissent à nouveau le phantasme de divergences insurmontables inscrites dans le corps des humains. Les controverses sur la classification infra-spécifique des humains sont loin d’être closes. Quelles que soient les conclusions qui remporteront finalement le consensus de la communauté scientifique, il est probable que la pensée antiraciste soit confrontée dans un avenir proche à une nouvelle légitimité scientifique des classements des humains à partir de critères biologiques, cette fois dans un contexte social où l’aspiration à l’égalité ne passe plus par l’effacement des différences biologiques mais, au contraire, par leur revendication de la part des dominés. Après l’expérience du nazisme, dont l’intérêt exacerbé pour les différences biologiques déboucha sur l’abomination de la Shoah, on était enclin à considérer que toute théorie de la différence biologique devait nécessairement conduire au racisme. On en est moins sûr de nos jours, en observant que les minorités auparavant opprimées cherchent à adosser leur combat contre les inégalités à une théorie de la différence biologique (Oak Ridge National Laboratory). Hier, désireux d’expier le péché de racisme, l’homme blanc fit appel à la science pour rendre insignifiantes les différences biologiques entre les humains ; aujourd’hui, réclamant le droit à l’égalité, l’homme de couleur emploie la science pour donner aux différences biologiques une signification nouvelle. Cette résurgence de l’intérêt de la recherche pour la diversité de l’espèce humaine, en dépit du danger bien réel d’un détournement idéologique de ses résultats, encore très provisoires, peut devenir un antidote contre les spéculations naïves sur la race, qui ne manqueront pas de foisonner dans la culture populaire tant que les chercheurs seront incapables d’expliquer pourquoi les hommes, appartenant tous à la même espèce biologique, n’ont pas pour autant tous la même apparence.
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Cortado, Thomas Jacques. "Maison". Anthropen, 2020. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.131.

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Le champ sémantique de la maison imprègne nos perceptions individuelles et collectives du monde comme peu d’autres. Il suffit de songer à la distinction très marquée entre house et home en anglais, si difficile à retranscrire dans nos langues latines, ou encore aux usages politiques de l’expression « chez nous » en français. Ce champ renvoie à des lieux souvent riches d’affects, de mémoires et de désirs, qui nous définissent en propre et orientent nos perceptions du temps et de l’espace. Ils font d’ailleurs la matière des poètes, peintres et autres artistes. À cet égard, lorsque nous perdons notre maison, nous ne nous retrouvons pas seulement privés d’un bien utile et échangeable, d’un « logement », nous voyons aussi s’effacer une partie de nous-mêmes et le centre à partir duquel s’organise notre existence quotidienne. En dépit de sa densité, les anthropologues ont d’abord rabattu le thème de la maison sur ceux de la famille et de la culture matérielle. Pour Lewis H. Morgan, la forme de l’espace domestique ne fait qu’épouser un certain type d’organisation familiale; elle en est, pour ainsi dire, le révélateur (1877). À la « hutte » des « sauvages » correspond donc la famille consanguine, qui autorise le mariage entre cousins, alors qu’à la « maison commune » des « barbares » correspond la famille patriarcale, autoritaire et polygame. Les « maisons unifamiliales » de l’Occident contemporain renvoient à la famille nucléaire, fondement de la « civilisation ». Quant aux anthropologues davantage intéressés par l’architecture et les artefacts domestiques, leurs analyses consistent souvent à expliquer leur genèse en accord avec une vision évolutionniste du progrès technique ou par des facteurs géographiques. On aurait pu s’attendre à ce que l’invention de l’ethnographie par Bronislaw Malinowski ouvre de nouvelles perspectives. Avec elle, c’est en effet un certain rapport à la maison qui se met à définir le métier d’anthropologue, celui-là même qu’exemplifie la célèbre représentation de ce dernier sous sa tente, immortalisée dans la première planche photographique des Argonautes du Pacifique occidental. Pour autant, la maison reste un objet secondaire par rapport à l’organisation de la vie familiale, le vrai principe de la société. Elle est avant tout le lieu où le couple choisit de résider après le mariage et ce choix se plie à certaines « règles », dont on peut assez facilement faire l’inventaire, grâce aux liens de filiation entre les membres du couple et les autres résidents (Murdock 1949). On parlera, par exemple, de résidence « matrilocale » quand le couple emménage chez les parents de l’épouse, « patrilocale » dans le cas inverse. Quant aux sociétés occidentales, où le couple forme habituellement un nouveau ménage, on parlera de résidence « néolocale ». La critique de ces règles permet, dans les années 1950 et 1960, d’étendre la réflexion sur la maison. Face aux difficultés concrètes que pose leur identification, Ward Goodenough suggère d’abandonner les taxinomies qui « n’existent que dans la tête des anthropologues » et de « déterminer quels sont, de fait, les choix résidentiels que les membres de la société étudiée peuvent faire au sein de leur milieu socioculturel particulier » (1956 : 29). Autrement dit, plutôt que de partir d’un inventaire théorique, il faut commencer par l’étude des catégories natives impliquées dans les choix résidentiels. La seconde critique est de Meyer Fortes, qui formule le concept de « groupe domestique », « unité qui contrôle et assure l’entretien de la maison (householding and housekeeping unit), organisée de façon à offrir à ses membres les ressources matérielles et culturelles nécessaires à leur conservation et à leur éducation » (1962 : 8). Le groupe domestique, à l’instar des organismes vivants, connaît un « cycle de développement ». En Europe du sud, par exemple, les enfants quittent le domicile parental lorsqu’ils se marient, mais y reviennent en cas de rupture conjugale ou de chômage prolongé ; âgés, les parents souvent cherchent à habiter près de leurs enfants. En conséquence, « les modèles de résidence sont la cristallisation, à un moment donné, d’un processus de développement » (Fortes 1962 : 5), et non l’application statique de règles abstraites. La maison n’est donc pas seulement le lieu où réside la famille, elle est nécessaire à l’accomplissement de tâches indispensables à la reproduction physique et morale des individus, telles que manger, dormir ou assurer l’éducation des nouvelles générations (Bender 1967). Cette conception du groupe domestique rejoint celle qu’avait formulée Frédéric Le Play un siècle auparavant : pour l’ingénieur français, il fallait placer la maison au centre de l’organisation familiale, par la défense de l’autorité paternelle et la transmission de la propriété à un héritier unique, de façon à garantir la stabilité de l’ordre social (1864). Elle exerce de fait une influence considérable sur les historiens de la famille, en particulier ceux du Cambridge Group for the History of Population and Social Structure, dirigé par Peter Laslett (1972), et sur les anthropologues (Netting, Wilk & Arnould 1984), notamment les marxistes (Sahlins 1976). En Amérique latine, de nombreuses enquêtes menées dans les années 1960 et 1970 mettent en évidence l’importance des réseaux d’entraide, attirant ainsi l’attention sur le rôle essentiel du voisinage (Lewis 1959, Lomnitz 1975). La recherche féministe explore quant à elle le caractère genré de la répartition des tâches au sein du groupe domestique, que recoupe souvent la distinction entre le public et le privé : à la « maîtresse de maison » en charge des tâches ménagères s’oppose le « chef de famille » qui apporte le pain quotidien (Yanagisako 1979). Un tel découpage contribue à invisibiliser le travail féminin (di Leonardo 1987). On remarquera néanmoins que la théorie du groupe domestique pense la maison à partir de fonctions établies par avance : ce sont elles qui orientent l’intérêt des anthropologues, plus que la maison en elle-même. C’est à Claude Lévi-Strauss que l’on doit la tentative la plus systématique de penser la maison comme un principe producteur de la société (1984 ; 2004). Celui-ci prend pour point de départ l’organisation sociale de l’aristocratie kwakiutl (Amérique du Nord), telle qu’elle avait été étudiée par Franz Boas : parce qu’elle présentait des traits à la fois matrilinéaires et patrilinéaires, parce qu’elle ne respectait pas toujours le principe d’exogamie, celle-ci défiait les théories classiques de la parenté. Lévi-Strauss propose de résoudre le problème en substituant le groupe d’unifiliation, tenu pour être au fondement des sociétés dites traditionnelles, par celui de « maison », au sens où l’on parlait de « maison noble » au Moyen Âge. La maison désigne ainsi une « personne morale détentrice d’un domaine, qui se perpétue par transmission de son nom, de sa fortune et de ses titres en ligne réelle ou fictive » (Lévi-Strauss 1984 : 190). Plus que les règles de parenté, ce sont les « rapports de pouvoir » entre ces « personnes morales » qui déterminent les formes du mariage et de la filiation : celles-ci peuvent donc varier en accord avec les équilibres politiques. Lévi-Strauss va ensuite généraliser son analyse à un vaste ensemble de sociétés apparemment cognatiques, qu’il baptise « sociétés à maison ». Celles-ci se situeraient dans une phase intermédiaire de l’évolution historique, « dans un état de la structure où les intérêts politiques et économiques tend[ent] à envahir le champ social » (Lévi-Strauss 1984 : 190). Très discuté par les spécialistes des sociétés concernées, ce modèle a eu la grande vertu de libérer l’imagination des anthropologues. Critiquant son évolutionnisme sous-jacent, Janet Carsten et Stephen Hugh-Jones (1995) proposent toutefois d’approfondir la démarche de Lévi-Strauss, en considérant la maison comme un véritable « fait social total ». L’architecture, par exemple, ne relève pas que d’une anthropologie des techniques : celle de la maison kabyle, analysée par Pierre Bourdieu, met en évidence un « microcosme organisé selon les mêmes oppositions et mêmes homologies qui ordonnent tout l’univers » (1972 : 71), un parallélisme que l’on retrouve dans de nombreux autres contextes socioculturels (Hamberger 2010). Fondamentalement, la maison relève d’une anthropologie du corps. Dans son enquête sur la parenté en Malaisie, Carsten souligne le rôle joué par la cuisine ou le foyer, en permettant la circulation des substances qui assurent la production et la reproduction des corps (alimentation, lait maternel, sang) et leur mise en relation, ce que Carsten appelle la « relationalité » (relatedness) (1995). Fait dynamique plutôt que statique, la maison nous met directement au contact des processus qui forment et reforment nos relations et notre personne : son étude permet donc de dépasser la critique culturaliste des travaux sur la parenté; elle nous montre la parenté en train de se faire. Il convient aussi de ne pas réduire la maison à ses murs : celle-ci le plus souvent existe au sein d’un réseau. Les enquêtes menées par Émile Lebris et ses collègues sur l’organisation de l’espace dans les villes d’Afrique francophone proposent ainsi le concept de « système résidentiel » pour désigner « un ensemble articulé de lieux de résidences (unités d’habitation) des membres d’une famille étendue ou élargie » (Le Bris 1985 : 25). Ils distinguent notamment entre les systèmes « centripètes », « de concentration en un même lieu d’un segment de lignage, d’une famille élargie ou composée » et les systèmes « centrifuges », de « segmentation d’un groupe familial dont les fragments s’installent en plusieurs unités résidentielles plus ou moins proches les unes des autres, mais qui tissent entre elles des liens étroits » (Le Bris 1985 : 25). Examinant les projets et réseaux que mobilise la construction d’une maison dans les quartiers noirs de la Bahia au Brésil, les circulations quotidiennes de personnes et d’objets entre unités domestiques ainsi que les rituels et fêtes de famille, Louis Marcelin en déduit lui aussi que la maison « n’est pas une entité isolée, repliée sur elle-même. La maison n’existe que dans le contexte d’un réseau d’unités domestiques. Elle est pensée et vécue en interrelation avec d’autres maisons qui participent à sa construction – au sens symbolique et concret. Elle fait partie d’une configuration » (Marcelin 1999 : 37). À la différence de Lebris, toutefois, Marcelin part des expériences individuelles et des catégories socioculturelles propres à la société étudiée : une « maison », c’est avant tout ce que les personnes identifient comme tel, et qui ne correspond pas nécessairement à l’image idéale que l’on se fait de cette dernière en Occident. « La configuration de maisons rend compte d’un espace aux frontières paradoxalement floues (pour l'observateur) et nettes (pour les agents) dans lequel se déroule un processus perpétuel de création et de recréation de liens (réseaux) de coopération et d'échange entre des entités autonomes (les maisons) » (Marcelin 1996 : 133). La découverte de ces configurations a ouvert un champ de recherche actuellement des plus dynamiques, « la nouvelle anthropologie de la maison » (Cortado à paraître). Cette « nouvelle anthropologie » montre notamment que les configurations de maisons ne sont pas l’apanage des pauvres, puisqu’elles organisent aussi le quotidien des élites, que ce soit dans les quartiers bourgeois de Porto au Portugal (Pina-Cabral 2014) ou ceux de Santiago au Chili (Araos 2016) – elles ne sont donc pas réductibles à de simples « stratégies de survie ». Quoiqu’elles se construisent souvent à l’échelle d’une parcelle ou d’un quartier (Cortado 2019), ces configurations peuvent très bien se déployer à un niveau transnational, comme c’est le cas au sein de la diaspora haïtienne (Handerson à paraître) ou parmi les noirs marrons qui habitent à la frontière entre la Guyane et le Suriname (Léobal 2019). Ces configurations prennent toutefois des formes très différentes, en accord avec les règles de filiation, bien sûr (Pina-Cabral 2014), mais aussi les pratiques religieuses (Dalmaso 2018), le droit à la propriété (Márquez 2014) ou l’organisation politique locale – la fidélité au chef, par exemple, est au fondement de ce que David Webster appelle les « vicinalités » (vicinality), ces regroupements de maisons qu’il a pu observer chez les Chopes au sud du Mozambique (Webster 2009). Des configurations surgissent même en l’absence de liens familiaux, sur la base de l’entraide locale, par exemple (Motta 2013). Enfin, il convient de souligner que de telles configurations ne sont pas, loin de là, harmonieuses, mais qu’elles sont généralement traversées de conflits plus ou moins ouverts. Dans la Bahia, les configurations de maisons, dit Marcelin, mettent en jeu une « structure de tension entre hiérarchie et autonomie, entre collectivisme et individualisme » (Marcelin 1999 : 38). En tant que « fait social total », dynamique et relationnel, l’anthropologie de la maison ne saurait pourtant se restreindre à celle de l’organisation familiale. L’étude des matérialités domestiques (architecture, mobilier, décoration) nous permet par exemple d’accéder aux dimensions esthétiques, narratives et politiques de grands processus historiques, que ce soit la formation de la classe moyenne en Occident (Miller 2001) ou la consolidation des bidonvilles dans le Sud global (Cavalcanti 2012). Elle nous invite à penser différents degrés de la maison, de la tente dans les camps de réfugiés ou de travailleurs immigrés à la maison en dur (Abourahme 2014, Guedes 2017), en passant par la maison mobile (Leivestad 2018) : pas tout à fait des maisons, ces formes d’habitat n’en continuent pas moins de se définir par rapport à une certaine « idée de la maison » (Douglas 1991). La maison relève aussi d’une anthropologie de la politique. En effet, la maison est une construction idéologique, l’objet de discours politiquement orientés qui visent, par exemple, à assoir l’autorité du père sur la famille (Sabbean 1990) ou à « moraliser » les classes laborieuses (Rabinow 1995). Elle est également la cible et le socle des nombreuses technologiques politiques qui organisent notre quotidien : la « gouvernementalisation » des sociétés contemporaines se confond en partie avec la pénétration du foyer par les appareils de pouvoir (Foucault 2004); la « pacification » des populations indigènes passe bien souvent par leur sédentarisation (Comaroff & Comaroff 1992). Enfin, la maison relève d’une anthropologie de l’économie. La production domestique constitue bien sûr un objet de première importance, qui bénéficie aujourd’hui d’un regain d’intérêt. Florence Weber et Sybille Gollac parlent ainsi de « maisonnée » pour désigner les collectifs de travail domestique fondés sur l’attachement à une maison – par exemple, un groupe de frères et sœurs qui s’occupent ensemble d’un parent âgé ou qui œuvrent à la préservation de la maison familiale (Weber 2002, Gollac 2003). Dans la tradition du substantialisme, d’autres anthropologues partent aujourd’hui de la maison pour analyser notre rapport concret à l’économie, la circulation des flux monétaires, par exemple, et ainsi critiquer les représentations dominantes, notamment celles qui conçoivent l’économie comme un champ autonome et séparé (Gudeman et Riviera 1990; Motta 2013) – il ne faut pas oublier que le grec oikonomia désignait à l’origine le bon gouvernement de la maison, une conception qui aujourd’hui encore organise les pratiques quotidiennes (De l’Estoile 2014). Cycles de vie, organisation du travail domestique, formes de domination, identités de genre, solidarités locales, rituels et cosmovisions, techniques et production du corps, circulation des objets et des personnes, droits de propriété, appropriations de l’espace, perceptions du temps, idéologies, technologies politiques, flux monétaires… Le thème de la maison s’avère d’une formidable richesse empirique et théorique, et par-là même une porte d’entrée privilégiée à de nombreuses questions qui préoccupent l’anthropologie contemporaine.
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