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Veríssimo Serrão, Adriana. "O Adeus à Essência. Natureza, Cultura e Carácter na Antropologia Filosófica da Época Moderna". Philosophica: International Journal for the History of Philosophy 8, n.º 15 (2000): 135–49. http://dx.doi.org/10.5840/philosophica200081510.

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L’extrordinaire essor de l’intérêt anthropologique, que la seconde moitié du XVIIIème siècle a connnu dans des domaines aussi différents que les sciences de la nature ou les études géographiques et ethnologiques, a demandé à la philosophie d’élaborer, de sa part, de nouvelles bases théoriques et conceptuelles pour l’établissement d’une réflexion sur l’homme désormais libérée de l’abstraction et des dualismes de la pensée métaphysique et théologique précédente. Les notions de nature humaine et de genre humain ont permis a la philosophie de parvenir à une vision concrète et dynamique, surmontant la clôture des anciennes définitions de l’être humain comme “animal rationel” ou “image de Dieu”. Dans cet article on cherche à saisir ce mouvement d’un “adieu à l’essence” en anthropologie philosophique, en suivant les conceptions de perfectibilité dans le Discours sur l'inégalité de Rousseau, de culture dans l'Essai sur l'origine du langage de Herder et de caractère dans l’Anthropologie pragmatique de Kant.
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Bédard-Goulet, Sara. "Modalités de l’habiter contemporain et personnages dits sans domicile fixe dans L’Équipée malaise et Un an de Jean Echenoz". L'Esprit Créateur 63, n.º 2 (junho de 2023): 33–50. http://dx.doi.org/10.1353/esp.2023.a901818.

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Abstract: Cet article examine deux modalités nomades de l’habiter contemporain dans les romans L’Équipée malaise (1986) et Un an (1997) de l’auteur contemporain français Jean Echenoz. En s’appuyant sur une anthropologie et une clinique de l’habiter, ainsi que sur la propre itinérance narrative de l’auteur, il étudie les pratiques spatiales de personnages dits sans domicile fixe afin d’identifier le rapport à l’espace qu’ils présentent. Cette analyse permet de nourrir la réflexion sur l’habiter contemporain, qui apparaît relever davantage, chez Echenoz, d’une ontologie relationnelle que d’une métaphysique du lieu.
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Merabet, Sabrina. "Compte rendu : Au bord des mondes, vers une anthropologie métaphysique de Mohamed Amer Meziane". Recherches en psychanalyse N° 35/36, n.º 1/2 (5 de abril de 2024): 318–26. http://dx.doi.org/10.3917/rep2.035.36.0318.

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L’anthropologie de la nature permet-elle de sortir du monde théorico-impérial ? Cet article propose de présenter la réponse que nous apporte le philosophe Mohamed Amer Meziane à travers son second ouvrage Au bord des mondes, vers une anthropologie métaphysique publié aux Éditions Vues de l’Esprit. Ce compte rendu souhaite mettre en exergue la richesse d’une approche philosophique de l’anthropologie permettant d’amorcer une véritable décolonisation des savoirs. Au-delà de proposer une critique de la subsistance d’arrière-mondes coloniaux dans l’ombre du monde de l’anthropologie de la nature, l’œuvre de Mohamed Amer Meziane injecte du sens dans les bords du monde, de la tradition soufie à la psychanalyse, faisant ainsi de cet ouvrage un geste éminemment politique et philosophique, mais, surtout, profondément anticolonial.
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Valerio Tommasi, Francesco. "L’ontologie comme anthropologie transcendantale : Kant et le problème de la métaphysique aux alentours de 1775". Les Études philosophiques N°203, n.º 3 (2020): 109. http://dx.doi.org/10.3917/leph.203.0109.

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Eczet, Jean-Baptiste. "Essences, espèces et qualités". Cahiers philosophiques N° 172, n.º 1 (20 de outubro de 2023): 61–83. http://dx.doi.org/10.3917/caph1.172.0063.

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L’anthropologie ne cesse aujourd’hui de déconstruire les processus d’essentialisation de divers groupes sociaux dans une visée critique et politique. À la suite du tournant ontologique, certains travaux entendent désormais dépasser, dans une visée inclusive, les distinctions d’essences et les typologies d’espèces pour décrire le continuum des agency entre des existants que la modernité aurait séparés. Mais ces approches d’inspiration animiste, et que je nomme la nouvelle métaphysique en anthropologie, n’exploitent qu’une modalité possible de la relation homme-animal. À l’aune de certaines pratiques Mursi, une population agro-pastorale du sud-ouest éthiopien, je présente donc une autre modalité de la relation homme-animal, agençant de manière originale les espèces humaines et bovines : bien que partageant une essence commune, il n’y a pas d’extension anthropomorphe de la subjectivité, et les bovins ne sont pas des sujets équivalents en morale ou en droit.
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Labrusse, Rémi. "L’ornement à la conquête de soi. Tectonique, métaphysique et anthropologie chez Karl Bötticher et Gottfried Semper". Gradhiva, n.º 25 (31 de maio de 2017): 50–79. http://dx.doi.org/10.4000/gradhiva.3363.

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Lurson, Guillaume. "La métaphysique sauvage. Réflexions autour de Lévy-Bruhl et de la connexion entre philosophie et anthropologie". Revue philosophique de la France et de l'étranger Tome 146, n.º 2 (22 de março de 2021): 223–40. http://dx.doi.org/10.3917/rphi.212.0223.

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Park, Daeseung. "La comparaison et la traduction au-delà des images du miroir anthropologique: la « contre-anthropologie multinaturaliste » de Métaphysiques cannibales". AUC INTERPRETATIONES 8, n.º 2 (30 de junho de 2020): 13–34. http://dx.doi.org/10.14712/24646504.2020.2.

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Louis, Fabrice. "L’essence du sport. Pour une approche anthropologique et métaphysique". Staps 124, n.º 2 (2019): 59. http://dx.doi.org/10.3917/sta.124.0059.

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Doucet, Hubert. "La bioéthique et les défis posés à la théologie". Théologiques 14, n.º 1-2 (29 de novembro de 2006): 227–40. http://dx.doi.org/10.7202/014321ar.

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Résumé Le texte vise à faire voir l’enrichissement mutuel que pourraient tirer la bioéthique et la théologie à développer un dialogue plus poussé que celui qui est actuellement poursuivi. Il comprend trois parties. La première, d’ordre historique, rappelle et interprète les hauts et les bas de la relation entre les deux disciplines. La deuxième partie présente les types d’enjeux auxquels les développements biomédicaux confrontent l’humanité actuelle. La bioéthique qui s’est imposée, de nature déontologique et juridique, ne peut y faire face puisque les enjeux sont d’ordre anthropologique et même métaphysique. D’où la contribution possible de la théologie. La troisième partie aborde les conditions posées à la théologie pour qu’elle puisse enrichir le forum citoyen qu’exigent les défis que posent les développements biomédicaux.
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Rappin, Baptiste. "Société industrielle, management et déconstruction : une tentative d’articulation". Transversalités 167, n.º 4 (9 de outubro de 2023): 147–74. http://dx.doi.org/10.3917/trans.167.0147.

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La déconstruction est généralement considérée comme une pensée anticapitaliste. À rebours, cette étude souhaite analyser de façon approfondie les rapports entre déconstruction et société industrielle. Dans un premier temps, après avoir exposé les définitions du management scientifique et de la déconstruction, nous envisageons leur convergence sous deux angles : celui des effets et celui de l’origine. Dans un second temps, nous élargissons le spectre de l’analyse en identifiant et décrivant le rôle anthropologique de la déconstruction au sein de la société industrielle. D’une part, les auteurs de la déconstruction critiquent les analogies de la métaphysique qui reproduisent l’imaginaire néolithique : tel est plus particulièrement le cas de la métaphore de l’arbre ; d’autre part, ils promeuvent une pensée qui fait écho, et même légitime, la structure réticulaire de la société industrielle.
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Berthelier, Benoît. "La forme humaine". Estudos Nietzsche 13, n.º 2 (2 de março de 2023): 01–31. http://dx.doi.org/10.47456/en.v13i2.39737.

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La question « À quoi reconnaît-on un être humain ? » fait planer un certain doute sur notre capacité à reconnaître la forme humaine dans les multiples apparences que peut revêtir la vie. C’est sur fond de cette inquiétude sceptique, prenant acte du caractère instable, indistinct et pluriel de la vie humaine, que s’élaborent trois anthropologies philosophiques ici mises en dialogue : celle de Montaigne, de Nietzsche et de Wittgenstein. Ces trois auteurs ne se donnent pas tant pour objet la définition de l’homme que son indéfinition. Ils ne cherchent pas tant à savoir ce qu’est l’humain qu’à interroger le sens qu’il peut y avoir à formuler la question de ce qu’il est en termes de savoir. S’il y a un « humanisme » de Montaigne, de Nietzsche et de Wittgenstein, il n’est donc pas à chercher dans une thèse sur l’homme ou une profession de foi quant à sa dignité, mais dans l’élucidation ce que peut vouloir dire reconnaître l’humanité de l’humain au-delà de l’exigence métaphysique d’une définition de son essence, et de la déception sceptique qu’une telle exigence ne peut manquer de susciter.
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Dufourcq, Annabelle. "Perder y re-encontrar el mundo. Hacia una fenomenología no-gnóstica". Investigaciones Fenomenológicas, n.º 8 (29 de setembro de 2023): 151–69. http://dx.doi.org/10.5944/rif.8.2023.38064.

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En Métaphysique du sentiment, Renaud Barbaras contrapone una teoría del amor y de la superabundancia del ser –que se fenomenaliza sin agotarse nunca– a una tendencia acósmica del existencialismo –según la cual la fenomenalización comienza cuando el ser humano es arrebatado de la absorción a lo que simplemente es–. Por otro lado, Barbaras desarrolla una teoría del exilio humano, esta vez utilizando todos los códigos del mito de la separación. Este artículo analiza la fuerte tensión que existe en Métaphysique du sentiment entre una línea plotiniana y otra opuesta, gnóstica. Muestra que esta tensión es una nueva expresión de un patrón fundamental y recurrente en la filosofía moderna y contemporánea, para el que he acuñado el nombre de complejo de Chandos. Este complejo se manifiesta en el intento de mantener unidas, de forma inevitablemente escenificada y engañosa, la narrativa de una supuesta continuidad dichosa entre lo humano y la naturaleza, y la del patético desarraigo que separa a los sujetos de la naturaleza. También encontramos este complejo en cierta ambigüedad de la teoría de la carne de Merleau-Ponty. En el Seminario de Buenos Aires, sin embargo, Barbaras esboza una vía alternativa, que será el eje de L’appartenance, y que nos permitirá superar esta moderna narrativa chandossiana. Para lograr tal superación, este trabajo propone definir el ser como una proliferación de diversos y ya poéticos procesos de individuación.
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Couture, Jean-Pierre. "Effets de sphères. L'histoire des architectures politiques chez Peter Sloterdijk". Canadian Journal of Political Science 43, n.º 3 (setembro de 2010): 545–63. http://dx.doi.org/10.1017/s0008423910000417.

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Résumé. Cet article prend pour matériau le dernier cycle de l'œuvre de Peter Sloterdijk, lequel s'est attelé au développement d'une analyse phénoménologique de la spatialité humaine. L'optique de notre contribution consiste à faire état de cette théorisation spatiale à l'égard des constructions politiques. Cette entreprise se présente comme une vaste histoire des traces cosmologiques et architecturales des lieux de production de l'humanité et elle vise une réappropriation de la réflexion anthropologique sur le topos de l'humanité qui a été longtemps subsumé par la métaphysique de l'au-delà et qui est aujourd'hui désagrégé par les processus de mobilisation totale du capital.Abstract. This paper proposes an account of the recent works of Peter Sloterdijk, an author that has developed a phenomenological analysis of human spaces. The aim of my contribution is to put this spatial theorization in relation with political constructions. Sloterdijk's enterprise presents itself as a long history of the cosmological and architectural elements that shape the very spaces of human-production. It is also described as a new path for the understanding of the human topos that has been for too long subsumed by metaphysics of the ‘beyond’ and liquefied nowadays by contemporary mobilization processes of the capital.
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Aufrère, Marie-Françoise. "Boucher de Perthes (1788–1868). Des rêves métaphysiques à l’invention de la préhistoire". L'Anthropologie 125, n.º 3 (julho de 2021): 102904. http://dx.doi.org/10.1016/j.anthro.2021.102904.

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López Sáenz, María del Carmen. "De camino al sentir por la <i>aisthesis</i> y el <i>logos</i> que la habita. En diálogo con Renaud Barbaras". Investigaciones Fenomenológicas, n.º 8 (29 de setembro de 2023): 197–228. http://dx.doi.org/10.5944/rif.8.2023.38012.

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Este artículo pretende dilucidar el significado del sentir profundizando en la fenomenología genética y dialogando con la ontología fenomenológica, particularmente con la Métaphysique du sentiment de R. Barbaras. Comienza descubriendo los sentidos del cuerpo y lo que denominamos “re-flexión” corporal, siempre vinculada a la aisthesis (lato y stricto sensu) y a la afectividad. Aborda posteriormente la correlación entre fenomenología y estética como ejemplo de la pasividad en la actividad del sentir. Comprenderemos esta dinámica como movimiento ontológico que aúna la aisthesis con el logos y exige ser expresado. Cézanne estará presente en esta investigación, como lo estuvo en la obra de Merleau-Ponty y de Maldiney, porque su pintura encarna ese movimiento en el que la creación es necesaria para experimentar y expresar el ser, y porque filosofía y arte son indispensables para sentir y pensar. Aceptaremos la crítica que Barbaras dirige Maldiney, mientras que continuaremos desarrollando la ontología fenomenológica de Merleau-Ponty para arrojar luz sobre le sentir.
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d’Onofrio, Giulio. "La voix de l’abîme. L’herméneutique du mal dans Inf . III, 25-27". Les Études philosophiques N° 147, n.º 4 (14 de novembro de 2023): 51–64. http://dx.doi.org/10.3917/leph.234.0051.

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Dans les premiers chants de l’ Enfer , Dante déclare entre les lignes la tâche à laquelle il se sent appelé en tant que « poète chrétien » : d’un côté, il est invité à argumenter avec la rigueur du discours scientifique les vérités fondamentales de la religion ; de l’autre côté, il lui est confié la charge d’entraîner le lecteur dans une lecture anagogique de ces vérités en recourant aux fascinations allégoriques de la poésie. En accomplissant cette mission, Dante obtiendra, pour lui-même et pour les autres êtres humains, cette perfection anthropologique naturelle qui culmine, après la mort terrestre, par le retour aux conditions métaphysiques qui se seraient actualisées en la personne d’Adam s’il n’avait pas péché. Cette conception est déjà opérante dans certaines pages de la Vie nouvelle et du Banquet , mais c’est surtout dans La Divine Comédie que Dante en revient spontanément à ce genre de techniques sur un mode original et particulièrement efficace. On en a un exemple éclairant quand, au Chant III de l’ Enfer , la poésie décrit le tourbillon, apparemment disharmonieux et dépourvu de sens, des sons qui émergent de la cavité infernale, en se basant non seulement sur l’application évidente d’au moins deux artifices rhétoriques déterminés, mais surtout sur l’évocation formellement rigoureuse des règles de la dialectique (selon la terminologie en usage dans les écoles) : le succès de cette opération dépend de la capacité, de la part du lecteur, de retrouver la signification authentique de la terminologie scientifique mise en œuvre en poésie, utilisée pour illustrer les vérités de la foi et la nouvelle beauté de la synthèse entre art poétique et disciplines du Trivium .
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Φερεντίνου, Βικτώρια. "ΒΙΚΤΩΡΙΑ ΦΕΡΕΝΤΙΝΟΥ, Τα συγκοινωνούντα δοχεία μιας υβριδικής ποιητικής: Ο μύθος ως διακαλλιτεχνική και διαπολιτισμική ώσμωση στο έργο του Νίκου Εγγονόπουλου". Σύγκριση 31 (28 de dezembro de 2022): 28–41. http://dx.doi.org/10.12681/comparison.31272.

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The Communicating Vessels of a Hybrid Poetics: Myth as Intermedial and Intercultural Osmosis in the Oeuvre of Nikos Engonopoulos In 1938, the year of the International Exhibition of Surrealism at the Gallery Beaux-Arts in Paris, the poet and painter Nikos Engonopoulos created Birth of Orpheus and Genesis of Myth. The depiction of the birth of young Orpheus as emblematic of the construction of myth recalls the mythopoetic process as articulated in the anthology of the poet, psychoanalyst and photographer Andreas Embeirikos, Writings or Personal Mythology (1936-1946): “Each myth’s becoming is a child who grows up.” This reception of myth should be situated in the context of the French surrealists’ endeavour to formulate a new collective mythology that would respond to the political and social environment of the interwar years. This collective mythology resorted to cultural topoi that were deemed countercultural, marginalised or anti-Enlightenment, ranging from primitive, prehistoric and Gothic art to magic, alchemy and mythological traditions of archaic or non-European cultures. In this framework, surrealist myth was reconfigured as a new poetic language in constant metamorphosis that could articulate through diverse media and cultural traditions the surrealist vision for the radical transformation of the world. In Greece the appropriations of classical myth were central to the modernist canon. However, the Greek surrealists transformed myth in subversive ways initiating a dialogue with the present in the light of anthropology, ethnography, history of religions and psychoanalysis. Recent research has shown that Embeirikos and Engonopoulos conversed with French Surrealism and their colleagues’ engagement with alternative epistemologies and comparative religion and mythology, participating to a fecund renegotiation of the past. This paper aims at contributing to the revision of the history of Surrealism in Greece by exploring the function of myth, both as intermedial language and discursive practice, in Engonopoulos’s work. Most specifically, it purports to investigate the poetic anthologies Do not Speak to the Driver (1938) and The Clavichords of Silence (1939) alongside visual works he created at the end of the 1930s, such as the drawing SO4H2 (1937), and the engraving Vierge inviolable, métaphysique et surréaliste-sonore (1930s). The subtitles given initially to the aforementioned anthologies allude to the comparison of the arts and the equation of poetry and painting in an alchemical fusion pursued by the historical avant-gardes and Surrealism. Engonopoulos’s work and his experimentations with image-making should be revisited within this context and seen as a paradigm of the formulation of a new myth that sought to interweave the visual arts, poetry and alternative epistemologies into a revolutionary, hybrid form of expression that could effect the individual and society.
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Yip, Julianne. "Chasing Rotten Ice". Social Anthropology/Anthropologie Sociale 32, n.º 1 (1 de março de 2024): 64–79. http://dx.doi.org/10.3167/saas.2024.320106.

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Abstract Changing sea ice due to anthropogenic climate change demands scientists to revisit their taken-for-granted concepts of sea ice. The ‘rotten ice project’ was one such effort by scientists at the University of Washington's Polar Science Center, which sought to develop novel methods to characterise sea ice as a physical-biological-chemical unit. Rotten ice, however, evaded scientists’ efforts to capture it. Using these ‘escapes’ from scientists’ preconceptions during my fieldwork with the team from 2014 to 2016, I draw on interpretations of Georges Canguilhem's understanding of the relationship between life and knowledge to make sense of what rotten ice demanded. Following Canguilhem's suggestions, I argue that vitalism as an ethos treats concepts as tools for scientists to relate to their environment, challenging them to to remain receptive to the difference that error, experimentation and encounters made to their concepts—and thereby stay open to more-than-human worlds like those found in sea ice. Résumé Les modifications que la glace de mer connaît sous l'influence du changement climatique ont incité les scientifiques à revisiter leurs conceptions acquises sur cette glace de mer. Le « projet pourrissement » est l'un de ces efforts mis en œuvre par les scientifiques du Center de Science Polaire de Washington University. Il cherche à développer de nouvelles méthodes pour caractériser la glace de mer comme unité physique-biologique. La glace pourrissante, néanmoins, est jusqu’à présent parvenue à résister et à échapper aux efforts des scientifiques pour la capturer. En utilisant ces « échappées » des préconceptions des scientifiques durant mon terrain avec l’équipe entre 2014 et 2016, j'ai élaboré mon argument à partir d'une interprétation de la compréhension que Georges Canguilhem a esquissée des relations entre la vie et le savoir ; ceci afin de faire sens de ce que cette glace pourrissante demandait. Comme suggéré par Canguilhem, le vitalisme comme ethos plutôt que comme métaphysique de la matière traite les concepts comme un outil à l'aide duquel les humains peuvent se relier à leurs environnements. Un ethos vitaliste défie les scientifiques de développer des sensibilités aux contingences du savoir scientifique et de rester réceptifs et ouverts aux différences que l'erreur, l'expérimentation et les rencontres font à leurs concepts. Un ethos vitaliste suggère en effet une approche plus intéressée à ceux des concepts qui ne sont pas réduits par les sachants humains ou leurs idéalismes et demeurent ouverte à la découverte des mondes au-delà de l'humain.
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Cazenave, Annie. "Hérésie et Société". Heresis 13, n.º 1 (1989): 7–61. http://dx.doi.org/10.3406/heres.1989.1091.

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L’idée d’hérésie dérive de celle de norme religieuse édictée par un pouvoir, qui use de contrainte. Que la divergence soit juridiquement imputée, ou qu’elle soit revendiquée par une communauté, à l’origine existent un refus et un désir. Dans la cohésion apparente de la société une fêlure, une brisure, une faille, permettent leur naissance. Mais, s’il se trouve dans un groupe un élément qui le prédispose à la dissidence, le point décisif réside dans le passage de l’existentiel à l’ontologique, de la constatation douloureuse de l’existence du mal à la croyance au dieu du Mal. On tente donc, dans un double registre, une lecture anthropologique des phénomènes religieux du Languedoc médiéval, et une compréhension de leur spiritualité. Entre «l’esprit de la civilisation méridionale» et le rituel cathare, l’affinité, mise en évidence par R. Ourliac, mène à l’hypothèse d’un imaginaire dont les traits récurrents permettraient l’adoption d’une métaphysique autre. Après la Croisade, et la victoire définitive du roi de France, l’identité occitane blessée se réfugie dans l’espérance messianique. Dans la seconde moitié du XIIIe siècle et au début du XIVe la mystique s’allie au politique pour trouver dans l’avenir la revanche de l’histoire. Cet espoir se condense dans les conditions d’écriture et les effets de lecture de la Postille sur l’Apocalypse de Pierre Dejean Olieu : car il identifie la prise et le sac de Béziers par les Croisés à la rupture du sixième sceau, transposant ainsi, pour la rendre supportable, la fin d’une civilisation dans le champ du sacral. Il existe en effet une mystique occitane, comparable à la mystique rhénane, mais occultée parce qu’hétérodoxe, et parce que la langue d’oc était la langue des vaincus. Cette mystique s’inspire des victorins, Richard de St Victor et surtout l’abbé de Verceil, Thomas Gallus, et de la tradition orale franciscaine, transmise en particulier par frère Léon. Ce milieu spirituel, familier de la théologie négative, entoure et explique Pierre Dejean Olieu. Or, le tribunal d’inquisition, conséquence de la Croisade, devient à leurs yeux la marque de l’impureté de l’Église temporelle, à laquelle succédera l’état évangélique, inauguré par l’imposition des stigmates à François. Déçus par le refus du roi de France d’abolir l’Office, ils se tournent un temps vers le royaume de Majorque, dans lequel, sous l’influence de prophéties, ils voient leur avenir politique. Cette «trahison» concrétisait un espoir de transformation de l’ordre social. L’échec de la contestation interne et théologique mène à la rupture : l’isolat des «élus», dont la pauvreté est le signe, par rejet du présent, en reproduit la figure inversée. En Pierre Dejean Olieu ils trouvent enfin la personnalité charismatique dont la pensée, en transcendant l’histoire, donne un sens au malheur. Les rapports des Spirituels et de leur tiers Ordre avec le catharisme tiennent donc à la réflexion sur les événements, qui rend signifiant le désastre de la Croisade en le replaçant dans la progression d’une série. L’espoir né de cette interprétation, teintée de joachimisme, a fait le succès de la Postille auprès des communautés béguines. Leur succession sur une même terre lie les deux mouvements dans un même schéma de contestation dont ils forment deux phases distinctes. Comme toute mise en cause, ils posent une interrogation collective à leur propre société ; et cette interrogation apporte au malaise initial de chaque croyant une réponse individuelle. A l’origine formées par des choix personnels, les micro-sociétés fortifient chacun par la croyance de tous. Aussi, en passant du refus externe à l’attitude interne, entre deux phénomènes religieux différents dans leurs conceptions de la déité, de la création et du temps, on se hasarde pourtant à trouver une parenté dans une semblable démarche du fidèle qui, pénétré du néant de la créature, fait d’abord l’expérience de l’exil intérieur, pour se purifier ensuite par degrés et participer à une espérance commune en poursuivant sa quête de l’absolu.
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Sommer, Christian. "Anthropologie de la phénoménologie, phénoménologie de l’anthropologie". DoisPontos 20, n.º 1 (28 de junho de 2023). http://dx.doi.org/10.5380/dp.v20i1.86985.

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Notre travail dont cet article est un bilan partiel entend explorer les débats historiques et actuels, réels ou virtuels, entre l’anthropologie philosophique (Scheler, Plessner, Gehlen) et les phénoménologies husserliennes et post-husserliennes au XXe siècle en France et en Allemagne et au-delà. L’un de nos fils conducteurs pour traverser cet héritage théorique complexe est l’hypothèse de Blumenberg qui dans la Description de l’homme situe le germe d’un « tournant anthropologique » de la phénoménologie en 1913, tournant que l’anthropologie philosophique et « empirique » de Gehlen viendra radicaliser et parachever en 1940 dans L’Homme. Ce tournant est associé à un déplacement paradigmatique (de l’ontologie et de la métaphysique vers l’anthropologie) qui permet d’envisager la condition anthropologique de la phénoménologie, c’est-à-dire du phénoménologue.
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Chamouton, Chloé. "Enquête sur les multiples usages du shen : anthropologie, médecine & métaphysique". Acta Février 2008 9, n.º 2 (18 de fevereiro de 2008). http://dx.doi.org/10.58282/acta.3890.

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Cet article est un compte-rendu du livre : De l’esprit aux esprits : enquête sur la notion de Shen, livraison de : Extrême Orient-Extrême Occident (Cahiers de recherches comparatives), n° 29, Presses Universitaires de Vincennes.
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Leprêtre, Matti. "Mohamed Amer Meziane, Au bord des mondes. Vers une anthropologie métaphysique". Revue d'anthropologie des connaissances 17, n.º 3 (31 de agosto de 2023). http://dx.doi.org/10.4000/rac.30786.

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Delnoÿ, David. "Le Mésolithique. Continuité et développement métaphysique". L'Anthropologie, novembro de 2022, 103101. http://dx.doi.org/10.1016/j.anthro.2022.103101.

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Beaulieu, Julie. "Ethnographie, culture et expérimentations : essai sur la pensée, l’oeuvre et la légende de Maya Deren". 19, n.º 1 (18 de março de 2009): 15–35. http://dx.doi.org/10.7202/029497ar.

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Résumé Plus qu’une cinéaste, Maya Deren était une artiste anthropologue avant-gardiste, une féministe avant la lettre. C’était aussi une théoricienne poète, dont les écrits sont encore aujourd’hui méconnus. Au coeur de son projet artistique qui l’a menée jusqu’en Haïti, la dépersonnalisation, à la base de toute pratique rituelle. Cette quête métaphysique passe tant par la production de ses quatre premiers films que par la création, sur le plan conceptuel, de la forme ritualiste, spécifique au cinéma. De la pratique découle la théorie : Une anagramme d’idées sur l’art, la forme et le cinéma, exemple révélateur de ce système unique de pensée comme de création, qui s’apparente à la structure du rhizome deleuzo-guattarien. Figure mythique et surréaliste de l’avant-garde américaine des années 1940, Maya Deren s’est très vite vue confrontée aux limites de la représentation cinématographique, alors qu’elle se trouvait à mi-chemin entre l’artiste et l’ethnologue, comme placée entre le rêve et la réalité.
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Kilani, Mondher. "Identité". Anthropen, 2019. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.122.

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Dans le lexique des anthropologues, le mot identité est apparu bien plus tard que le mot culture. Mais depuis quelques décennies, alors que divers anthropologues se sont presque vantés de soumettre à une forte critique et même de rejeter leur ancien concept de culture, l'identité a acquis un usage de plus en plus étendu et prépondérant, parallèlement à ce qui s'est passé dans d'autres sciences humaines et sociales, ainsi que dans le langage de la politique et des médias. Nombreux sont ceux dans les sciences sociales qui s'accordent pour dire que le concept d'identité a commencé à s'affirmer à partir des années soixante du siècle dernier. Il est habituel de placer le point de départ dans les travaux du psychologue Erik Erikson (1950 ; 1968), qui considérait l'adolescence comme la période de la vie la plus caractérisée par des problèmes d'identité personnelle. Cette reconstruction est devenue un lieu commun des sciences humaines et sociales du XXe siècle, et pour cette raison, elle nécessite quelques ajustements. Par exemple, le sociologue américain Robert E. Park (1939) utilisait déjà, à la fin des années 1930, le terme identité, en rapport avec ceux d'unité, d'intégrité, de continuité, pour décrire la manière dont les communautés et les familles se maintiennent dans le temps et l'espace. En ce qui concerne l'anthropologie, un examen rapide permet de constater que l'identité a déjà été utilisée dans les années 1920 par Bronislaw Malinowski d'une manière qui n'était pas du tout sporadique. Dans ses textes sur les Trobriandais – comme par exemple La vie sexuelle des Sauvages du Nord-Ouest de la Mélanésie (1930) – il parle de l'identité du dala, ou matrilignage, en référence à la « substance » biologique dont il est fait, une substance qui se transmet de génération en génération dans la lignée maternelle. Ce n’est peut-être pas par hasard que le terme identité fut ensuite appliqué par Raymond Firth, dans We, the Tikopia (1936), pour affirmer la continuité dans le temps du clan, et que Siegfried Nadel dans The Foundations of Social Anthropology (1949) parle explicitement de l’identité des groupes sociaux grâce auxquels une société s’articule. La monographie The Nuer (1940) d'Edward E. Evans-Pritchard confirme que l’on a fait de l’identité un usage continu et, en apparence, sans problèmes dans l'anthropologie sociale britannique sous l’influence de Malinowski. Dans ce texte fondamental, l’identité est attribuée aux clans, à chacune des classes d'âge et même à l'ensemble de la culture nuer, que les Nuer considèrent eux-mêmes comme unique, homogène et exclusive, même si le sentiment de la communauté locale était « plus profond que la reconnaissance de l'identité culturelle » (Evans-Pritchard 1975: 176). Par contre, l’autre grand anthropologue britannique, Alfred R. Radcliffe-Brown, qui était particulièrement rigoureux et attentif aux concepts que l'anthropologie devait utiliser (selon M.N. Srinivas, il « prenait grand soin de l'écriture, considérant les mots comme des pierres précieuses » 1973 : 12), il est resté, probablement pour cette raison, étranger au recours au terme d'identité. S’il fait son apparition dans son célèbre essai consacré à la structure sociale de 1940, c’est uniquement lorsqu'il fait référence à l'utilisation approximative de ce concept par Evans-Pritchard. Il soutient que certains anthropologues (y compris Evans-Pritchard) utilisent l’expression « structure sociale » uniquement pour désigner la persistance des groupes sociaux (nations, tribus, clans), qui gardent leur continuité (continuity) et leur identité (identity), malgré la succession de leurs membres (Radcliffe-Brown 1952 : 191). Son utilisation du terme identité ne se justifie ainsi que parce qu’il cite la pensée d'Evans-Pritchard presque textuellement. On a également l’impression que Radcliffe-Brown évite d’adopter le concept d’identité, utilisé par ses collègues et compatriotes, parce que les termes de continuité (continuity), de stabilité (stability), de définition (definiteness), de cohérence (consistency) sont déjà suffisamment précis pour définir une « loi sociologique » inhérente à toute structure sociale (Radcliffe-Brown 1952 : 45). Qu’est-ce que le concept d'identité ajouterait, sinon un attrait presque mystique et surtout une référence plus ou moins subtile à l'idée de substance, avec la signification métaphysique qu’elle implique? Radcliffe-Brown admet que la persistance des groupes dans le temps est une dimension importante et inaliénable de la structure sociale. Mais se focaliser uniquement sur la stabilité donne lieu à une vision trop étroite et unilatérale : la structure sociale comprend quelque chose de plus, qui doit être pris en compte. Si l’on ajoute le principe d’identité à la stabilité, à la cohérence et à la définition, ne risque-t-on pas de détourner l’attention de l’anthropologue de ce qui entre en conflit avec la continuité et la stabilité? Radcliffe-Brown a distingué entre la structure sociale (social structure), sujette à des changements continus, tels que ceux qui se produisent dans tous les organismes, et la forme structurale (structural form), qui « peut rester relativement constante pendant plus ou moins une longue période » (Radcliffe-Brown 1952 : 192). Même la forme structurale – a-t-il ajouté – « peut changer » (may change); et le changement est parfois graduel, presque imperceptible, alors que d’autres fois, il est soudain et violent, comme dans le cas des révolutions ou des conquêtes militaires. Considérant ces deux niveaux, la forme structurale est sans aucun doute le concept qui se prêterait le mieux à être associé à l'identité. Mais l’identité appliquée à la forme structurale ne nous aiderait certainement pas à appréhender avec précision les passages graduels, les glissements imprévus ou, au contraire, certaines « continuités de structure » qui se produisent même dans les changements les plus révolutionnaires (Radcliffe-Brown 1952 : 193). Bref, il est nécessaire de disposer d’une instrumentation beaucoup plus raffinée et calibrée que la notion d’identité, vague et encombrante, pour saisir l’interaction incessante et subtile entre continuité et discontinuité. On sait que Radcliffe-Brown avait l'intention de construire une anthropologie sociale rigoureuse basée sur le modèle des sciences naturelles. Dans cette perspective, l'identité aurait été un facteur de confusion, ainsi qu'un élément qui aurait poussé l'anthropologie naissante vers la philosophie et l'ontologie plutôt que vers la science. Alors que Radcliffe-Brown (décédé en 1955) avait réussi à éviter le problème de l'identité en anthropologie, Lévi-Strauss sera contraint de l'affronter ouvertement dans un séminaire proposé, conçu et organisé par son assistant philosophe Jean-Marie Benoist au Collège de France au milieu des années soixante-dix (1974-1975). Quelle stratégie Lévi-Strauss adopte-t-il pour s'attaquer à ce problème, sans se laisser aller à la « mode » qui, entre-temps, avait repris ce concept (Lévi-Strauss 1977 : 11)? La première étape est une concession : il admet que l’identité est un sujet d’ordre universel, c’est-à-dire qu’elle intéresse toutes les disciplines scientifiques, ainsi que « toutes les sociétés » étudiées par les ethnologues, et donc aussi l’anthropologie « de façon très spéciale » (Lévi-Strauss 1977 : 9). Pour Lévi-Strauss, les résultats suivants sont significatifs: i) aucune des sociétés examinées – même si elles constituent un petit échantillon – ne tient « pour acquise une identité substantielle » (Lévi-Strauss 1977 : 11), c’est-à-dire qu’il ne fait pas partie de leur pensée de concevoir l'identité en tant que substance ou la substance en tant que source et principe d'identité; ii) toutes les branches scientifiques interrogées émettent des doutes sur la notion d'identité et en font le plus souvent l'objet d'une « critique très sévère » (Lévi-Strauss 1977 : 11); iii) il est possible de constater une analogie entre le traitement réservé à l’identité de la part des « sociétés exotiques » examinées et les conceptions apparues dans les disciplines scientifiques (Lévi-Strauss 1977 : 11); iv) cela signifie alors que la « foi » que « nous mettons encore » sur l’identité doit être considérée comme « le reflet d'un état de civilisation », c'est-à-dire comme un produit historique et culturel transitoire, dont la « durée » peut être calculée en « quelques siècles » (Lévi-Strauss 1977 : 11) ; v) que nous assistons à une crise contemporaine de l'identité individuelle, en vertu de laquelle aucun individu ne peut se concevoir comme une « réalité substantielle », réduit qu’il est à une « fonction instable », à un « lieu » et à un « moment » éphémères d’« échanges et de conflits » auxquelles concourent des forces d’ordre naturel et historique (1977 : 11). Ceci fait dire à Lévi-Strauss que « quand on croit atteindre l'identité, on la trouve pulvérisée, en miettes » (in Benoist 1977 : 209), tout en constatant dans le même mouvement que, tant dans les sociétés examinées que dans les sciences interrogées, nous assistons à la négation d'une « identité substantielle » et même à une attitude destructrice qui fait « éclater » l’identité « en une multiplicité d’éléments ». Dans un cas comme dans l'autre, on arrive à « une critique de l’identité », plutôt qu’« à son affirmation pure et simple » (in Benoist et Lévi-Strauss 1977 : 331). Pourtant, nous ne pouvons pas oublier que Lévi-Strauss était parti d'une concession, c’est-à-dire de l'idée que nous ne pouvions pas nous passer du thème de l'identité : c'est quelque chose qui concerne d'une manière ou d'une autre toutes les sociétés, les sociétés exotiques étudiées par les anthropologues et les communautés scientifiques qui se forment dans la civilisation contemporaine. Lévi-Strauss aurait pu développer plus profondément et de manière plus radicale l’argument présenté au point iv), à savoir que l’identité est une croyance (voire une foi), produit d’une période historique de notre civilisation. Mieux encore, étant donné que les autres sociétés d’une part et nos sciences de l’autre « la soumettent à l’action d’une sorte de marteau-pilon », c’est-à-dire qu’elles la font « éclater » (in Benoist 1977 : 309), nous aussi nous pourrions finalement nous en débarrasser. Lévi-Strauss sent bien, cependant, la différence entre sa propre position et celle du public qui a participé au séminaire, beaucoup plus enclin à donner du poids et un sens à l'identité. Pour cette raison, il offre un compromis (un compromis kantien, pourrait-on dire), qui consiste à détacher la notion d’identité de celle de substance et à penser l’identité comme « une sorte de foyer virtuel auquel il nous est indispensable de nous référer pour expliquer un certain nombre de choses, mais sans qu’il ait jamais d’existence réelle » (in Benoist et Lévi-Strauss 1977 : 332). Si nous l’interprétons bien, c'est comme si Lévi-Strauss avait voulu dire à ses collègues anthropologues : « Voulez-vous vraiment utiliser le concept d'identité? » Au moins, sachez que cela ne fait jamais référence à une expérience réelle : c’est peut-être une aspiration, une affirmation, une manière de représenter des choses, auxquelles rien de réel ne correspond. Avec ce compromis, Lévi-Strauss semble finalement attribuer à l'identité une sorte de citoyenneté dans le langage des anthropologues. Cependant, même comme un feu virtuel, où se trouve l'idée d'identité : dans la tête des anthropologues, qui utilisent ce concept pour représenter des sociétés dans leur unité et leur particularité, ou dans la tête des groupes sociaux lorsqu'ils se représentent leur culture? Revenons à l'exemple de Malinowski et des Trobriandais. C'est Malinowski qui interprète le veyola, la substance biologique du matrilignage (dala), en termes d'identité, et établit un lien entre identité et substance. Parler de l'identité du dala, surtout si elle est soutenue par le concept de substance (c'est-à-dire quelque chose qui se perpétue avec le temps et qui est complet en soi, de sorte qu'il ne dépend de rien de ce qui lui est extérieur, selon la définition classique d'Aristote), finit par obscurcir la pensée plus profonde des Trobriandais, c’est-à-dire l’incomplétude structurelle du dala. Il ne suffit pas de naître dans le dala et de recevoir le veyola de la mère. Le veyola n'est pas une substance identitaire, mais une matière sans forme qui doit être modelée par l’intervention du tama ou tomakava, c'est-à-dire « l'étranger », avec lequel la mère est mariée et qui est proprement le modeleur, celui qui aide les enfants de son partenaire à grandir, à prendre un visage, une personnalité, non pas en assumant une identité, mais par une participation progressive à des relations sociales (Weiner 1976). Malgré l’utilisation extensive du terme identité dans leurs descriptions ethnographiques et leurs réflexions théoriques, les anthropologues feraient bien de se demander s’il est vraiment approprié de conserver ce concept dans leur boîte à outils ou s’il ne convient pas de considérer l’identité comme une modalité de représentation historiquement et culturellement connotée. L'auteur de cette entrée a tenté de démontrer que l'identité en tant que telle n'existe pas, sauf en tant que mode de représentation que les anthropologues peuvent rencontrer dans telle ou telle société (Remotti 2010). Toutes les sociétés, dans leur ensemble ou dans leurs éléments constitutifs, ressentent les besoins suivants : stabilité, continuité, permanence, cohérence d’un côté, spécificité, certitude et définissabilité de l’autre. Mais, comme l’a suggéré Radcliffe-Brown, les réponses à ces besoins sont toujours relatives et graduelles, jamais complètes, totales et définitives. Nous pourrions également ajouter que ces besoins sont toujours combinés avec des besoins opposés, ceux du changement et donc de l'ouverture aux autres et au futur (Remotti 1996 : 59-67). Autrement dit, les sociétés ne se limitent pas à être soumises au changement, mais le recherchent et l’organisent en quelque manière. Il peut y avoir des sociétés qui donnent des réponses unilatérales et qui favorisent les besoins de fermeture plutôt que d’ouverture, et d’autres le contraire. Si ce schéma est acceptable, alors on pourrait dire que l'identité – loin d'être un outil d'investigation – apparaît au contraire comme un thème et un terrain important de la recherche anthropologique. En retirant l'identité de leur boîte à outils, prenant ainsi leurs distances par rapport à l'idéologie de l'identité (un véritable mythe de notre temps), les anthropologues ont pour tâche de rechercher quelles sociétés produisent cette idéologie, comment elles construisent leurs représentations identitaires, pour quelles raisons, causes ou buts elles développent leurs croyances (même leur « foi » aveugle et aveuglante) en l’identité. Nous découvrirons alors que nous-mêmes, Occidentaux et modernes, nous avons construit, répandu, exporté et inculqué au monde entier des mythes et des concepts identitaires. Nous l’avons fait à partir de l’État-nation aux frontières rigides et insurpassables, de l’idéologie clairement identitaire qu’est le racisme, et pour terminer de la racialisation de la culture qui exalte les traditions locales ou nationales comme substances intouchables, dont la pureté est invoquée et qu’on entend défendre de toutes les manières contre les menaces extérieures. Passée au niveau du discours social et politique, l'identité révèle tôt toute la violence impliquée dans la coupure des liens et des connexions entre « nous » et les « autres ». Comme le disait Lévi-Strauss (et aussi Hegel avant Lévi-Strauss), à l'identité « ne correspond en réalité aucune expérience » (in Benoist et Lévi-Strauss 1977 : 332). Mais les effets pratiques de cette représentation n'appartiennent pas au monde des idées : ils sont réels, souvent insupportablement réels.
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Poirier, Sylvie. "Ontologie". Anthropen, 2016. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.035.

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Resumo:
Au sein de la discipline anthropologique, ce n’est que récemment, mis à part le texte précurseur d’Irving Hallowell (1960), que le terme et le concept d’ontologie ont fait leur apparition et suscité un intérêt et des débats notables. Ceci a entrainé ce qu’il est maintenant convenu d’appeler le tournant ontologique, soit un déplacement des questions d’ordre épistémologique autour du savoir et des représentations vers celles de l’être et des théories de l’existence (Henare, Holbraad et Wastell 2007). Du point de vue de l’anthropologie, le concept d’ontologie se décline assurément au pluriel et fait référence aux théories de la réalité et de l’être-dans-le-monde. L’ontologie réfère ainsi à la nature de la réalité, à la nature des choses (êtres humains et non-humains, et objets) et à la nature de leurs relations (incluant leur existence, leur enchevêtrement et leur devenir communs) telles que conçues, vécues et mises en actes par les acteurs culturels / agents sociaux. Le premier pas vers le tournant ontologique aura été, d’une part, de retracer l’émergence et la prégnance des concepts de nature et de culture au sein de la pensée moderne et de démontrer, d’autre part, la non-universalité de ces concepts et de la division absolue (ou rupture ontologique) qu’opèrent les modernes entre la nature-objet et la culture-sujet. Ce dualisme quelque peu troublant, hérité des Lumières et au fondement de l’ontologie et de l’épistémologie modernistes, est aussi celui sur lequel s’est édifié le savoir anthropologique. Afin de penser autrement et au-delà de cette ontologie dualiste et de considérer sérieusement d’autres ontologies, il fallait en quelque sorte adopter une position résolument critique et réflexive et renouveler le langage anthropologique. Parmi les anthropologues contemporains ayant contribué de manière notable à un tel renouvellement et à repenser le mode de connaissance anthropologique, mentionnons : Bruno Latour (1991) et l’anthropologie symétrique ; Roy Wagner (2014/1975) et l’anthropologie inversée ; Tim Ingold (2000) et l’ontologie de l’habité ; Eduardo Viveiros de Castro (1998, 2009) et le multinaturalisme; Philippe Descola (2005) et l’identification de quatre modes ontologiques : le naturalisme; l’animisme; le totémisme et l’analogisme; Marilyn Strathern (1988, 1992) et la démonstration des dimensions relationnelles et dividuelles de la personne mélanésienne et donc de formes de subjectivité et de socialité non-modernes. En s’appuyant sur divers exemples ethnographiques, chacun de ces auteurs aura contribué à ébranler les présupposés au fondement de la pensée moderne occidentale et des savoirs anthropologiques que sont ceux d’une universalité naturelle et des césures ontologiques entre nature / culture, corps/esprit, objet/sujet, animalité/humanité, réalité matérielle / représentation mentale. En reconnaissant, avec Descola, que l’ontologie naturaliste des modernes est la chose du monde la moins bien partagée et en réinsérant le non-humain dans les mondes de la vie, les ontologies et les cosmologies non-modernes ont acquis, avec le tournant ontologique, une nouvelle légitimité et raison d’être, en leurs propres termes. L’anthropologie ontologique a ainsi ouvert des avenues conceptuelles et méthodologiques novatrices afin de considérer sérieusement et à leur juste valeur d’autres manières d’être humain, d’autres théories que des groupes humains ont élaborées afin de définir le réel, le déploiement du monde ainsi que les relations et les enchevêtrements entre l’humain et le non-humain, soit-il animal, végétal, minéral, ancestral, divin ou autre. Le tournant ontologique aura permis de renouveler notre appréhension de la différence, de l’altérité et de la multiplicité. Alors que le projet de l’anthropologie a surtout été de comprendre et de traduire la pluralité des visions du monde ou, exprimé autrement, de traduire la diversité culturelle sur fond d’universalité naturelle, le tournant ontologique nous invite plutôt à considérer la pluralité des mondes. La pratique de traduction s’en trouve transformée. En effet, il ne s’agit plus de produire de l’équivalence à partir de la différence mais de produire de la différence à partir de l’incommensurabilité (Chakrabarty 2009). Avec ce souci pour l’ontologie, ces autres théories de l’existence humaine et non-humaine, et de leur enchevêtrement, ces autres savoirs et expériences ne peuvent plus être simplement « neutraliser », voire délégitimer, en les conceptualisant, par exemple, en tant que « croyances », mais nous invitent plutôt à repenser les concepts au fondement des sciences sociales et humaines, et des théories anthropologiques, comme ceux de personne (humaine et non-humaine), d’échange, de pouvoir, d’agencéité ou de travail (Nadasdy 2007). L'ontologie devient en quelque sorte un outil heuristique pour penser autrement (Blaser 2013: 5). Le concept d’ontologie ne rend pas désuet celui de culture, non plus qu’il ne peut se substituer à celui-ci (Venkatesan 2010). Il vient plutôt l’enrichir en offrant à la pensée anthropologique des pistes supplémentaires pour la traduction et la compréhension non seulement du « point de vue de l’indigène » et de son univers de sens et de pratiques, mais aussi des principes ontologiques sur lesquels prend appui un tel point de vue et lesquels orientent et signifient l’expérience de l’être-dans-le-monde. En outre, les ontologies ne sont pas seulement théoriques et métaphysiques, mais portent avec elles des implications pratiques, politiques, éthiques, esthétiques et phénoménologiques réelles. Les ontologies sont performées (Blaser 2013: 7). Traduire ce que l’Autre dit de son monde et en reconnaitre la validité et la valeur de véracité nécessitent de la part de l’ethnographe une position résolument réflexive et intersubjective. L’anthropologie ontologique apporte également un nouvel éclairage sur les processus complexes de continuité et de transformation sociales et culturelles dans des contextes coloniaux, néocoloniaux et postcoloniaux de rencontre et de coexistence. Les dynamiques de coexistence entre les mondes culturels, d’autant plus lorsque celles-ci s’échafaudent au sein de rapports de pouvoir inégaux, sont truffées d’obstacles, d’incompréhensions, de conflits et de violence d’ordre ontologique (Clammer, Poirier et Schwimmer 2004, Poirier 2013, Blaser 2013). L’ontologie politique s’intéresse quant à elle aux relations dialectiques et dialogiques qui se jouent et se négocient entre les mondes, dans l’expression des politiques de la différence. Le tournant ontologique peut être appréhendé comme un symptôme des crises actuelles: crise de la modernité et de ses récits hégémoniques; crise environnementale; crise de l'altérité. Face au biais eurocentrique et à l’universalisme cannibale de la modernité occidentale qui tendent à gommer et à normaliser les différences ontologiques et culturelles, face à la dynamique mondiale actuelle où l’intolérance et la domination de la pensée, des concepts, des valeurs et des institutions de l’Occident semblent s’imposer un peu plus à chaque jour, face aux dérives et aux excès du néo-libéralisme où le marché devient l’étalon de mesure de toutes les activités et valeurs sociales et culturelles, nous assistons en quelque sorte à une crise de la différence et de l’altérité. Le renouvellement conceptuel et méthodologique que propose le tournant ontologique répond, à certains égards, à cette crise en faisant valoir d’autres potentialités et devenirs relationnels. En réponse à la crise environnementale, les questionnements d’ordre ontologique auront également permis une ouverture vers une anthropologie au-delà de l’humain, une anthropologie qui ne soit plus exclusivement anthropocentrique mais inclusive de la vaste gamme des actants/existants non-humains (êtres et objets) ainsi que des potentialités multiples que recèlent les rapports et les enchevêtrements avec et entre ceux-ci (Kohn 2013, Latour 1999). Les Science and Technology Studies (STS) contribuent aussi largement au tournant ontologique (Woolgar et Lezaun 2013). Approcher l’altérité avec un accent sur la dimension ontologique invite à débusquer l’impensé de notre pensée. L’anthropologie, comme le fait remarquer Viveiros de Castro, n’est-elle pas en cela une théorie et une pratique de décolonisation permanente ? Ou encore, comme le souligne ce même auteur, bien que nous ne pouvons penser comme l’Autre, nous pouvons à tout le moins penser avec eux et imaginer ensemble et de manière créatrice les conditions qui permettraient la coexistence de mondes multiples au sein d'un devenir commun.
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Poirier, Sylvie. "Cosmologie". Anthropen, 2016. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.032.

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Le terme « cosmologie » réfère aux théories que les sociétés ont élaborées sur l’origine, la composition et la dynamique de l’univers (cosmos), sur ses propriétés spatiales et temporelles, sur les puissances, les êtres et les objets qui le constituent et les relations entre ceux-ci, et enfin sur la place qu’occupe l’être humain au sein de cet univers. Porteuses d’un savoir sur le monde et sur les êtres, humains et non humains, qui y coexistent, les cosmologies, celle des physiciens, des Aztèques ou des Aborigènes australiens, sont aussi des ontologies et des anthropologies. Plus souvent qu’autrement, les cosmologies, aussi nommées « vision du monde » ou « cosmovision », relèvent à la fois de la physique et de la métaphysique. Elles sont un lieu où savoir, imaginaire et merveilleux s’amalgament pour penser l’origine, le déploiement et le devenir du cosmos. Les cosmologies et les récits qui les accompagnent sont qualifiés tantôt de « scientifique / moderne », de « religieux / mythique » ou de « traditionnel / autochtone » ; une autre distinction est celle entre cosmologies moderne et non moderne. Le terme « cosmogonie » réfère quant à lui plus spécifiquement aux théories sur les origines de l’univers, aux récits pour signifier le chaos primordial avant l’ordre (cosmos). À l’instar des cosmologies, les cosmogonies sont aussi des ontologies. Les récits cosmologiques et cosmogoniques, soient-ils de type scientifique ou mythique, sont toujours polysémiques, sujets à des interprétations diverses, souvent divergentes et contestées. Ces récits, dès lors qu’ils sont validés et portés par une parole d’autorité, ont valeur de vérité dans le contexte social et culturel de leur énonciation. Le concept de « cosmologie » se présente comme un « fait social total », tel que l’avaient souligné Durkheim, Mauss et leurs contemporains.
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Bouvier, Pierre. "Socioanthropologie". Anthropen, 2016. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.026.

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Le contexte actuel tel que le dessinent les tendances lourdes de ce troisième millénaire convie à interpeller les outils des science sociales forgés précédemment. La compréhension de l’univers et donc du genre humain s’est appuyée, en Occident, au siècle des Lumières, sur une volonté d’appréhender les phénomènes sociaux non plus dans des lectures théologiques, métaphysiques mais au nom d’une démarche se voulant scientifique. Les explorations à l’extérieur du domaine européen transmises par divers types de voyageurs restaient lacunaires. Pour les appréhender de manière plus rationnelle des disciplines ont émergé telle que l’ethnographie, l’ethnologie et l’anthropologie allant du plus petit agrégat vers des lectures plus généralistes. Les sociétés de là-bas commencent, alors, à se frayer un domaine dans le champ des connaissances. C’est ainsi que peuvent être appréhendés les symboliques, les cosmogonies et les rituels de populations aussi diverses que celle des forêts amazoniennes, de la savane soudanaise ou des régions polaires et ce au delà d’a priori dévalorisants. Se révèlent, par l’ethnographie, l’ethnologie et l’anthropologie, leurs pratiques et leurs usages et les constructions idéelles qu’elles soient celles des Baruya, des Dogon ou des Inuit. L’autonomie prise par ces études et ces recherches contribuent à lutter plus qu’efficacement contre les idées préconçues antérieurement, celles empreintes de xénophobie sinon de racisme. Pour sa part la sociologie s’attache au développement et à la modernisation des sociétés occidentales déclinées suivant divers critères dont la mécanisation des productions de biens, l’urbanisation, les mobilités. Ces valeurs, la sociologie en est l’un des analyseurs comme elle le sera pour la période que Fourastié dénomma les « Trente glorieuses », décennies marquées par le plein emploi, l’élévation des niveaux de vie, le consumérisme du moins dans les sociétés occidentales et que traitent les sociologies de l’action, des organisations, des négociations, des régulations, des critiques de la bureaucratisation mais également des conflits entre catégories et classes sociales (Fourastié 1979). Ceci s’inscrit peu ou prou dans le cadre d’institutions et de valeurs marquées au sceau des Etat-nations. En ce troisième millénaire le cours des évènements modifie ces conditions antérieures. Les temporalités, les pratiques et les représentations changent. La mondialisation suscite des échanges croissants entre des entités et des ensembles populationnels hier fortement distincts. Les migrations non plus seulement idéelles mais physiques de cohortes humaines déstructurent les façons d’être et de faire. De ce fait il apparaît nécessaire de tenir compte de ces mutations en décloisonnant les divisions disciplinaires antérieures. Les processus d’agrégation mettent en place des interactions redéfinissant les valeurs des uns et des autres, hier ignorées voire rejetées par des mondes de la tradition ethnique, religieuse ou politique (Abélès et Jeudy 1997). La mise en réseau interpelle ces ensembles populationnels dorénavant modifiés par l’adjonction de valeurs antérieures étrangères à leurs spécificités. L’anthropologie, l’ethnologie s’avèrent nécessaires pour appréhender ces populations de l’altérité aujourd’hui insérées plus ou moins effectivement au cœur des sociétés post-industrielles (Sahlins 1976). De plus ces populations de là-bas sont elles-mêmes facteurs actifs de réappropriation et de création de nouvelles formes. Elles interpellent les configurations usuelles et reconnues par la sociologie. On ne peut plus leur assigner des valeurs antérieures ni les analyser avec les méthodologies et les paradigmes qui convenaient aux réalités précédentes, celles d’un grande séparation entre les unes et les autres (Descola 2005). Déjà les procédures habituelles privilégiant les notions de classe sociale, celles de mobilité transgénérationnelle, d’intégration, de partage des richesses étaient interpellées. Des individus de plus en plus nombreux ne se retrouvent pas dans ces dynamiques d’autant que ces dernières perdent de leur force. Le sous-emploi, le chômage, la pauvreté et l’exclusion dressent des scènes et des acteurs comme figures oubliées des siècles passés. Bidonvilles entourant les centres de prospérité, abris de fortune initiés par diverses associations constituent autant de figures ne répondant pas aux critères antérieurs. Une décomposition plus ou moins radicale des tissus institutionnels fait émerger de nouvelles entités. Les notions sociologique ne peuvent s’en tenir aux interprétations qui prévalaient sous les auspices du progrès. La fragilisation du lien social implique des pertes de repère (Bouvier, 2005). Face à l’exclusion économique, sociale et symbolique et aux carences des pouvoirs publics des individus essaient de trouver des parades. Quelques-uns mettent en place des pratiques signifiantes leur permettant, dans cet univers du manque, de redonner du sens au monde et à leur propre existence. Ainsi, par exemple, d’artistes, qui non sans difficulté, se regroupent et faute de lieux, investissent des locaux vides : usines, bureaux, immeubles, autant de structures à l’abandon et ce dû aux effets de la crise économique, des délocalisations ou des fermetures de bureau ou d’entreprises. Ces « construits pratico-heuristiques » s’appuient sur des techniques qui leur sont propres : peinture, sculpture, installation, vidéo, etc., facteurs donnant du sens individuel et collectif. Ils en définissent les règles eux-mêmes. Ils en gèrent collectivement l’installation, le fonctionnement et les perspectives en agissant en dehors des institutions. De plus ces configurations cumulent des éléments désormais indissociables compte tenu de la présence croissante, au cœur même des sociétés occidentales, de populations allogènes. Ces dernières n’ont pas laissé derrière elles leurs valeurs et leurs cultures. Elles les maintiennent dans ces périphéries urbaines et dans les arcanes des réseaux sociaux. En comprendre les vecteurs et les effets de leurs interactions avec les valeurs proprement occidentales nécessitent l’élaboration et l’ajustement d’un regard à double focale. Celui-ci permet de discerner ce qui continue de relever de ces mondes extérieurs de ce qui, comme suite à des contacts, fait émerger de nouveaux facteurs d’appréhension et de compréhension du monde. Les thèses sociologiques du progrès, du développement mais également de l’anomie et des marges doivent se confronter et s’affiner de ces rencontres avec ces valeurs désignées hier comme relevant de la tradition, du religieux : rites, mythes et symboliques (Rivière 2001). L’attention socioanthropologique s’attache de ce fait non seulement à cette dualisation mais également à ce qui au sein des sociétés du « premier monde » relève des initiatives des populations majoritaires autochtones et, à l’extérieur de leurs sphères, de leur frottement avec des minorités allogènes. Elle analyse les densités sociétales, celles en particulier des institutions qu’elles se sont données. Elle les conjugue avec les us et les données existentielles dont sont porteurs les effets tant des nouvelles populations que des technologies médiatiques et les mutations qu’elles entraînent dans les domaines du lien social, du travail, des loisirs. De leurs frictions émergent ces « construits de pratiques heuristiques » élaborés par des individualités sceptiques tant face aux idéologies politiques que face à des convictions religieuses ébranlées par les effets des crises économiques mais également par la perte de pertinence des grands récits fondateurs. Ces construits allouent du sens à des rencontres impensables du moins dans le cadre historique antérieur, là où les interventions de l’Etat, du personnel politique, des responsables cléricaux savaient apporter des éléments de réponse et de résolution aux difficultés. De ces « construits de pratiques heuristiques » peuvent émerger et se mettre en place des « ensembles populationnels cohérents » (Bouvier 2000). Ces derniers donnent du sens à un nombre plus élevé de constituants, sans pour autant que ceux-ci s’engagent dans une pratique de prosélytisme. C’est par écho que ces regroupements se constituent. Cet élargissement n’est pas sans être susceptible, à court ou moyen terme, de s’institutionnaliser. Des règles et des principes tendent à encadrer des expressions qui, hier, dans le construit, ne répondaient que de la libre volonté des membres initiateurs. Leur principe de coalescence, empreint d’incertitude quant à toute perspective pérenne, décline de l’existentiel et du sociétal : étude et compréhension des impositions sociales et expressions des ressentis individuels et collectifs. Ces dimensions sont peu conjuguées en sociologie et en anthropologie, chacune de ces disciplines malgré les discours récurrents sur l’interdisciplinarité, veillant à préserver ce qu’elles considèrent comme étant leur spécialisation ou du moins leur domaine (Bouvier 1999). La socioanthropologie est alors plus à même de croiser tant les données et les pesanteurs sociétales, celles portées par diverses institutions, tout en révélant les attentes anthropologiques, symboliques, rituelles et non rationnellement explicites que ces construits et ensembles populationnels produisent. La position du chercheur adhérent, bénévole, militant et réflexif en immersion partielle, en observation impliquée, impliquante et distancée comporte l’enjeu de pouvoir réussir à préserver son autonomie dans l’hétéronomie des discours et des pratiques. Une « autoscopie » est nécessaire pour indiquer les distances entre l’observateur et l’observé et plus encore pour donner un éclairage sur les motivations intimes de l’observateur. La socioanthropologie s’inscrit, de fait, comme advenue d’une relecture à nouveaux frais. Elle conjugue et suscite des modalités s’attachant aux émergences de ces nouveaux construits faisant sens pour leurs protagonistes et aptes à redonner de la signification aux données du contemporain (Bouvier 1995, 2011)
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Singleton, Michael. "Culte des ancêtres". Anthropen, 2019. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.092.

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Resumo:
Les plus observateurs de la première génération de missionnaires, de militaires et de marchands européens à avoir sillonné l’Afrique des villages avaient souvent remarqué qu’à proximité de la maisonnée tôt le matin leur vénérable hôte versait dans un tesson de canari, parfois logé à l’intérieur d’un modeste édicule, un peu de bière ou y laissait un morceau de viande tout en s’adressant respectueusement à un interlocuteur invisible. La plupart de ces ethnographes amateurs de la première heure ont automatiquement conclu qu’il s’agissait d’un rite d’offrande sacrificielle accompli par un prêtre sur l’autel d’un petit temple où étaient localisés des esprits d’ancêtres (qu’on distinguait des purs esprits ancestraux). A leurs yeux judéo-chrétiens et gréco-latins, ce culte répondait à une religiosité primitive axée autour de la croyance dans la survie (immatérielle) des âmes (immortelles) qui, implorées en prière par les vivants, pouvaient, grâce à Dieu, venir en aide aux leurs. The medium is the message En inventoriant et analysant ainsi le phénomène en des termes sacrés on ne pouvait pas tomber plus mal ou loin d’une plaque phénoménologique qu’en l’absence in situ de la dichotomie occidentale entre le naturel et le surnaturel, on ne saurait même pas décrire comme « profane ». Emportés par des préjugés ethnocentriques peu problématisés, même des anthropologues occidentaux ou occidentalisés (mais y en a-t-il d’autres ?), ont désigné comme « le culte religieux des esprits ancestraux » une philosophie et pratique indigènes qui, au ras des pâquerettes phénoménologiques, ne représentaient que l’expression conceptuelle et cérémonielle des rapports intergénérationnels tels que vécus dans un certain mode historique de (re)production agricole. Préprogrammés par leur héritage chrétien, même s’ils n’y croyaient plus trop, les premiers observateurs occidentaux de la scène africaine se sont sentis obligés d’y localiser une sphère du sacré et du religieux bien distincte d’autres domaines clôturés par leur culture d’origine dont, entre autres, l’économique, le social ou le politique. Je parle des seuls Européens à l’affut savant et non sectaire des traits univoques d’une religiosité universelle qu’ils estimaient relever d’une nature religieuse censée être commune à tous les hommes. Car il faut passer sous le silence qu’ils méritent les Occidentaux qui, en laïques rabiques ou croyants fondamentalistes traitaient ce qu’ils voyaient de stupidités sauvages voire de superstitions sataniques. Néanmoins, faisons écho du meilleur des ethnographes ecclésiastiques qui ont cru bon de voir dans le phénomène des relents soit d’une Révélation Primitive (Uroffenbarung) soit des jalons vers la vraie Foi. Car en filigrane dans le mânisme (un terme savant renvoyant aux mânes des foyers romains) ils pensaient pouvoir lire la croyance en le monothéisme et en l’immortalité individuelle ainsi que le pendant de l’intercession médiatrice entre les Saints voire des Ames du Purgatoire et Dieu – autant de dogmes du XIXe siècle auxquels désormais peu de Chrétiens critiques souscrivent et qui, de toute évidence ethnographique n’avaient aucun équivalent indigène. L’anthropologie n’est rien si ce n’est une topologie : à chaque lieu (topos) sa logique et son langage. Or, d’un point de vue topographique, le lieu du phénomène qui nous préoccupe n’est ni religieux ni théologique dans le sens occidental de ces termes, mais tout simplement et fondamentalement gérontologique (ce qui ne veut pas dire « gériatrique » !). En outre, son langage et sa logique relèvent foncièrement de facteurs chronologiques. A partir des années 1950, je me suis retrouvé en Afrique venant du premier Monde à subir les conséquences sociétales d’un renversement radical de vapeur chronologique. Depuis l’avènement de la Modernité occidentale les acquis d’un Passé censé absolument parfait avaient perdu leur portée paradigmatique pour être remplacés par l’espoir d’inédits à venir – porté par les résultats prometteurs d’une croissance exponentielle de la maitrise technoscientifique des choses. Au Nord les jeunes prenant toujours davantage de place et de pouvoir, les vieillissants deviennent vite redondants et les vieux non seulement subissent une crise d’identité mais font problème sociétal. C’est dire que dans le premier village africain où en 1969 je me suis trouvé en « prêtre paysan » chez les WaKonongo de la Tanzanie profonde j’avais d’abord eu mal à encaisser la déférence obséquieuse des jeunes et des femmes à l’égard de ce qui me paraissait la prépotence prétentieuse des vieux. Les aînés non seulement occupaient le devant de la scène mais se mettaient en avant. Toujours écoutés avec respect et jamais ouvertement contredits lors des palabres villageois, ils étaient aussi les premiers et les mieux servis lors des repas et des beuveries. Un exemple parmi mille : en haranguant les jeunes mariés lors de leurs noces il n’était jamais question de leur bonheur mais de leurs devoirs à l’égard de leurs vieux parents. Mais j’allais vite me rendre compte que sans le savoir-faire matériel, le bon sens moral et la sagesse « métaphysique » des aînés, nous les jeunes et les femmes de notre village vaguement socialiste (ujamaa) nous ne serions pas en sortis vivants. Les vieux savaient où se trouvaient les bonnes terres et où se terrait le gibier ; ils avaient vécu les joies et les peines de la vie lignagère (des naissances et des funérailles, des bonnes et des mauvaises récoltes, des périodes paisibles mais aussi des événements stressants) et, sur le point de (re)partir au village ancestral tout proche (de rejoindre le Ciel pour y contempler Dieu pour l’Eternité il n’avait jamais été question !) ils étaient bien placés pour négocier un bon prix pour l’usufruit des ressources vitales (la pluie et le gibier, la fertilité des champs et la fécondité des femmes) avec leurs nus propriétaires ancestraux. En un mot : plus on vieillit dans ce genre de lieu villageois, plus grandit son utilité publique. Si de gérontocratie il s’agit c’est à base d’un rapport d’autorité reconnu volontiers comme réciproquement rentable puisque dans l’intérêt darwinien de la survie collective et aucunement pour euphémiser une relation de pouvoir injustement aliénant. La dichotomie entre dominant et dominé(e) est l’exception à la règle d’une vie humaine normalement faite d’asymétries non seulement acceptées mais acceptables aux intéressé(e)s. Les WaKonongo ne rendaient pas un culte à leurs ancêtres, ils survivaient en fonction d’un Passé (personnifié ou « fait personne » dans les ainés et les aïeux) qui avait fait ses preuves. Pour être on ne saurait plus clair : entre offrir respectueusement les premières calebasses de bière aux seniors présents à une fête pour qu’ils ne rouspètent pas et verser quelques gouttes du même breuvage dans un tesson pour amadouer un ancêtre mal luné et fauteur de troubles et qu’on a fait revenir du village ancestral pour l’avoir à portée de main, n’existe qu’une différence de degré formel et aucunement de nature fondamentale. Dans les deux cas il s’agit d’un seul et même rapport intergénérationnel s’exprimant de manière quelque peu cérémonieuse par des gestes de simple politesse conventionnelle et aucunement d’une relation qui de purement profane se transformerait en un rite religieux et profondément sacré. Pour un topologue, le non-lieu est tout aussi éloquent que le lieu. Dans leurs modestes bandes, les Pygmées vivent entièrement dans le présent et dans l’intergénérationnel acceptent tout au plus de profiter des compétences effectives d’un des leurs. Il ne faut pas s’étonner qu’on n’ait trouvé chez eux la moindre trace d’un quelconque « culte des ancêtres ». Cultivant sur brûlis, allant toujours de l’avant de clairière abandonnée en clairière défrichée les WaKonongo, voyageant légers en d’authentiques nomades « oubliaient » leurs morts derrière eux là où des villageois sédentaires (à commencer par les premiers de l’Anatolie) les avaient toujours lourdement à demeure (ensevelis parfois dans le sous-sol des maisons). Le passage d’un lieu à un lieu tout autre parle aussi. Quand le savoir commence à passer sérieusement à la génération montante celle-ci revendique sa part du pouvoir et de l’avoir monopolisés jusqu’alors par la sortante. En l’absence d’un système de sécurité sociale dépassant la solidarité intergénérationnelle du lignage cette transition transforme souvent la portée intégratrice de la gérontocratie en une structure pathogène. Aigris et inquiets par cette évolution, les vieux que j’ai connu au milieu des années 1980 dans des villages congolais, de bons et utiles « sorciers » s’étaient métamorphosés en vampires anthophages. Dans des contextes urbains des pays où l’Etat est faible et la Famille par nécessité forte, l’enracinement empirique du phénomène bien visible au point zéro du petit village d’agriculteurs sédentaires, se trouve parfois masqué par des expressions fascinantes (tels que, justement, les ancêtres superbement masqués que j’ai côtoyé chez les Yoruba du Nigeria) ou à l’occasion folkloriques – je pense aux Grecs qui vont pique-niquer d’un dimanche sur les tombes familiales ou aux vieillards que j’ai vu en Ethiopie terminant leur vie au milieu des monuments aux morts des cimetières. Mais la raison d’être du phénomène reste familial et ne relève pas (du moins pas dans sa version initiale) d’une rationalité qui serait centrée « religieusement » sur des prétendues réalités onto-théologiques qui auraient pour nom Dieu, les esprits, les âmes. Enfin, sur fond d’une description réaliste mais globale du religieux, deux schémas pourraient nous aider à bien situer l’identité intentionnelle des différents interlocuteurs ancestraux. En partant du latin ligare ou (re)lier, le religieux en tant que le fait de se retrouver bien obligé d’interagir avec des interlocuteurs autres que purement humains (selon le vécu et le conçu local de l’humain), a lieu entre l’a-religieux du non rapport (donnant-donnant) ou du rapport à sens unique (le don pur et simple) et l’irréligieux (le « Non ! » - entre autre du libéralisme contractuel - à tout rapport qui ne me rapporte pas tout). Si le gabarit des interlocuteurs aussi bien humains que supra-humains varie c’est que la taille des enjeux dont ils sont l’expression symbolique (« sacramentaires » serait mieux puisqu’une efficacité ex opere operato y est engagée) va du local au global. Quand le réel est intra-lignager (maladie d’enfants, infertilité des femmes dans le clan) la solution symbolique sera négociée avec l’un ou l’autre aïeul tenu pour responsable. Par contre, quand le signifié (sécheresse, pandémie) affecte indistinctement tous les membres de la communauté, le remède doit être trouvé auprès des personnifications plus conséquentes. Ces phénomènes faits tout simplement « personnes » (i.e. dotés du strict minimum en termes de compréhension et de volonté requis pour interagir) avaient été identifiés autrefois avec le « dieu de la pluie » ou « l’esprit de la variole » mais mal puisque les épaisseurs ethnographiques parlaient ni de religion ou de théologie ni d’opposition entre matière et esprit, corps et âme, Terre et Ciel. Une communauté villageoise est fondamentalement faite de groupes lignagers – représentés par les triangles. En cas de malheurs imprévus (en religiosité « primitive » il est rarement question de bonheur attendu !) l’aîné du clan devinera qui en est responsable (un sorcier, un ancêtre ou « dieu » - nom de code personnalisé pour la malchance inexplicable). Il prendra ensuite les dispositions s’imposent –le cas échéant relocalisant à domicile un aïeul mauvais coucheur. Leurs ancêtres n’étant pas concernés, les patriarches de lignages voisins se montreront tout au plus sympathiques. La ligne du milieu représente le pouvoir ou mieux l’autorité du conseil informel des notables. Si, en haut de la pyramide, le chef figure en pointillé c’est qu’il n’a aucun rôle proprement politique mais fonctionne comme médiateur entre les villageois et les nus propriétaires ancestraux en vue de l’usufruit collectif de leurs ressources vitales (en particulier la pluie). En invoquant ses ancêtres, il remédiera aussi à des problèmes affectant tout le monde (la sécheresse, une épidémie, des querelles claniques, menace ennemi). En partant de l’étymologie ligare ou « lier » j’entends par « être religieux » le fait de se (re)trouver obligé en commun à interagir de manière cérémonielle mais asymétrique, avec des interlocuteurs à l’identité plus qu’humain (tel que défini selon la logique locale), afin de satisfaire des intérêts réciproques et pas d’alimenter la curiosité intellectuelle, alors la spirale représente le réseau des rapports proprement religieux. Dans ce sens on peut penser que les vivants villageois se comportent « religieusement » avec les morts vivants du lignage ou de l’ensemble ethnique. Autour de la ligne médiane ont lieu les relations entre hommes, elles aussi à la limite religieuses – délimitées, à droite, par l’a-religieux de l’étranger vite devenu l’ennemi à qui on ne doit rien et qui peut tout nous prendre, et, à gauche, par l’irréligieux de l’adversaire du dedans tel que le sorcier parmi les vôtres qui vous en veut à mort. En bas, il y a le monde dit par l’Occident, animal, végétal et minéral mais qui fait partie intégrante de la religion animiste. En haut se trouve un premier cercle d’interlocuteurs religieux ceux impliqués dans des affaires claniques. Plus haut, constellant l’ultime horizon religieux, on rencontre des interlocuteurs personnifiant des enjeux globaux – la pluie, le gibier, des pandémies… Logiquement, puisqu’elle n’est pas négociable, les Africains ont localisé hors toute réciprocité religieuse, une figure des plus insaisissables – de nouveau mal décrit comme deus otiosus puisqu’elle n’a rien de théologique et n’est pas tant inoccupé que peu préoccupé par le sort humain. Trois diapositives illustrent les trois types d’interlocuteurs : 1. Des édicules pour fixer à côté de la maisonnée des ancêtres lignagers et faciliter les échanges intéressés avec eux ; 2. Un tombeau royal associé grâce à la houe cérémoniale à la pluie ; 3. Un « temple » à la croisée des chemins en brousse où siège le Seigneur de la Forêt et les Animaux.
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