Auswahl der wissenschaftlichen Literatur zum Thema „Puissances (théologie)“

Le Coran indique que l’Invisible (al-ghayb) est prédéterminé ; c'est-à-dire qu'il est écrit depuis le début des temps et pour toute l’éternité. Le Coran indique aussi que l’Invisible est hors de portée des humains ordinaires. Et pourtant, les pratiques occultes de divination et de magie visant à examiner et à intercéder dans l’Invisible ont souvent été pratiquées dans le monde musulman. Cette thèse demande comment des musulmans pieux ont concilié les pratiques occultes avec l’injonction coranique contre l’interaction humaine avec l’Invisible. Quelles histoires se sont-ils racontés afin de légitimer leur transgression de sanctions aussi clairement énoncées ? Je cherche des réponses à cette question en me concentrant sur trois études de cas: l’oniromancie, la physiognomonie et les talismans. Je ne dis pas que ces pratiques répandues sont illicites ; je soutiens plutôt que, par souci de cohérence interne, ils auraient dû l’être, et le fait qu’ils ne le soient pas nécessite donc une explication. Bien que je me concentre principalement sur l’Empire ottoman aux premiers temps modernes, une grande partie des sources écrites relative aux sciences occultes au cours de cette période est constituée de traductions et d’adaptations de textes arabes médiévaux ou des premiers temps modernes, eux-mêmes souvent redevables à des antécédents mésopotamiens, égyptiens, grecs et juifs. Dans le but de mettre en évidence ce qu’il y a de « spécifiquement islamique » dans les pratiques en question, j’ai tenté de les comparer avec leurs précurseurs préislamiques et cherché à voir comment elles ont été « islamisées » et donc acceptées dans l’Empire ottoman. Je montre qu’il y avait trois voies principales pour la légitimation des pratiques occultes :• Légitimation exégétique. La grande majorité des traités analysés dans les trois études de cas commencent par de nombreuses citations du Coran et des ḥadīths ainsi que par des textes qui les interprètent d’une manière qui semble légitimer la pratique en question. C’est ce qu’on appelle al-dalāʾil al-naqliyyah , c’est-à-dire « preuve relayée ».• Légitimation hagiographique. Un bon nombre des traités analysés ici contiennent des anecdotes qui lient la pratique en question à un ou plusieurs personnages historiques et religieux importants – depuis des philosophes grecs aux compagnons du Prophète et au-delà – les légitimant ainsi par association. C’est ce qu’on appelle al-dalāʾil al-ʿaqliyyah , c’est-à-dire « preuve rationnelle ».• Légitimation sémiotique. Bien que je discute des légitimations exégétique et hagiographique, mon principal argument dans cette thèse est que dans le monde musulman, la divination et la magie sont généralement conçues comme des pratiques de lecture et d’écriture . En conséquence, ce qui aurait dû être considéré comme des pratiques illicites a gagné en légitimité grâce à la centralité des concepts de lecture et d’écriture dans l’Islam. Ce dernier point repose sur le fait que la notion de texte, et les concepts étroitement liés d’écriture et de lecture, traversent l’Islam de part en part. Le Prophète aurait dit que la première chose que Dieu a créée était le qalame, tandis que le premier mot de la Révélation est « Lis ». Pour l'Islam, toute la Création est un texte, comme l’est la séquence d’événements qui s’y déroulent. Le Coran est un texte qui explique la Création, et la vaste littérature exégétique, ainsi que les expériences quotidiennes des croyants individuels, sont des textes qui, à leur tour, expliquent le Coran. Il est impossible d’imaginer l’Islam comme un système religieux et culturel sans parler de texte, d’écriture et de lecture. Je soutiens que cette centralité sous-tend la légitimation des pratiques occultes, de sorte que, par exemple, l’interprétation des rêves est considérée comme le déchiffrement d’un texte lu sur la Tablette Préservée, tandis que les talismans sont considérés comme l’activation du pouvoir de l’écriture en tant qu’intermédiaire du pouvoir divin<br>The Qurʾān indicates that the Unseen (al-ghayb) is predetermined; that is, it is written from the beginning of time and for all eternity. At the same time, the Qurʾān makes it clear that the Unseen is beyond the reach of ordinary humans. And yet, occult practices of divination and magic aiming to look into and intercede in the Unseen are and have often been practiced throughout the Muslim World. This thesis asks how pious Muslims have reconciled occult practices with the Qurʾānic injunction against human interaction with the Unseen. What stories have pious Muslims historically told themselves in order to legitimate their transgression of such unambiguously stated sanctions? I seek answers to this question by focusing on three case studies: oneiromancy, physiognomy, and talismanry. I am not saying that these widespread practices are illicit; rather, I argue that for the sake of internal consistency, they should have been illicit, and the fact that they are not therefore requires an explanation.Although my main focus is on the early modern Ottoman Empire, much of the written documentation pertaining to the occult sciences during that period are translations and/or adaptations of mediaeval or early modern Arabic texts, which are themselves often heavily indebted to antecedents including Mesopotamian, Egyptian, Greek, and Jewish sources. In an effort to highlight what is “specifically Islamic” about the practices in question, I have tried to compare them with their pre-Islamic precursors and sought to see how they were “Islamicized” and thereby became accepted in the Ottoman Empire. I show that there were three main avenues for the legitimation of occult practices:• Exegetic legitimation. The large majority of the treatises analyzed in the three case studies begin with numerous citations from the Qurʾān and the ḥadīths as well as passages that interpret them in ways that appear to legitimate the practice in question. This is named al-dalāʾil al-naqliyyah, that is, “relayed evidence.”• Hagiographic legitimation. Again, many of the treatises analyzed here contain anecdotes that link the practice in question to one or more important religio-historical individuals—ranging from Greek philosophers to the Prophet’s companions and beyond—thus legitimating them by association. This is named al-dalāʾil al-ʿaqliyyah, that is, “rational evidence.”• Semiotic legitimation. Although I do discuss exegetic and hagiographic legitimation, my principal claim in this thesis is that in the Muslim World, divination and magic are generally conceived as reading and writing practices. As a result, what should in theory have been considered illicit practices have gained legitimacy thanks to the centrality of the concepts of reading and writing in Islam.This last point is based on the fact that the notion of text, and the closely related concepts of writing and reading, permeate Islam through and through. The Prophet is related as having said that the first thing God created was the pen, while the first word of the Revelation is “Read.” For Islam, all of Creation is a text, as is the sequence of events that unfolds in it. The Qurʾān is a text that explicates God’s creation, and the large body of exegetic literature, together with individual believers’ everyday experiences, are texts that in turn explicate the Qurʾān. It is impossible to imagine Islam as a religio-cultural system without text, writing, and reading. I argue that this centrality underlies the legitimation of occult practices, so that, for example, the interpretation of dreams is seen as deciphering text read from the Preserved Tablet, while talismanry is seen as activating the power of writing as a conduit of divine power